Politique santé sécu social de l’exécutif

JIM. - Un plan santé pour la ville...et en même temps l’hôpital

Septembre 2018, par Info santé sécu social

Paris, le mardi 18 septembre 2018 -

Accaparé par vos consultations, entre deux soins à domicile, au bloc ou au comptoir de l’officine, vous n’avez peut-être pas eu le temps de vous attarder devant vos écrans pour prendre connaissance du « plan de transformation du système de santé » dévoilé aujourd’hui par le Président de la République.

Rien n’est perdu, le JIM vous livre ici la substantifique moelle d’une réforme présentée comme la plus importante, en la matière, depuis 1958 !

Regagner du temps médical grâce aux assistants médicaux…
Le Président de la République s’est fixé comme objectif premier de redonner du temps médical aux soignants. Plusieurs des mesures présentées par le locataire de l’Élysée vont ainsi dans ce sens, au premier rang desquelles, le développement « d’assistants médicaux ».

Ces nouveaux professionnels accompagneront les médecins pour des « gestes de mesure simple » (tension, poids…), la préparation de la consultation et surtout les tâches administratives. Selon Emmanuel Macron, ils permettront de « dégager » de 15 à 20 % de temps médical supplémentaire.

« L’objectif doit être au moins d’en déployer 4 000 », mais « nous en financerons autant que de besoin », a assuré le chef de l’État, précisant que « les premiers arriveront dès 2019 dans les quartiers prioritaires et les zones sous-denses ».

Ces assistants seront « financés auprès de tous les médecins » qui en feront la demande, dès lors qu’ils exerceront de manière regroupée et s’engageront « sur des objectifs et des résultats », en particulier la « prise en charge de nouveaux patients », le « raccourcissement des délais d’attente » et l’organisation de consultations sans rendez-vous.

…et la fin du numerus clausus
Autre réforme susceptible de redonner du temps aux médecins selon Emmanuel Macron : augmenter leur nombre en supprimant le numerus clausus. Là, le gouvernement promet de maintenir les exigences d’une « sélection » qui deviendra plus « ouverte » et « vivante » et mettra fin à un système « absurde » de recours généralisé aux intérimaires et aux étrangers.

Soulignons néanmoins que cette réforme demeure imprécise par bien des aspects. Ainsi, on ne sait encore comment s’opérera la nécessaire sélection, et l’on peut craindre que le goulot d’étranglement ne se déplace que de quelques années. Reste qu’il est promis une facilitation des passerelles vers les études de médecine et en provenance de ce cursus, facilitation qui doit permettre d’éviter le « gâchis humain » selon les mots du Président qui a promis de poursuivre la « concertation indispensable » à la rénovation des études en santé et de supprimer la PACES.
Quand un Président prêche dans le désert
Concernant le problème chronique des déserts médicaux, le Président a fait valoir que son long « compagnonnage » avec le corps médical (ses deux parents sont médecins) lui avait fait comprendre que toute coercition était vouée à l’échec.

Il propose donc plutôt, entre autres, que dès 2019, 400 médecins généralistes salariés par des centres hospitaliers de proximité ou des centres de santé situés dans les « déserts médicaux » soient déployés pour consulter dans ces déserts.

La fin du médecin solitaire…
Dans l’esprit d’Emmanuel Macron, le médecin seul à son cabinet semble être devenu un anachronisme et il promet que seront déployées les « Communautés professionnelles territoriales de santé » et que l’exercice isolé, qui concerne aujourd’hui encore plus de la moitié des médecins, ne sera bientôt « plus possible ». Ainsi d’ici 2021, des communautés professionnelles territoriales de santé, déjà expérimentées depuis 2016, c’est-à-dire des réseaux de professionnels de santé libéraux, devront être présentes sur tout le territoire afin que les médecins s’organisent entre eux, en lien avec leur hôpital de proximité, pour répondre aux « urgences de ville » non vitales tous les jours jusqu’à 20 heures et ainsi alléger les urgences hospitalières. Sur ce point, il a souligné également qu’à titre personnel il souhaitait que cette prise en charge non hospitalière des urgences s’organise jusqu’à 22 heures après négociations entres les syndicats de médecins et la CNAM. Au total, le souhait du président est que soient créées 1 000 CPTS d’ici à 2022.

…et du paiement à l’acte ?
Le Président propose « aux volontaires » de passer du paiement à l’acte à des forfaits de prise en charge.
Aussi, l’enveloppe récompensant la qualité des soins sera portée de 60 à 300 millions d’euros dès 2019. Des financements au forfait vont par ailleurs être mis en place dès 2019 pour deux pathologies chroniques : le diabète et l’insuffisance rénale chronique. « Il n’y aura plus de paiement à chaque consultation, mais un forfait pour solde de tout compte, charge à l’hôpital de faire en sorte que ses patients n’aient pas besoin de revenir vingt fois », fait-on valoir à l’Élysée, où l’on explique avoir « mobilisé toutes les sociétés savantes pour calibrer le plus possible le parcours de soin idéal ».

D’ici à 2022, ce nouveau système de tarification au parcours et à la qualité des soins devra peser davantage que la tarification à l’activité dans le financement des hôpitaux.

Les hôpitaux de proximité seront maintenus
En marge des nombreux conflits sociaux auxquels ont été confrontés les « petits » hôpitaux ces dernières années, Emmanuel Macron a promis de ne pas les fermer. Une nouvelle répartition des établissements sera néanmoins mise en place : soins de proximité, soins spécialisés et soins ultraspécialisés, au sein des groupements hospitaliers de territoire (GHT) créés par la loi Touraine, ceux-ci devant s’ouvrir au secteur privé.

Néanmoins, si aucun hôpital de proximité ne devrait fermer, des activités devront, elles, l’être à certains endroits, par exemple quand des plateaux techniques sous-utilisés « deviennent dangereux » ou que « l’absence d’un médecin qualifié ne permet pas de sécuriser » le fonctionnement d’un service. Les plus petits établissements seront ainsi « réorientés sur des priorités » comme la gériatrie, la rééducation, l’imagerie, la biologie ou la télémédecine.

Le Président de la République a aussi évoqué, pêle-mêle la question du « nécessaire » virage numérique, la création éventuelle d’un numéro unique de la permanence des soins (point qui sera tranché d’ici la fin de l’année) et la place plus importante qui doit être laissée aux médecins dans la gestion des hôpitaux (il a même imaginé que des PU-PH puissent devenir directeurs d’hôpital…).

Enfin, pour financer ces grands chantiers, le chef de l’État s’est engagé à un desserrement de l’objectif national de dépenses d’assurance-maladie (Ondam) de 0,2 point, le portant ainsi à 2,5 % en 2019, soit 400 millions d’euros supplémentaires, une somme qui sera ensuite reconduite jusqu’à la fin du quinquennat, soit 1,6 milliard d’euros.

Frédéric Haroche