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Lequotidiendumedecin.fr : Présidentielle : débat animé, une pincée de santé et quelques surprises

Mars 2017, par infosecusanté

Présidentielle : débat animé, une pincée de santé et quelques surprises

Cyrille Dupuis

21.03.2017

Pendant plus de trois heures, lundi soir sur TF1, les cinq principaux candidats à la présidentielle se sont employés à mettre en lumière leurs programmes respectifs à la faveur d’un débat plutôt vif, et parfois même cacophonique en raison de la possibilité de s’interrompre et de se répondre librement (les six autres candidats qualifiés avaient été écartés).

Si la santé n’était certainement pas la priorité - le sujet a été abordé en fin d’émission - chaque compétiteur dans la course à l’Élysée a pu néanmoins exposer ses priorités dans ce domaine en quelques minutes.

Fidèle à son habitude, Benoît Hamon a abordé la thématique par le versant privilégié de la santé publique. Le candidat PS dresse le constat de l’explosion des pathologies chroniques liées aux modes de vie et à l’environnement et réaffirme dans ce contexte sa volonté d’interdire les perturbateurs endocriniens et de mener une « action implacable » contre les pesticides. Lui président, les pathologies psychiques liées au travail seront reconnues comme des maladies professionnelles.

Dans la même veine, Emmanuel Macron mise sur une révolution de la prévention, estimant que le système de santé tricolore soigne bien mais prévient mal. Il propose à nouveau que tous les étudiants en santé consacrent un trimestre à des actions de prévention et d’éducation dans les écoles ou des entreprises, sorte de service sanitaire. Pour combattre la pollution de l’air, le leader d’En Marche ! rapprochera la fiscalité du diesel et de l’essence.

Sur ce terrain, Marine Le Pen a surtout ciblé la loi El Khomri qui a selon elle « démantelé » la médecine du travail en espaçant les visites. La candidate FN s’est indignée par ailleurs de notre « incapacité » à prendre en charge l’autisme en France.

Hamon renonce à toute coercition

Pas de débat possible sans aborder le serpent de mer des déserts médicaux. La surprise est venue sur ce terrain de Benoît Hamon qui, contrairement à ses annonces précédentes, semble avoir renoncé à toute forme de contrainte envers les médecins libéraux (il défendait auparavant le conventionnement sélectif en zone surdotée, puis la fin du conventionnement automatique...). « Ce n’est pas par la coercition mais par les incitations qu’il faut agir pour combler les déserts », a tranché l’ancien ministre de l’Éducation nationale.

L’hôpital n’a été que brièvement abordé. Il « dysfonctionne » selon Benoît Hamon, qui souhaite réformer la tarification à l’activité et alléger la « pression » qui pèse sur les personnels hospitaliers grâce à de nouveaux recrutements. François Fillon comme Emmanuel Macron s’accordent pour promettre à l’hôpital « davantage d’autonomie », ce dernier insistant surtout sur le « décloisonnement » entre la ville et les établissements.

ARS, le mea culpa de Fillon

Sans surprise, le candidat LR a mis en avant sa volonté de « débureaucratiser » la santé, un puissant marqueur à droite, et de mettre le généraliste au cœur du système, un médecin de famille qui doit être payé « correctement ». « On ne peut pas accepter que la rémunération du médecin baisse par rapport à d’autres métiers de service », a-t-il plaidé. Emmanuel Macron souhaite lui aussi que les professionnels de santé libéraux soient « mieux rémunérés », le renforcement du secteur libéral permettant de faire des économies globales.

François Fillon s’est illustré également par une sortie sur les maisons de santé, jugeant que ce modèle qu’il soutient (comme tous les autres candidats) avait été perverti par un « excès de normes » et que nombre de MSP étaient devenues des « monstres trop chers ». Au passage, il s’est livré à un mea culpa sur les agences régionales de santé (ARS), créées lors de son passage à Matignon et qualifiées aujourd’hui de « dispositif très bureaucratique ».

Le Pen veut interdire aux mutuelles de faire de la pub !

Interpellé sur son changement de cap sur la Sécu, François Fillon a dénoncé la « caricature » qui aurait été faite de son projet initial. Le candidat avait ouvert une polémique en proposant de concentrer l’assurance-maladie obligatoire sur les affections graves et de longue durée avant d’écarter cette idée devant le tollé.

Au chapitre financier toujours, Jean-Luc Mélenchon entend « prolonger l’esprit » des pères fondateurs en instaurant une « Sécurité sociale intégrale, en y rapatriant les complémentaires ». Tous les soins prescrits seraient remboursés à 100%. Le candidat de la France insoumise supprimera en revanche le très critiqué RSI, tout comme le fera Marine Le Pen qui voit dans ce régime des indépendants un véritable « sérial killer »... La candidate du FN s’est aussi emportée contre les « 8 milliards d’euros de frais de gestion des mutuelles » proposant de leur interdire désormais toute forme de publicité.

À la lumière de son expérience de mère de famille, Marine Le Pen a enfin défendu la réforme des médicaments à l’unité. « J’ai eu trois enfants, j’aurais pu ouvrir une pharmacie quand ils ont eu 18 ans, tellement j’avais de médicaments à jeter », a-t-elle raconté.

Macron et les lobbies

Ce débat a donné lieu à une passe d’armes assez vive entre Benoît Hamon et Emmanuel Macron, le premier suggérant que le deuxième pouvait être sous l’influence de lobbies chimiques, pharmaceutiques, pétroliers ou bancaires, en raison de ses soutiens financiers. « Je prends l’engagement de n’être tenu par personne », a répliqué Emmanuel Macron