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NPA - Au risque de prolonger l’épidémie, Macron autorise tous les secteurs industriels à redémarrer

Avril 2020, par Info santé sécu social

BLOG NPA AUTO-CRITIQUE

Trop, c’est trop ! L’UIMM (Union des industries et métiers de la métallurgie) a lancé un appel à Macron pour qu’il reconnaisse le caractère essentiel de toutes les filières industrielles durant cette épidémie de coronavirus. L’UIMM, l’Union des industries et métiers de la métallurgie, le cœur historique du patronat français, représente 42 000 entreprises de l’automobile, de la sidérurgie ou de l’aéronautique et emploie 1,5 million de salariés dans des entreprises de toutes tailles.

Macron a entériné ce que le patronat réclame, à savoir un déconfinement à sa propre initiative au mépris des injonctions du personnel soignant. La distinction activité essentielle / non essentielle a disparu de sa déclaration télévisée du 13 avril : à l’exception de quelques activités interdites, « tous les autres secteurs doivent pouvoir produire » maintenant avant la date du 11 mai. Au risque de prolonger la durée de l’épidémie pour céder aux injonctions patronales.

L’automobile en « première ligne » de la reprise de la production industrielle

Toyota pourrait être la première grande usine automobile de montage à reprendre en France. Les premières équipes seraient composées de volontaires pour « la carrosserie et la peinture » et les presses devraient tourner à partir du 21 avril en trois équipes « aux horaires habituels ». Dès le lendemain, la production repartirait avec l’objectif de 1 500 voitures la première semaine. La direction de Toyota voit grand : elle veut achever la production de 35 000 voitures du modèle actuel pour laisser place à la fabrication d’une nouvelle génération de la Yaris.

Mais la production n’a pas encore repris. Au CSE tenu le 10 avril, la CGT a voté contre la reprise. « C’est un coup de poignard dans le dos des soignants » a déclaré le secrétaire du syndicat CGT de l’usine. Si tous les autres syndicats se sont “courageusement abstenus” lors du CSE, ils ont critiqué la date envisagée du redémarrage, la CFDT estimant qu’il n’y a pas assez de masques et pas assez « de détails sur toutes les mesures annoncées par la direction ». Et sur place, au moment du démarrage, une résistance pratique des ouvriers peut être un obstacle aux plans prévus. Le droit au retrait n’a pas disparu du code du travail !

PSA et Renault sont aussi en préparation de leur redémarrage. PSA avait échoué le 31 mars à faire reprendre deux usines tests, celle de Valenciennes - Trith-Saint-Légerqui fabrique des boites de vitesse, et celle de moteurs à Douvrain. L’opposition de tous les syndicats combinée au mécontentement local avait fait reculer PSA. Tavarès et PSA n’ont pas abandonné. L’usine de Hordain, ex Sevelnord, spécialisée dans la fabrication des véhicules utilitaires, est maintenant dans les priorités pour le redémarrage. Dans un premier temps, la direction envisage de faire travailler le matin une demi-équipe, soit entre 3 et 400 personnes. Si la CGT refuse cette reprise en période de confinement, la CGC a donné sa caution et FO demande « de ne pas confondre vitesse et précipitation » !

Pour les grandes usines de montage – Poissy, Mulhouse et Sochaux –, le calendrier de la reprise n’est pas fixé mais des équipes sont déjà sur place pour la préparer avec dès maintenant pour ceux en poste un masque par salarié et par demi-journée de travail, et un en plus s’il y a trajet en covoiturage.

Chez Renault, alors que des activités se poursuivent dans les centres d’études de Guyancourt et Lardy, la reprise de la production se prépare aussi. Dominique Sénard, le successeur de Carlos Ghosn, a déclaré sur RTL que la reprise généralisée du travail dans les usines se ferait en août avec un rythme de travail plus soutenu de « 60 heures par semaine », grâce à des accords locaux avec les syndicats et « sur une période très limitée ». L’alerte est donnée.

Chez les équipementiers aussi

Les grands équipementiers sont aussi parmi les plus actifs pour le maintien et la reprise de la production. Valéo n’a jamais suspendu complètement sa production, notamment dans l’usine d’Étaples dans la Manche, et Michelin a dès maintenant repris une partie de sa production. Quant à Bosch, une centaine de personnes ont été convoquées ce 14 avril pour fabriquer des buses pour moteurs diesel, le type même d’activité essentielle !

La reprise de la production envisagée par toutes ces grandes entreprises entraîne des centaines de sous-traitants, souvent des petites ou moyennes entreprises où les contrôles de sécurité mis en place sont inexistants.

Gestes barrières et recours au matériel de protection comme les masques sont la traduction de l’obligation du patronat à assurer la sécurité sur les lieux de travail dont il est le seul responsable. Les accords signés avec quelques syndicats au plan de la métallurgie et de plusieurs usines n’apportent rien de plus à cette obligation et ne visent en fait qu’à co-partager la responsabilité des conséquences du redémarrage de la production. Preuve que le patronat a, et à juste titre, peur des conséquences sur tous les plans, y compris pénal, de sa volonté de reprendre la production dans ces conditions.

Écouler la production

Et ils en veulent toujours plus. Au tour des ventes de voitures. « La réouverture des activités de logistique, livraison et ventes, indispensables à la reprise de la production » est maintenant revendiquée par La Plateforme automobile, le groupe de pression qui regroupe toutes les entreprises de la filière, des constructeurs, aux équipementiers, sous-traitants et garages sous la houlette de Luc Châtel, un ancien ministre de l’Éducation nationale de Sarkozy reconverti en chef du lobby automobile,

Peu d’acheteurs en Europe, des stocks évalués à deux ou trois mois, en sortie d’usines et dans les réseaux de commercialisation, le seul motif tangible à une reprise de la production est l’exportation vers des pays comme la Chine où l’épidémie a commencé trois mois plus tôt qu’en Europe et y est donc, selon les déclarations officielles du pays, contenues avec un temps d’avance. « Mon inquiétude est que la Chine est repartie alors que la France est arrêtée. C’est un danger très important pour notre industrie », a osé déclarer le président de l’UIMM. Mais le décalage est tout simplement la conséquence des dates différentes de la propagation du virus en Chine et en Europe. Un fait nié par l’obsession des parts demarché pour organiser ici une reprise de la production en pleine épidémie.

Le mensonge des jours heureux

Des jours heureux, a promis Macron. Tu parles ! C’est une reprise de la production en pleine épidémie qui conduira peut-être à ne pas pouvoir tenir la date du 11 mai comme date du déconfinement. Ce sont des patrons qui comme Sénard annoncent vouloir nous faire travailler 60 heures par semaine. C’est une crise de l’industrie automobile décrite comme la plus importante de son histoire. Ce sont des patrons qui ouvertement mettent leurs profits avant nos vies !

C’est maintenant qu’il faut mettre en échec la prétention des constructeurs automobiles et des grands équipementiers à reprendre la production selon leur calendrier et leurs impératifs de profit. Bien sûr que le confinement auquel nous sommes assujettis n’est pas propice à des mobilisations d’ensemble. Mais du refusle plus collectif possible de ces reprises imposées, à l’exercice du droit de retrait et au contrôle le plus strict des conditions de travail imposées aux volontaires obligatoires sur les postes de travail, les manifestations de résistance et d’insubordination ouvrières peuvent être nombreuses et inédites dans cette situation jamais vue.

Oui la production de voitures n’est pas essentielle et aujourd’hui, dans la pénurie persistante, un masque utilisé pour produire un bien non essentiel comme une voiture, c’est un masque de moins pour le personnel soignant.