Le droit à la santé et à la vie

Le Quotidien du médecin - « La situation n’est plus tenable sur l’accès aux soins », met en garde le député Philippe Vigier, qui lance une commission d’enquête

Février 2018, par Info santé sécu social

Le député centriste (UDI) d’Eure-et-Loir, Philippe Vigier, vient d’être nommé à la tête d’une commission d’enquête de l’Assemblée nationale sur l’égalité d’accès aux soins. Avocat infatigable de mesures contraignantes pour les médecins (depuis 2012 et encore en 2016), ce parlementaire livrera ses recommandations d’ici à l’été.

LE QUOTIDIEN : En quoi consiste la commission d’enquête sur les déserts médicaux dont vous êtes le président ?

PHILIPPE VIGIER : C’est une commission d’enquête parlementaire classique, qui compte trente membres représentant les différentes sensibilités politiques de l’Assemblée nationale. Elle cherchera à voir où en est exactement la situation de l’égalité d’accès aux soins sur les territoires. On regardera les mesures qui ont été prises, celles qui ne l’ont pas été, les territoires où la situation s’est dégradée, améliorée. Il s’agit d’éclairer la représentation nationale, le gouvernement et tous les acteurs de l’accès aux soins.

Pour cela, nous allons auditionner tous les acteurs engagés sur l’accès aux soins, notamment les représentants des professions médicales et paramédicales comme les ordres, les syndicats et les universitaires. Une fois que nous aurons procédé à ces auditions, l’objectif est non seulement de pointer des dysfonctionnements mais de proposer des solutions.

Avec Marisol Touraine et aujourd’hui Agnès Buzyn, les mesures sur l’accès aux soins se sont multipliées – toutes incitatives. Y a-t-il urgence à agir ?

Oui, la situation que nous vivons n’est plus tenable, elle se dégrade année après année ! Et ce n’est pas faute de l’avoir dit. Plusieurs propositions de loi ont été votées à l’Assemblée, des dispositifs notamment financiers ont été instaurés. Les mesures se sont multipliées dans tous les sens – de la part des collectivités, de l’État, de l’assurance-maladie, des mutuelles. C’est un véritable maquis, et pour autant l’accès aux soins continue de se dégrader ! La réalité, c’est qu’il y a un encombrement toujours plus important des urgences hospitalières. La désertification médicale est toujours là, pas seulement en milieu rural mais aussi dans les grandes villes.

En plus d’évaluer les outils actuels, il faudra aborder le volet de la formation médicale initiale. Est-il normal de louper une vocation médicale pour 0,1 point ? De vouloir supprimer le redoublement de la PACES ? Il faut y réfléchir. Nous nous pencherons aussi sur le développement de la télémédecine.

Dans un passé récent, vous vous êtes souvent illustré par des initiatives visant à contraindre l’installation des médecins. Ce sera à nouveau le cas ?

Ne me faites pas dire les conclusions de l’enquête avant de l’avoir commencée ! Nous ferons des propositions après évaluation. C’est vrai, j’ai déjà proposé plusieurs textes visant à restreindre la liberté d’installation mais d’autres députés comme Olivier Faure (Nouvelle Gauche) l’ont fait aussi [proposition de loi du 6 décembre 2017, prévoyant une nouvelle installation de médecin pour un départ à la retraite dans les zones surdotées, NDLR]. Ce que je veux c’est qu’on stoppe cette dégradation de l’accès aux soins qui se déroule sous nos yeux. Ce rapport sera donc sans tabou, j’espère qu’il ne restera pas sur une étagère !

Pensez-vous que vous arriverez à trouver un consensus politique sur l’accès aux soins au sein de la commission ?

J’espère que oui, car j’ai le sentiment que certains sont en train de bouger. Nous avons des idées communes avec la Nouvelle Gauche, la France Insoumise, les Républicains, et on verra ce que feront les « Marcheurs ». En tout cas, les députés ne peuvent plus dire dans la rue, "il y a un dysfonctionnement majeur", et dans l’hémicycle attendre les bras croisés que ça se passe. Une politique de santé c’est important ! L’accès aux soins est censé être garanti sur tout le territoire, et quoi qu’on en dise ce n’est plus le cas.