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Le Monde.fr : « Désengorger » les urgences d’ici à fin 2024 : les médecins « attendent de voir » comment sera déclinée la promesse

Avril 2023, par infosecusanté

Le Monde.fr : « Désengorger » les urgences d’ici à fin 2024 : les médecins « attendent de voir » comment sera déclinée la promesse

L’objectif avancé par Emmanuel Macron, lundi, a suscité de premières réactions contrastées, alors que ces services hospitaliers traversent une crise depuis plusieurs années.

Par Mattea Battaglia et Camille Stromboni

Publié le 17/04/2023

Certains saluent l’affichage d’une date butoir ; d’autres y voient un aveu d’impuissance. Parmi les urgentistes, lundi 17 avril au soir, l’objectif que s’est fixé Emmanuel Macron, dans son allocution à la suite de la promulgation de la réforme des retraites, d’avoir « désengorgé » tous les services d’urgences « d’ici à la fin de l’année prochaine » – autrement dit, d’ici à décembre 2024 – a suscité de premières réactions contrastées, alors qu’un peu partout sur le territoire, de Bordeaux à Metz, en passant par Grenoble, les tensions ne cessent de se faire sentir dans ces services en première ligne à l’hôpital.

« Comment voulez-vous parvenir à changer trente ans de casse du service public en vingt mois, sans changer de politique ? », a réagi, sceptique, Patrick Pelloux, de l’Association des médecins urgentistes de France.

Les services d’urgences se trouvent au cœur des difficultés que rencontre l’hôpital depuis des années. C’est de là qu’est parti, en 2019, un mouvement inédit de mobilisation des soignants pour dénoncer les conditions de travail et la mise en danger des patients, que seule la crise sanitaire du Covid-19 a interrompu. A l’époque déjà, un « pacte de refondation » était enclenché par Agnès Buzyn, l’ancienne ministre de la santé, pour tenter d’y répondre.

« Une descente aux enfers »
Trois ans plus tard, c’est encore sur fond de crise aux urgences que François Braun est nommé au ministère de la santé, en juillet 2022. Le premier chantier de l’urgentiste de profession consiste à mettre en œuvre les mesures d’une « mission flash » qu’il a lui-même dirigée, quelques mois plus tôt, pour traverser la période estivale qui a vu s’envoler le nombre de services fermés. Entre autres solutions, le ministre défend la régulation à l’entrée des urgences par le biais des appels au SAMU et la revalorisation du travail de nuit. Des mesures annoncées comme provisoires, qui ont été prolongées depuis.

Sans que cela change véritablement la donne pour l’instant. « Nous avons l’impression d’une descente aux enfers, dans l’indifférence, rapporte le président du syndicat SAMU-Urgences de France, Marc Noizet. Les patients s’empilent dans nos services dans tous les hôpitaux désormais, les fermetures continuent, la situation se dégrade à vitesse grand V, les urgentistes partent, les infirmières aussi… »

Au recensement des brancards stagnant dans les couloirs effectué par son syndicat (le #nobedchallenge) a succédé celui des décès « inattendus » – faute d’une prise en charge correcte. Depuis le 3 avril, l’entrée en vigueur du plafonnement des tarifs de l’intérim médical n’a pas manqué d’ajouter une pression supplémentaire sur des ressources humaines déjà en souffrance.

Marc Noizet salue néanmoins le fait que le chef de l’Etat se soit saisi du sujet « comme une priorité », même s’il reste « circonspect », « attend[ant] de voir comment cela sera décliné ». Les urgences concentrent en effet les problématiques de l’ensemble du système de santé, entre la « ville » et ses déserts médicaux d’une part, avec des patients qui viennent aux urgences faute d’alternative, et l’hôpital d’autre part, dont les lits manquent pour accueillir les patients examinés aux urgences et qui ont besoin d’être hospitalisés.

« Au boulot, François Braun ! », a tweeté, dans la foulée de l’allocution présidentielle, l’urgentiste Mathias Wargon, auteur du livre Hôpital : un chef-d’œuvre en péril (Fayard, 2022). La « feuille de route » esquissée par le chef de l’Etat, lundi soir, doit être détaillée par la première ministre, Elisabeth Borne, « la semaine prochaine ». Aucun remaniement n’est prévu dans l’immédiat.

« Notre système de santé sera profondément rebâti », a de nouveau assuré le président de la République lors de cette intervention télévisée, rappelant son engagement pris à plus brève échéance : « D’ici à la fin de cette année, 600 000 patients atteints de maladie chronique, qui n’ont pas de médecin traitant, en disposeront. »

Mattea Battaglia et Camille Stromboni