Covid-19 (Coronavirus-2019nCoV) et crise sanitaire

Libération - Covid : « Nous ne sommes toujours pas sortis d’affaire »

Janvier 2021, par Info santé sécu social

Par Charlotte Chaffanjon — 7 janvier 2021

Pointant une situation sanitaire toujours fragile, le Premier ministre a annoncé jeudi que toutes les activités à l’arrêt le resteront, et que le couvre-feu à 18 heures pourrait être étendu à une dizaine de nouveaux départements. Il a confirmé « l’accélération » de la vaccination, accessible pour les plus de 75 ans à partir du 18janvier.

« Vous n’avez jamais été un homme de gestion mais un homme de mission. C’est simple, là où c’est facile, on ne vous trouve pas. » Avec ces mots, Emmanuel Macron a décoré mercredi Jean Castex de la grand-croix de l’Ordre national du mérite, comme le veut la tradition au bout de six mois à Matignon, selon des propos rapportés jeudi par l’Express. Une cérémonie qui a eu lieu la veille d’une première conférence de presse périlleuse pour le Premier ministre qui devait faire le point sur l’épidémie de Covid-19.

Les paroles du Président ont sans doute résonné dans la tête du Premier ministre au moment où il s’est présenté jeudi soir devant les caméras. Loin d’être facile, sa mission semble impossible, puisqu’il s’agit d’expliquer aux Français qu’après dix mois de crise sanitaire, il faut avoir de « l’espérance » même si le virus circule toujours, avec 15 000 cas quotidiens, soit trois fois plus que les 5 000 cas par jour, seuil fixé par l’exécutif pour maîtriser l’épidémie. « Il est hors de question de désarmer notre système hospitalier », a souligné d’emblée Castex au côté de son ministre de la Santé, Olivier Véran. Avec 2 500 admissions à l’hôpital par jour et une personne toutes les sept minutes admise en réanimation, un lit sur deux est occupé par un patient Covid-19.

Il faut donc « garder espoir », selon Castex, même si le pays est sous la menace d’un variant extrêmement contagieux - 40 à 70 % de plus que l’actuelle souche, d’après Véran - circulant massivement au Royaume-Uni et en Afrique du Sud. Deux clusters ont déjà été repérés en France, en région parisienne et en Bretagne. « Nous ne sommes toujours pas sortis d’affaire, a euphémisé Castex. La situation sanitaire dans notre pays n’est pas revenue à la normale. Elle est même devenue plus fragile ces dernières semaines [puisque] le niveau des contaminations reste élevé. Il a même tendance à progresser depuis la mi-décembre. »

« Accompagnements »
Sans surprise, le locataire de Matignon a confirmé que « toutes les activités qui sont fermées le resteront ». Les restaurants, bars, établissements culturels ou stations de ski « ne connaîtront […] dans les semaines qui viennent aucun assouplissement ». Le 20 janvier n’est plus une date de « réouverture », mais celle d’une énième « clause de revoyure » pour décider si ces activités pourront reprendre ou non à partir du début ou de mi-février en fonction des secteurs. Castex a assuré que « tous les dispositifs d’aides » sont maintenus et que les ministres concernés sont chargés de rencontrer les acteurs des secteurs affectés pour décider s’il y a « d’éventuels besoins d’accompagnements complémentaires ».

Un remake du remake d’un jour sans fin ? Au vu de la situation, et alors que l’Europe se claquemure - écoles fermées en Allemagne, confinement au Royaume-Uni, aux Pays-Bas, sévères restrictions de déplacements en Italie… - le chef du gouvernement n’exclut pas des mesures plus contraignantes « dans les jours qui viennent » : « Je souhaite évidemment l’éviter mais nous devrons réagir vite si nous faisons le constat d’une accélération du virus. » Un message qui va dans le sens de celui du président du Conseil scientifique, le Pr Jean-François Delfraissy, qui a évoqué mercredi soir sur France 2 la possibilité de « discuter de mesures plus lourdes en milieu de semaine prochaine ». Une fois que les autorités sanitaires auront connaissance des conséquences des fêtes de fin d’année.

Suite logique : le couvre-feu à 20 heures est donc maintenu. Dans les 15 départements où ce dernier a déjà été avancé à 18 heures, il le reste. Dix départements situés dans l’est de la France, où « la situation se dégrade », précise Castex, sont désormais sous surveillance et sous la menace d’un couvre-feu deux heures plus tôt. Après « concertation » avec les élus locaux, une décision sera prise vendredi soir pour une mise en œuvre à partir de dimanche.

Mais il faut « garder espoir », donc. « 2021 sera l’année de l’espérance grâce à la campagne de vaccination », a même tenté Castex. Véran a déjà dévoilé une très grande partie de la nouvelle stratégie en début de semaine, résumée par le triptyque « accélérer, amplifier et simplifier ». Jeudi soir, il s’agissait de confirmer ce nouveau mot d’ordre en refusant de parler de « modifier la stratégie », mais de « simplifier la mise en œuvre et d’avancer » la deuxième phase. Tous les Français de plus de 75 ans pourront ainsi se faire vacciner à partir du 18 janvier. « Tous ceux qui le souhaitent », a souligné Castex, pourront recevoir une injection. « Nous devons gagner du temps et aller plus vite », a résumé le Premier ministre.

« Une question psychologique »
Côté chiffres, Véran a annoncé que la France avait précommandé 200 millions de vaccins, livrés d’ici la fin 2021. Au rayon organisationnel, alors que la France a été très critiquée pour sa lenteur dans les premiers jours de la campagne vaccinale, le ministre de la Santé a précisé que les préfets de départements « seront les patrons de la logistique ». « Ce n’est pas qu’une question logistique, […] mais aussi une question psychologique, a insisté Castex pour justifier le rythme français de diffusion du vaccin. Nous ne devons pas confondre vitesse et précipitation. » Un Premier ministre de « mission ». Egalement sous pression.

Charlotte Chaffanjon