Covid-19 (Coronavirus-2019nCoV) et crise sanitaire

Le Monde.fr : Covid-19 : le déconfinement en quatre étapes sous conditions d’Emmanuel Macron

Avril 2021, par infosecusanté

Le Monde.fr : Covid-19 : le déconfinement en quatre étapes sous conditions d’Emmanuel Macron

Le président de la République a annoncé, jeudi, un calendrier de levée des restrictions s’étalant du 3 mai au 30 juin. Après cette période, il entend ouvrir une « grande concertation » destinée à « tourner la page de ce moment de la vie de la nation ».

Par Olivier Faye

Publié le 29/04/2021

Il faut toujours regarder les astérisques au bas des contrats. En annonçant son calendrier de déconfinement dans un entretien accordé à l’ensemble de la presse régionale, jeudi 29 avril, Emmanuel Macron a pris soin de placer sous condition la réouverture progressive de la France.

Certes, les paliers successifs de décompression décrits par le chef de l’Etat – le 3 mai, le 19 mai, le 9 juin et le 30 juin – concernent en théorie l’ensemble du pays. Mais l’expérience de plus d’un an de crise du Covid-19 a conduit l’exécutif à faire l’apprentissage de la prudence. Une attitude renforcée par les conditions dans lesquelles débute ce troisième déconfinement, avec encore près de 26 000 nouveaux cas par jour et 5 804 patients hospitalisés dans les services de réanimation.

« Est-ce que je peux vous dire, les yeux dans les yeux, qu’on ne sera plus jamais débordés par ce virus ? C’est impossible, convient Emmanuel Macron, tout en assumant le fait de redonner de la liberté au pays. Dans l’humain, il n’y a pas que la gestion sanitaire, mais aussi tout ce qui fait la vie des femmes et des hommes. La vie de la nation ne se réduit pas à l’évolution des courbes. » Plusieurs garde-fous sont néanmoins placés sur la route de l’été, que le locataire de l’Elysée espère dégagée, afin de pouvoir, ensuite, se projeter vers la campagne présidentielle de 2022.

Astérisque présidentiel
La première salve de changements survient donc le 3 mai, avec la levée des restrictions de circulation, que ce soit autour de chez soi ou entre les régions. Collèges et lycées pourront accueillir comme prévu la moitié de leurs élèves simultanément.

Mais il faudra attendre mercredi 19 mai pour opérer le virage le plus marquant. A cette date, le couvre-feu sera décalé à 21 heures. Les terrasses des cafés et des restaurants pourront rouvrir, avec six personnes par table au maximum. Il en ira de même pour les commerces, les établissements culturels – musées, cinémas, théâtres, salles de spectacle avec public assis, monuments – ou les établissements sportifs. Ces lieux devront néanmoins se soumettre à des jauges et protocoles spécifiques.

« Les mesures seront nationales, mais nous pourrons actionner des freins d’urgence sanitaires dans les territoires où le virus circulerait trop », prévient Emmanuel Macron

Surtout – c’est là où se niche l’astérisque présidentiel –, ces réouvertures seront conditionnées à la situation sanitaire de chaque département. « J’ai bon espoir que la France entière pourra passer à l’étape du 19 mai. Les mesures seront nationales, mais nous pourrons actionner des freins d’urgence sanitaires dans les territoires où le virus circulerait trop », prévient Emmanuel Macron. Une liberté est donc laissée au gouvernement pour éventuellement « bloquer les réouvertures ».

Les critères retenus sont relativement flous : le chef de l’Etat évoque un taux d’incidence départemental dépassant 400 cas pour 100 000 habitants ou « une augmentation très brutale de ce taux et une menace de saturation des services de réanimation ». « Ce n’est pas binaire, il y a plusieurs paramètres, comme la durée de ce taux d’incidence, etc. », explique-t-on dans l’entourage de M. Macron. A l’heure actuelle, huit départements – dont Paris, la Seine-et-Marne et les Bouches-du-Rhône – dépassent ce seuil de 400 cas.

