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NPA - Le quotidien d’une aide-soignante en EHPAD : entre exploitation au travail et humiliation par la police

Avril 2020, par Info santé sécu social

CORRESPONDANT.E.S NPA 31

Peux-tu te présenter et nous parler de ton quotidien en EHPAD ?
Je suis une étudiante infirmière de 19 ans en première année à Toulouse et, en cette période de Covid 19, je fais des remplacements en tant que faisant fonction aide-soignante au sein d’un EHPAD. Nos horaires de travail habituellement répartis en 7h, de 6h45 à 13h45 ou de 13h à 20h, se transforment en journées de 15h minimum, certains soignants étant en arrêt de travail dû à leur proximité dans leur entourage avec une personne testée positive au Covid 19.

Au niveau des moyens de protection, c’est de plus en plus dur : nous n’avons qu’un seul masque chirurgical pour toute la journée et c’est tout ce que l’on peut espérer ! Nous n’avons pas même de tablier pendant la toilette, alors que c’est obligatoire ! Les infirmières ont à disposition une charlotte et une sur-blouse seulement à réutiliser pour toute la semaine. À la fin de notre journée, nous devons rentrer également avec nos tenues de travail qui sont sales pour les laver à la maison car plus aucune prise en charge du linge n’est possible actuellement. Les résidents sont angoissés à la vue des risques que nous leur faisons courir par manque d’équipement, et nous aussi.

Et en plus, il vous faut subir des contrôles de police…
En plus de notre travail épuisant physiquement et psychologiquement, nous devons aussi affronter les forces de l’ordre en rentrant du travail. C’est ce qui m’est arrivé aujourd’hui : épuisée à la fin d’une journée de travail, je sortais du métro pour rentrer chez moi quand je me suis faite arrêter par la police qui m’ont demandé mon attestation. Je leur présente mon attestation de sortie dérogatoire, mon justificatif de déplacement professionnel fourni par l’EHPAD, ma carte d’identité, ma carte professionnelle ainsi que ma blouse sale et mes chaussures de travail. Malgré tous ces éléments qui justifiaient mon déplacement, ils ont menacé de me verbaliser pour avoir écrit la date au crayon à papier sur mon attestation de déplacement dérogatoire.

J’essaie de leur expliquer qu’étant donné ma situation d’étudiante, je ne peux pas me permettre d’imprimer de nouvelles attestations tous les jours car cela me reviendrait trop cher alors je l’écris au crayon à papier. Cela ne leur a pas suffi, ils m’ont fait attendre dans un coin sans bouger, sous leur surveillance pendant plus de 20 minutes interminables où ils me faisaient remarquer que j’étais « cuite », qu’ils m’avaient « chopée à inventer un parcours héroïque juste pour sortir de chez moi égoïstement » jusqu’à ce qu’ils appellent la directrice de mon établissement qui leur a confirmé que j’étais bel et bien présente au travail. Sans excuse ils m’ont enfin relâchée et laissée rentrer chez moi.

Que demandez-vous ?
Cette situation n’est plus possible, il faut que nos soignants puissent être testés au Covid 19 afin de pouvoir garantir un rythme de travail stable pour nos collègues et protéger nos résidents.
Il nous faut des équipements supplémentaires : des masques et de préférence de type FFP2, des sur-blouses, des charlottes, des sur-chaussures. Et surtout, il faut en finir avec ce flicage permanent qui a pour seul but d’instaurer des rapports violents avec la population et de creuser encore un peu plus les inégalités.

Propos recueillis par la rédaction