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Liberation.fr : Permanence des soins : il faut contraindre le privé à prendre sa part, exhorte la Cour de comptes

il y a 5 mois, par infosecusanté

Liberation.fr : Permanence des soins : il faut contraindre le privé à prendre sa part, exhorte la Cour de comptes

Pour soulager l’hôpital public, l’institution recommande de conditionner les autorisations d’activité des établissements de santé à leur participation aux gardes et astreintes.

par Nathalie Raulin

publié le 12 octobre 2023

C’est une recommandation de nature à alimenter la gronde de médecins libéraux, appelés par leur syndicat à une grève reconductible à compter du vendredi 13 octobre. Dans un rapport dévoilé jeudi 12 octobre et consacré aux conséquences de la structuration de l’offre hospitalière entre établissements de santé publics, privés à but non lucratif et cliniques privées, la Cour des comptes estime « nécessaire » de « clarifier » leurs missions respectives, de sorte à ce que les usagers puissent accéder aux soins « dans des conditions financières géographiques et temporelles correspondant à leurs besoins, quel que soit le statut de l’établissement en mesure de les prendre en charge ».

Dans l’affaire, chacun doit balayer devant sa porte. La Cour pointe donc la nécessité de mieux border l’activité libérale des praticiens de l’hôpital public : elle recommande d’ajouter aux limites actuelles reposant sur le temps de travail et le nombre d’actes, « peu vérifiables et insuffisamment contrôlés », un « plafonnement des revenus issus de cette activité libérale par rapport aux revenus de l’activité salariée ».

Week-ends, mois d’août et fêtes de fin d’année
Néanmoins, c’est un bouleversement d’une tout autre ampleur que les sages de la rue Cambon appellent de leurs vœux. Face aux difficultés croissantes de l’accès aux soins, ils estiment indispensable d’inciter, « voire [de] contraindre », opérateurs privés et praticiens libéraux à coopérer davantage avec le secteur public. Actant que l’obligation d’assurer la continuité des soins joue « un rôle important dans les difficultés de l’hôpital à recruter des soignants », la Cour met les pieds dans le plat : pour elle, il est devenu impératif d’organiser un partage plus équitable entre public et privé, au niveau national et territorial, de la permanence des soins, soit le week-end, durant le mois d’août et les fêtes de fin d’année. Or, c’est contre cette ambition également inscrite dans la proposition de loi Valletoux, qui sera discutée au Sénat le 24 octobre, que bon nombre de médecins libéraux se mobilisent…

Mais la Cour des comptes ne se contente pas d’une recommandation éthérée. Elle avance aussi le moyen de la faire respecter : modifier le régime des autorisations délivrées par les Agences régionales de santé (ARS), de sorte à ce que l’octroi ou le renouvellement des autorisations d’activité des établissements de santé à but non lucratif ou privés soit conditionné à leur participation à la permanence des soins.

Répondre aux « besoins de santé et du service public »
Selon l’institution, un principe simple pourrait prévaloir : « Tout établissement de santé autorisé et financé par la solidarité nationale doit participer à la mise en place effective d’un service public hospitalier performant à l’échelle du territoire considéré, en fonction de sa capacité d’accueil, des spécialités qu’il exerce et en réponse aux besoins concrets des patients. »

Pilote du rapport, Véronique Hamayon, présidente de la 6e chambre de la Cour des comptes, précise : « Les autorisations délivrées par les ARS reposent aujourd’hui essentiellement sur des critères de qualité et de sécurité des soins, et pas sur les besoins de santé du territoire ou ceux du service public hospitalier. Nous recommandons de conditionner la délivrance des autorisations, notamment à la participation aux gardes et astreintes, le tout avec une tarification en secteur 1 ou un reste à charge nul pour le patient après intervention des complémentaires. » Pour ce faire, « il faut une disposition législative », convient-elle. La proposition de loi Valletoux pourrait s’y prêter. Du moins si le texte résiste à la colère des praticiens libéraux.