Le handicap

Faire face - Fauteuils roulants : la réforme qui fait reculer les droits des personnes handicapées

Novembre 2021, par Info santé sécu social

Publié le 28 octobre 2021 par Franck Seuret

Un projet de décret remet en cause certains principes fondamentaux de prise en charge des fauteuils roulants par la Sécurité sociale. Le texte obligerait les assurés à rendre leur ancien modèle. Ils devraient attendre cinq ans avant tout renouvellement. Entre autres…

Ce n’est encore qu’un projet pour le moment. Mais la version actuelle du décret modifiant les modalités de prise en charge par l’Assurance maladie des fauteuils roulants – les véhicules pour personnes handicapées (VPH) dans le jargon administratif – a de quoi inquiéter leurs utilisateurs. Dans un courrier adressé au Premier ministre le 11 octobre, APF France handicap dénonce plusieurs points de cette réforme.

1 – Impossible de garder son vieux fauteuil

Vous n’avez plus besoin de votre fauteuil ? Parce que vous allez en changer ou que vos besoins ont évolué. Dès lors qu’il a été financé, même partiellement, par l’Assurance maladie, vous devrez alors le restituer à un centre homologué. « L’assuré signe un engagement de restitution lors de l’achat de son véhicule », précise même le texte.

« Je ne vois pas pourquoi je devrais rendre un fauteuil roulant que j’ai acheté avec 20 % de prise en charge Assurance maladie et la participation de ma mutuelle (à laquelle je cotise) et un apport personnel important », témoigne cet utilisateur, cité par APF France handicap. De plus, de nombreuses personnes utilisent leur ancien fauteuil en appoint. Ou pour avoir une solution de repli en cas de panne.

2 – Pas de renouvellement avant cinq ans
« Le renouvellement de la prise en charge du VPH (manuel, électrique ou autre) ne peut intervenir avant une période de cinq ans suivant la date de délivrance du VPH précédent », stipule le projet de décret. Qu’il s’agisse d’un fauteuil neuf ou d’occasion. Un sacré bond en arrière.

Certes, il arrivait que des caisses exigent déjà cinq années de délai. En toute illégalité, avait jugé la cour d’appel de Montpellier. Les textes en vigueur jusqu’à présent autorisent en effet, sauf cas particulier, un renouvellement tous les deux ans pour les fauteuils roulants manuels et trois ans pour les électriques.

Le projet de décret prévoit une seule possibilité de dérogation : « l’évolution rapide de la pathologie du patient ». « C’est très nettement insuffisant et révèle une grave méconnaissance de l’usage des fauteuils par leurs utilisateurs », dénonce Malika Boubékeur, conseillère nationale compensation, autonomie, accès aux MDPH à APF France handicap.

3 – Pas deux fauteuils en même temps
Vous avez besoin d’un fauteuil roulant manuel et d’un fauteuil roulant électrique ? Ou de deux fauteuils manuels ? Impossible. La prise en charge de l’un exclut celle de l’autre, selon le projet de décret. À une exception près : pour les enfants de moins de 16 ans.

« Et les adultes qui vivent en établissement la semaine et retournent à domicile le week-end ?, interroge Malika Boubékeur. Et toutes les personnes qui utilisent un fauteuil à l’intérieur et un autre à l’extérieur. L’ancien projet prévoyait le cumul possible de trois VPH différents. C’est donc un très net recul. »

4 – Location longue durée obligatoire

Pour certains types de fauteuils, les utilisateurs seront obligés de recourir à la location longue durée. Ce sera le cas, notamment pour les fauteuils roulants multiposition et de verticalisation. APF France handicap demande que « toutes les modalités d’acquisition (location courte durée, achat neuf, achat remis en bon état d’usage et location longue durée) soient possibles pour tous les types de fauteuil. »

Les syndicats des prestataires de santé à domicile dénoncent eux aussi ce projet de décret. Notamment les dispositions concernant la location longue durée. Ce front commun suffira-t-il à faire bouger les choses ?