Luttes et mobilisations

JIM - L’Ordre des médecins appelle à manifester !

Février 2023, par Info santé sécu social

Paris, le samedi 10 février 2023
Le Conseil national de l’Ordre des médecins annonce qu’il participera à la grande manifestation des médecins de mardi prochain contre la loi Rist.

C’est semble-t-il une première dans l’histoire de l’Ordre : ce jeudi, le Conseil national de l’Ordre des médecins (CNOM) a annoncé qu’il « prendra part à la manifestation organisée pour protester contre la proposition de loi Rist » mardi prochain. Organisé par l’ensemble des six syndicats de la médecine libérale (MG France, CSMF, FMF, SML, UFML, Avenir Spé), cette manifestation et cette grève des cabinets répondra plusieurs mots d’ordre (augmentation du tarif de la consultation, défense de la liberté d’installation, dénonciation du contrat d’engagement territorial…) mais sera avant tout dirigée contre la proposition de loi de la députée et médecin Stéphanie Rist.

Adoptée à l’unanimité en première lecture à l’Assemblée Nationale le 19 janvier dernier, cette loi prévoit de permettre l’accès direct à certaines professions paramédicales (kinésithérapeutes, orthophonistes, IPA) et ouvre le droit à la primo-prescription aux IPA. Une réforme qui créé un « risque de désorganisation des soins » selon le CNOM. « L’adopter, c’est promettre aux Français une médecine à deux vitesses, entériner des risques de perte de chance pour les patients » poursuit le communiqué de ce jeudi. « Nous médecins, nous ne pouvons accepter que certains de nos concitoyens n’aient pas accès à un diagnostic médical et à une stratégie thérapeutique qui relèvent de la compétence des médecins et d’eux seuls, compte tenu de leur longue formation initiale et de leur formation continue ».

« Tout patient a le droit de voir un médecin »
En octobre dernier pourtant, le CNOM s’était prononcé en faveur d’un renforcement du partage de compétences entre les médecins et les paramédicaux lors d’une réunion du comité de liaison des institutions ordinales (CLIO). Mais il semble désormais que le CNOM juge que la loi Rist va trop loin en permettant un accès direct aux paramédicaux. « Tout patient a le droit de voir un médecin s’il est malade, seule la coordination par le médecin est à même de garantir aux patients l’accessibilité, la qualité et la sécurité de leurs parcours de soins » estime-t-il.

La manifestation du 14 février coïncidera avec le début de l’examen de la proposition de loi Rist par le Sénat en séance publique. A la commission des affaires sociales ce mercredi, les sénateurs ont d’ores et déjà entendu les inquiétudes des médecins et ont fortement amendé le texte voté par les députés.

Les sénateurs ont tout d’abord précisé que l’accès direct aux paramédicaux ne pourra être possible qu’au sein des maisons de santé pluriprofessionnels (MSP), des centres de santé et des équipes de soins primaires et spécialisés et non plus des CPTS, afin de s’assurer que les paramédicaux « exercent leur activité en lien étroit avec les médecins » explique la sénatrice LR Corinne Imbert, rapporteur du texte (ce qui sous-entend que ces modes d’exercice implique nécessairement une collaboration effective entre les professionnels). Un amendement a aussi été adopté pour que le droit à la primo-prescription des IPA soit conditionné à des avis de la Haute Autorité de Santé (HAS) et de l’Académie de Médecine.

Les sénateurs votent une « taxe anti-lapins »
Les sénateurs ont également supprimé deux amendements votés par l’Assemblée Nationale et qui inquiétaient particulièrement les médecins : l’un qui créait un principe de « responsabilité collective » des soignants concernant la permanence des soins, dénoncé comme un retour des gardes obligatoires par les médecins, l’autre qui visait à récompenser « l’engagement territorial » des libéraux. Dans les deux cas, les sénateurs ont jugé que ces amendements étaient « inutilement inquiétants et dénués d’effet » et ont renvoyé aux négociations conventionnelles le soin de régler ces questions. Parallèlement, les sénateurs ont voté un amendement créant « une indemnisation du médecin à la charge du patient fautif » lorsqu’un patient n’honorera pas un rendez-vous.

Ces gages donnés aux médecins par les élus de la haute assemblée suffiront-t-ils à apaiser leur colère et à les dissuader de venir manifester mardi prochain ? Peu probable tant les appels à manifester se multiplient. Outre le CNOM, les syndicats Jeunes Médecins et Reajgir, ainsi que le collectif Médecins pour demain et la fédération SOS Médecins ont récemment annoncé leur participation à la manifestation du 14 février.

Nicolas Barbet