Psychiatrie, psychanalyse, santé mentale

Le Monde.fr : Attentat à Paris : Gérald Darmanin dénonce « un ratage » dans le suivi psychiatrique du suspect

il y a 4 mois, par infosecusanté

Le Monde.fr : Attentat à Paris : Gérald Darmanin dénonce « un ratage » dans le suivi psychiatrique du suspect

« Les services du ministère de l’intérieur ont fait le maximum », a affirmé le ministre, réitérant sa volonté de créer une « injonction administrative » pour que les préfets puissent forcer quelqu’un à se présenter devant un psychiatre.

Le Monde

Publié le 04/11/2023

Après l’attentat survenu à Paris samedi, le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, a dénoncé lundi 4 décembre, sur BFM-TV/RMC, qu’il y avait eu « un ratage [dans le suivi] psychiatrique » du suspect. « Les médecins, à plusieurs reprises, ont considéré qu’il allait mieux et qu’il pouvait vivre, si j’ose dire, librement. (…) Il y a quelqu’un de malade mentalement qui ne prend plus son [traitement] et qui passe à l’acte », a-t-il déclaré, estimant par ailleurs que « les services du ministère de l’intérieur [avaient] fait le maximum ».

Le suspect de l’attaque, dans laquelle une personne a été tuée et deux autres ont été blessées à coups de couteau et de marteau, avait effectué quatre ans de prison à la suite d’une condamnation pour un projet d’action violente à la Défense (Hauts-de-Seine). Il était par ailleurs soumis à un « suivi » psychiatrique, sans hospitalisation, qui était arrivé à échéance en avril 2023 après des rapports successifs du médecin coordinateur qui ne concluaient pas à la nécessité de reprendre un suivi médicamenteux.

Lundi, le ministre de l’intérieur a redit sa volonté de créer une « injonction administrative » en parallèle de l’injonction judiciaire, qui permet actuellement à un juge d’ordonner un suivi médical. A ce jour, « le préfet ne peut pas demander, (…) forcer quelqu’un à se présenter devant les psychiatres pour constater que cette personne, manifestement, ne va pas bien ; c’est ce qu’il faudrait changer, me semble-t-il », a-t-il affirmé. Selon M. Darmanin, environ « 30 % des personnes suivies pour radicalisation sont atteintes de troubles psychiatriques ; (…) c’est beaucoup de personnes ».

De son côté, le porte-parole du gouvernement, Olivier Véran, a affirmé lundi matin, sur RTL, que le parcours « médical, administratif et pénal » du suspect était « conforme à ce qui a[vait] été prescrit et à l’Etat du droit ». A l’instar de M. Darmanin, le porte-parole a estimé que son passage à l’acte posait la question de « l’adaptation du droit » : « Ces obligations ont été remplies et, pour autant, il a pu tuer. Donc est-ce qu’il faudrait renforcer le droit de manière à éviter que ce type de drames ne réapparaisse un jour ? Par exemple se pose la question d’avoir une prolongation de l’injonction de soins lorsqu’il s’agit de personnes qui cumulent la pathologie psychiatrique et la radicalisation. »

Le président du RN n’est pas opposé à la rétention « à vie »
« Un suivi pour faire quoi ? (…) Vous pensez que ça change quelque chose ? », a fustigé le président du Rassemblement national (RN), Jordan Bardella, sur Sud Radio. « Il y a des profils dans notre société. On pourra mettre tous les efforts du monde pour réinsérer (…), je pense que la place de ces personnes-là, elle est en prison. »

« Hormis être naïf, personne ne croit qu’en trois ou quatre ans vous êtes déradicalisé », a également estimé le leader d’extrême droite lors d’une conférence de presse, en disant penser que « les islamistes d’hier et d’aujourd’hui sont les terroristes de demain ». « Je ne crois pas à la déradicalisation, je crois en une chose, c’est la taqiya et l’art de la dissimulation qui fait partie des [pratiques] des fondamentalistes islamistes », a-t-il ajouté.

M. Bardella a de nouveau plaidé pour le renforcement de la rétention de sûreté, un dispositif permettant de placer en centre médico-judiciaire les prévenus ayant purgé leur peine mais dont la dangerosité est jugée importante. « Nous proposons depuis maintenant plusieurs années [son] instauration systématique pour les faits liés au terrorisme », a affirmé M. Bardella, tête de liste du parti d’extrême droite aux élections européennes de juin. Interrogé sur une rétention « à vie », le patron du RN a répondu : « Pourquoi pas. (…) A partir du moment où vous fomentez un attentat contre la France, que vous dormiez le reste de votre vie en prison, je trouve ça parfaitement sain et parfaitement normal. »

« Le RN a cette capacité à analyser avant les faits ; ils ont des réponses à toutes les questions qu’on se pose encore », avait critiqué sur RTL le porte-parole du gouvernement. « Si le médecin indique que le patient ne présentait plus de dangerosité, qu’il ne présentait plus de signes de décompensation, et si l’individu, lorsqu’il était surveillé, ne montrait pas de symptômes laissant à penser qu’il passerait à l’acte : les libertés, la sécurité, tout ça est mis en tension », a-t-il expliqué, rappelant que « la présomption de son départ [pour faire le djihad] avait été un critère suffisant pour son maintien en prison pendant quatre ans ».

« Tout est mis en place pour éviter les attaques pendant les JO »
En 2021, une loi a prolongé la durée de l’injonction de soins à la sortie de prison, la passant de trois à cinq ans – ce que le RN n’avait pas voté, a redit le ministre de l’intérieur. « Je ne veux pas qu’on dissimule le débat de l’islam radical derrière celui de l’instabilité psychiatrique », a insisté M. Bardella, lundi.

Le « terrorisme mute et utilise des failles de notre système », a également affirmé M. Darmanin, faisant référence à la radicalisation du suspect sur Internet alors même qu’il disait l’inverse et que ni la surveillance ni l’écoute de ses communications n’ont permis de la déceler. Interrogé sur la possibilité de nouvelles attaques terroristes, notamment durant les Jeux olympiques (JO) de Paris, en 2024, le ministre a dit avoir « cette appréhension tous les jours, toutes les nuits » bien qu’il « s[ache] qu’il y a des policiers, des services de renseignement très courageux » qui empêchent nombre d’attaques.

« La sécurité qui est mise en place pour les JO, comme la sécurité qui a été mise en place pour la Coupe du monde de rugby, est une sécurité qui fait en sorte que tous les événements susceptibles de rassembler des foules soient des événements dans lesquels vous n’aurez pas de risque de tomber sur des individus comme lui, a de son côté assuré M. Véran. Tout est mis en place pour éviter les attaques pendant les JO, mais nous ne pensons pas en termes de JO, nous pensons en termes de vie quotidienne pour les Français. »

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