Le recours au passe sanitaire, une innovation
La troisième étape du déconfinement a été fixée au 9 juin. Le couvre-feu doit alors être décalé à 23 heures. Les salles des cafés et des restaurants pourront rouvrir – en se conformant à des jauges –, tout comme les salles de sport. Une innovation majeure est alors censée entrer en application avec le recours au passe sanitaire. « Ce passe, qui sera papier ou numérique, par l’application TousAntiCovid, permettra de montrer qu’on est vacciné ou testé négatif dans les deux jours qui précèdent », a insisté Emmanuel Macron.

Sa présentation sera obligatoire pour pénétrer dans des lieux « où se brassent les foules, comme les stades, festivals, foires ou expositions », a précisé le chef de l’Etat, qui ne veut pas entendre parler de ce document, en revanche, pour les « lieux de la vie de tous les jours ». Les touristes étrangers devront eux aussi présenter ce passe afin de pouvoir entrer en France à compter du 9 juin. Selon un cadre du quai d’Orsay, seuls les Européens seraient concernés à cette date. Et encore, « le champ du passe doit être précisé car le 9 juin le dispositif européen ne sera pas complètement en place », ajoute-t-on de même source.

La dernière étape du déconfinement, enfin, est censée commencer le 30 juin. « Fin du couvre-feu », promet M. Macron, après plus de huit mois de restrictions. Les jauges dans les établissements recevant du public seront abolies, même si le gouvernement compte sur le maintien des gestes barrières. La participation à tout événement rassemblant plus de 1 000 personnes, en intérieur ou en extérieur, sera de nouveau autorisée sur présentation du passe sanitaire. De quoi retrouver un air de vie d’avant.

L’exécutif mise sur la vaccination
Pour accomplir ce pari – même si Emmanuel Macron récuse le terme –, l’exécutif mise sur la vaccination. « La grande différence avec le mois d’octobre, c’est qu’aujourd’hui, nous avons un vaccin qui donne une perspective de sortie durable de la crise », estime le président de la République. Ce dernier a annoncé que la campagne de vaccination serait ouverte à partir du 1er mai à l’ensemble des personnes majeures souffrant d’obésité, ce qui représente un total de 2,3 millions de personnes. « Nous avons des doses en stock », assure M. Macron.

L’heure est venue, aux yeux du président de la République, d’insuffler un vent d’optimisme

Pas question, pour autant, d’offrir dès maintenant la possibilité à toute la population française de se faire vacciner. Et ce, malgré les images de vaccinodromes en partie vides. « On peut optimiser le fonctionnement de nos 1 700 centres de vaccination. On va continuer à prioriser par âge, parce que c’est le plus efficace. La vaccination des plus vulnérables fait baisser la pression sur les services hospitaliers », affirme le chef de l’Etat.

Selon un participant du dernier conseil de défense sanitaire, seulement 30 centres de vaccination auraient « plus de cent rendez-vous disponibles à court terme ». La même source assure que la perspective d’une ouverture de la vaccination en population générale continue de se situer autour de la mi-juin, contre le 1er juin en Allemagne.

« Grande concertation »
Sur le plan économique, enfin, les dispositifs d’aides seront prolongés en mai avant de commencer à s’éteindre peu à peu « à partir du 1er juin », a annoncé M. Macron. « L’accompagnement se fera au prorata de la reprise d’activité. On aura une réponse adaptée par secteur. Ce sera du cousu main », assure-t-il.

Cette période doit représenter pour M. Macron l’occasion de commencer à se projeter sur la prochaine élection présidentielle à travers une « grande concertation » destinée à « tourner la page de ce moment de la vie de la nation ». « Dès le début du mois de juin, grâce au retour à une vie aussi normale que possible, je veux reprendre mon bâton de pèlerin et aller dans les territoires pour prendre le pouls du pays », annonce le chef de l’Etat, qui entend, « en lien avec les maires et forces vives de la nation, inventer un deuxième temps de la relance » économique du pays. Celle-ci ne passera pas par une taxation des plus riches – « tant que je serai là, il n’y aura pas de hausses d’impôts en sortie de crise » – ni par une augmentation du volume du plan de relance.

L’heure est néanmoins venue, aux yeux du président de la République, d’insuffler un vent d’optimisme. « Nous avons une nouvelle décennie française à bâtir, qui sera la décennie de notre jeunesse », veut croire M. Macron. Une promesse à laquelle l’épidémie de Covid-19 risque encore d’imposer quelques astérisques en bas du contrat.