Covid-19 (Coronavirus-2019nCoV) et crise sanitaire

Le Monde.fr : Au collège ou au lycée, « on se sent oubliés » face à l’épidémie de Covid-19

Novembre 2020, par infosecusanté

Le Monde.fr : Au collège ou au lycée, « on se sent oubliés » face à l’épidémie de Covid-19

Depuis la fin des vacances de la Toussaint, la grogne monte chez les lycéens et collégiens, qui ont parfois manifesté devant leurs établissements pour dénoncer le protocole sanitaire. Témoignages.

Par Thémis Laporte Publié

le 16/11/2020

#Balancetonprotocole : au retour des vacances de la Toussaint, lundi 2 novembre, ce hashtag avait inondé les réseaux sociaux. Les photographies de réfectoires et de couloirs bondés contrastaient avec le « protocole sanitaire renforcé » annoncé par le gouvernement pour que les écoles, collèges et lycées restent ouverts.

Chaque établissement a dû s’organiser afin de limiter le mélange des élèves et d’assurer le respect des gestes barrières. Le 5 novembre, quatre jours après la reprise des cours, Le Monde lançait un appel à témoignages sur sa chaîne Snapchat pour savoir si les lycéens étaient rassurés ou non par les mesures prises dans leur établissement. Et le résultat est unanime. Voici leurs retours sur cette rentrée jugée compliquée.

Un protocole jugé insuffisant
« Il y a du produit désinfectant à l’entrée des classes, de la ventilation avec la fenêtre et le port du masque est obligatoire. Mais c’est tout », témoigne Alistair, en terminale à La Rochelle. Nicolas, lui, est « incapable de citer une seule nouvelle mesure » prise dans son lycée, en banlieue sud de Paris.

Certains égrènent de nouvelles règles : pas de changement de salle de classe entre deux cours, des récréations séparées par niveau, des championnats de sport annulés, des cours sur des sites séparés quand les bâtiments le permettent, des professeurs plus vigilants… Mais tous jugent ces mesures – quand mesures il y a – très insuffisantes.

« On se sent oubliés », « on n’est pas rassurés », « personne ne se sent en sécurité », confient-ils au Monde. Auriane, lycéenne à Toulouse, pointe le manque de suivi des élèves malades du Covid-19 ou cas contacts. C’est simple, « la reprise des cours est catastrophique », résume, de son côté, Gabriel, lycéen à Nyons.

Cantines et couloirs bondés
Après la Toussaint, beaucoup d’élèves se sont alarmés du nombre de personnes par salle. Le gouvernement voulait éviter les échecs du premier confinement et craignait le décrochage scolaire. Pourtant, selon les lycéens et collégiens qui ont témoigné auprès du Monde, il serait le plus souvent impossible, en effectif complet, de respecter un mètre de distance.

« Dans ma classe, nous sommes quarante-quatre. Une seule mesure a été mise en place : enlever des tables pour créer des séparations, explique Jeanne, en classe préparatoire dans un lycée parisien. Certains élèves se sont trouvés dépourvus de table et de chaise. C’est totalement hallucinant. Les politiques doivent penser que nous sommes une vingtaine par salle. »

De l’avis de tous, la cantine est le lieu le plus propice à la contamination. Les superlatifs fusent : « C’est l’endroit le plus dangereux », juge Paul, lycéen de Valognes, dans la Manche. Le port du masque est évidemment impossible. Il n’y a « aucune distanciation » dans la file d’attente du self et « les élèves se collent » dans ces espaces clos, parfois en sous-capacité d’accueil. « L’heure de pointe à la cantine est scandaleuse. On est serrés comme pas possible, on laisse les gestes barrières à l’entrée », renchérit John, en hypokhâgne dans un lycée à Toulon.

Même problème en cours d’EPS. « On fait de l’athlétisme, donc on court en troupeau sans masque », explique Bryan, à Villepreux, dans les Yvelines. Un autre lycéen renchérit : « Le cours de musculation, c’est un cluster à lui tout seul. »

Des consignes plus ou moins bien respectées
« Le masque est vu comme une mesure miracle », ironise Louis, pour expliquer le non-respect de la distanciation physique dans son établissement. Obligatoire à partir du CP, en classe comme dans les couloirs, ce bout de tissu est parfois difficile à garder sur le nez.

« Heureusement, tout le monde respecte les consignes », apprécie une élève de terminale. Dans son lycée, trois jeunes ont été atteints par le Covid-19 depuis la rentrée. Avec la deuxième vague de l’épidémie, certains observent « un changement des mentalités », quand d’autres s’indignent : beaucoup de leurs camarades refusent encore de porter le masque. « Avec l’annonce du confinement pendant les vacances, j’ai eu comme un déclic, la peur de mars qui revenait. Je pensais que ce serait pareil pour les autres, absolument pas… Rien n’a changé, c’est dans la nature des jeunes d’être inconscients », assène ainsi Nicolas, lycéen.

Continuer à aller en cours, mais en demi-groupes
En colère, les jeunes interrogés continuent pourtant de vouloir se rendre au lycée. « Nous sommes tous d’accord pour dire que c’est une chance d’avoir des cours en présentiel », assure Auriane. « Le but n’est pas de retourner aux cours à distance », lit-on dans un autre témoignage. C’est qu’ils ne gardent pas un bon souvenir du premier confinement et ils formulent souvent des propositions pour que leur établissement reste ouvert. « La fermeture totale n’est pas une solution. Certains cours devaient être faits en demi-groupes et distanciés », pense Mana, à Noyon.

Ces doléances semblent être parvenues aux oreilles de Jean-Michel Blanquer. Dans une lettre adressée aux chefs d’établissements jeudi 5 novembre, le ministre de l’éducation nationale a acté la possibilité (et non l’obligation) pour les lycées d’avoir moins de cours en présentiel. Contestation oblige, il est donc revenu sur le principe du « tous en classe ».

Afin de limiter les risques de contagion, chaque lycée doit établir « un plan de continuité pédagogique » mis en œuvre jusqu’aux vacances de Noël, « qui garantisse au moins 50 % d’enseignement en présentiel pour chaque élève ». Cette mesure ne concerne cependant pas les collèges, au grand dam des premiers concernés.