Covid-19 (Coronavirus-2019nCoV) et crise sanitaire

France Info : Covid-19 : malgré le couvre-feu à 18 heures, les courbes des contaminations ne fléchissent plus... et repartent même à la hausse

Janvier 2021, par infosecusanté

France Info : Covid-19 : malgré le couvre-feu à 18 heures, les courbes des contaminations ne fléchissent plus... et repartent même à la hausse

Article rédigé par

Mathieu Lehot

Dans les départements concernés depuis le début du mois de janvier par un couvre-feu à 18 heures, l’indicateur référence du taux d’incidence a, dans un premier temps, diminué. Mais désormais, il remonte.

La France va-t-elle être reconfinée ? Alors que les épidémiologistes appellent unanimement à un nouveau confinement, le président de la République veut tout faire pour l’éviter. D’après les informations recueillies par franceinfo auprès de l’Elysée lundi 25 janvier, Emmanuel Macron souhaiterait connaître précisément les résultats du couvre-feu à 18 heures, généralisé à l’ensemble du territoire depuis le 16 janvier, avant de se décider. Et donc attendre la fin de la semaine.

De fait, ce n’est que vendredi, c’est-à-dire deux semaines après sa mise en place au niveau national, que l’effet global pourra être mesuré. Mais, en attendant, les données épidémiologiques des départements où la mesure est en vigueur depuis le début du mois permettent déjà de se faire une idée. Et les résultats n’incitent pas à l’optimisme.

Le couvre-feu à 18 heures est entré en vigueur dès le 2 janvier dans quinze départements. Il s’agit des Alpes-Maritimes, des Ardennes, du Doubs, de la Haute-Marne, de la Haute-Saône, des Hautes-Alpes, du Jura, de la Marne, de la Meurthe-et-Moselle, de la Meuse, de la Moselle, de la Nièvre, de la Saône-et-Loire, du Territoire de Belfort et des Vosges.

Depuis mi-janvier, les taux d’incidence remontent

La mesure a ensuite été étendue le 10 janvier à huit autres départements : l’Allier, les Alpes-de-Haute-Provence, le Bas-Rhin, les Bouches-du-Rhône, le Cher, la Côte-d’Or, le Haut-Rhin et le Vaucluse. Puis la Drôme et le Var ont rejoint la liste le 12 janvier avant que la mesure ne soit généralisée à toute la métropole le 16 janvier.

Franceinfo a calculé un taux d’incidence commun aux territoires rassemblés par date de couvre-feu. Cet indicateur de référence, qui correspond au nombre de cas positifs sur sept jours pour 100 000 habitants, permet d’évaluer la circulation du virus.

Dans les départements placés sous couvre-feu dès le 2 janvier, le taux d’incidence a d’abord amorcé une baisse continue à partir du 8 janvier. C’est-à-dire à peu près une semaine après l’entrée en vigueur de la mesure. Mais la courbe s’aplatit à partir du 14 janvier, ce qui veut dire que la baisse observée ralentit. Et surtout, sa trajectoire s’inverse complètement depuis le 18 janvier. Le taux d’incidence repart donc à la hausse.

Dans les départements où le couvre-feu à 18 heures est entré en vigueur le 10 janvier, aucun effet bénéfique sur le taux d’incidence n’est observé, au contraire. Alors que cet indicateur aurait dû diminuer une semaine après l’application de la mesure, la courbe montre un effet inverse. Elle repart à la hausse à partir du 15 janvier et cette tendance s’accélère à partir du 17.

En réalité, la juxtaposition de toutes les courbes montre des trajectoires très similaires, quelle que soit la date d’entrée en vigueur du couvre-feu à 18 heures, comme le montre le graphique qui suit. Après un rebond début janvier, dans les jours qui suivent les vacances de fin d’année, les taux d’incidence amorcent une baisse puis repartent à la hausse après le 15 janvier.

Ces données semblent témoigner d’une absence d’effet notable du couvre-feu à 18 heures. Un constat que fait également Renaud Piarroux, épidémiologiste et chef de service à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière. "Avoir ramené le couvre-feu à 18 heures plutôt que 20 heures n’a pas eu un effet spectaculaire. C’est clair. Pour envisager sereinement la suite, il aurait fallu que cette mesure entraîne une chute de 40% des contaminations par semaine. Or, ce n’est pas le cas", explique le spécialiste.

"Une fausse stabilité" au niveau national

Au niveau national, la courbe des nouvelles contaminations montre une tendance légèrement à la hausse amorcée le 16 janvier, après une stabilisation des nouveaux cas entre le 8 et le 15 janvier. Mais Renaud Piarroux alerte sur le fait que les chiffres actuels des contaminations ne permettent pas encore de mesurer la véritable menace : la propagation, en France, du variant apparu au Royaume-Uni.

"Les données épidémiologiques qui sont actuellement utilisées pour suivre le virus sont basées sur la version initiale du Sars-Cov-2. Et elles montrent que la situation est stable. Mais c’est une fausse stabilité. Nous faisons en réalité face à trois épidémies : celle du virus initial, celle du variant britannique et celle du variant sud-africain, estime l’épidémiologiste. Or, la souche britannique est en train de se multiplier à vitesse grand V, malgré le couvre-feu. La situation est sur le point d’exploser et il ne fait aucun doute que des mesures très dures vont devoir être prises", prévient Renaud Piarroux.

Une étude publiée par l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) mardi 26 janvier, révèle que le variant identifié au Royaume-Uni représente près de 10% des cas dépistés en Ile-de-France depuis deux semaines. Dimanche soir, Jean-François Delfraissy, le président du Conseil scientifique, avait déjà alerté sur le risque de voir ce variant se propager. "Si on continue, il y aura 12, 14, 15% de variant britannique dans les semaines qui viennent", a-t-il prévenu. Un conseil de défense sanitaire doit se tenir mercredi, autour du chef de l’Etat, au cours duquel doivent notamment être présentés les résultats d’une enquête flash sur la présence de ce variant sur l’ensemble du territoire.