Les retraites

Huffpost - Ces régimes spéciaux autonomes contre la réforme des retraites

Septembre 2019, par Info santé sécu social

Ce lundi 16 septembre, avocats, pilotes de ligne ou encore médecins libéraux se mobilisent contre la réforme des retraites.
Par Romain Herreros

RETRAITES - Lorsque la fin des “régimes spéciaux” est évoquée, on entend surtout les exemples de la RATP ou de la SNCF, et beaucoup moins celui des avocats, des pilotes de ligne, des médecins libéraux ou encore des orthophonistes. Pourtant, ce lundi 16 septembre, ce sont bien ces professions libérales qui se mobilisent pour protester contre la réforme des retraites.

Une manifestation est notamment prévue dans l’après-midi à Paris, place de l’Opéra. “On s’attend à une mobilisation extrêmement forte, avec la quasi-totalité des barreaux en grève et des trains entiers d’avocats qui monteront vers Paris”, a déclaré jeudi 12 septembre Christiane Feral-Schuhl, présidente du Conseil national des barreaux.

Les syndicats de pilotes de ligne, hôtesses et plusieurs organisations de médecins, infirmières et kinés ont également annoncé qu’ils se joindraient au mouvement. Dans une tribune publiée dans le JDD dimanche 15 septembre, ces professionnels réunis au sein du collectif SOS Retraites martèlent un message clair : “ne touchez pas à nos retraites”. Car, disposant d’un statut particulier fonctionnant avec des caisses autonomes, ces professions s’estiment lésées par le caractère universel de la réforme portée par le gouvernement. Explications.

Autonomie
C’est là le cœur du problème. Ces professions libérales disposent de leurs propres caisses de retraites et en organisent la gestion. Or, et c’est là le sens de la réforme promue par l’exécutif, il est question de mettre un terme à tous les régimes spéciaux, pour des questions d’économie, le système général étant (très) déficitaire. Ce qui est très loin d’être le cas pour les caisses de ces professions.

“Notre caisse autonome pour la retraite de base comme complémentaire a été créée il y a 50 ans et depuis nous avons été impeccables dans sa gestion. Aujourd’hui, nous disposons de deux milliards d’euros de réserves et nous pouvons garantir 60 ans de pension”, plaide Christiane Féral-Schuhl auprès de Capital, expliquant ne pas comprendre pourquoi les avocats devraient quitter ce système fonctionnel pour “venir dans un régime qui ne va pas bien”.

Autre préoccupation, cette impression de payer pour les autres et de combler le déficit du régime général. À titre d’exemple, les pilotes de ligne souhaitent conserver leur CRPN (caisse de retraite du personnel navigant) et dénoncent un “hold-up” opéré par l’État, qui a prévu de se reverser les réserves de ces complémentaires.

“Pourquoi vouloir casser des caisses de retraites complémentaires indépendantes paritaires qui n’ont jamais été financées par l’État, et dont la gestion a toujours fait ses preuves, pour imposer à la place un système dogmatique et incapable de s’adapter aux besoins des métiers”, interroge le syndicat national du personnel naviguant de l’aéronautique civile.

Des concertations prévues
Ce “projet de captation sans sommation” aurait, selon SOS Retraites, de sérieuses répercutions sur plusieurs métiers. “Cette ‘nationalisation’ de nos régimes autonomes impliquerait pour certaines de nos professions un doublement des cotisations retraite (de 14% des revenus à 28% pour la majorité des avocats), une baisse des pensions et une disparition des provisions que nous avons constituées pour faire face à l’enjeu démographique”, fait valoir le collectif dans le JDD qui promet des “déserts médicaux ou judiciaires” en cas de réalisation de la réforme.

Face à cette grogne, le gouvernement déroule la méthode qui est martelée depuis la rentrée : la concertation. “Il y a des solutions pour chacune des professions”, avec “des durées de transitions adaptées à chacun des cas”, a tenu à rassurer Jean-Paul Delevoye, haut-commissaire à la réforme des retraites, qui veut “lever les inquiétudes injustifiées”.

Le premier ministre a par ailleurs demandé au “Monsieur retraites” du gouvernement de rencontrer tous les acteurs des 42 régimes spéciaux afin de “dresser un état des lieux” et “fixer un calendrier de travail”. Dès mardi 17 septembre, la ministre de la Justice Nicole Belloubet et Jean-Paul Delevoye recevront les représentants des avocats. De leur côté, les 14 professions libérales qui se mobilisent ce lundi ont promis de durcir le mouvement en cas d’impasse. Le gouvernement est donc loin d’en avoir fini avec les régimes spéciaux.