Branche maladie de la sécurité sociale

Les Echos.fr : Un nouveau cadre proposé pour l’innovation en santé

Juin 2017, par infosecusanté

Un nouveau cadre proposé pour l’innovation en santé

Solveig Godeluck| / Journaliste

Le 30/06

Un fonds pourrait être créé pour financer de nouvelles organisations en santé, dont un forfait de chirurgie réhospitalisation incluse.

Dans son rapport annuel, la Caisse nationale d’assurance-maladie (CNAM) ne propose pas que des économies. Encouragée par le discours présidentiel favorable à l’innovation en santé, elle expose une nouvelle approche et un cadre juridique pour sortir de l’actuelle organisation en silos du système de santé. Cette dernière est la cause de multiples difficultés : l’hôpital vit dans une bulle ; les soins ne sont pas assez coordonnés ; la télémédecine ne décolle pas ; la qualité n’est pas récompensée. Mais il est impossible d’avancer sans financement ad hoc et dans le cadre juridique actuel, où chaque projet nécessite une loi et des autorisations administratives en cascade.

D’où l’idée de la CNAM de créer un fonds dédié à l’innovation « organisationnelle », qui financerait des expérimentations à grande échelle. Idéalement doté d’au moins 1 milliard d’euros, il prendrait en charge la rémunération des professionnels impliqués dans de nouveaux circuits de soins. Et cela pendant quelques années, en attendant que ces circuits deviennent la norme ou s’éteignent. Doté d’une gouvernance partenariale, ce fonds donnerait un feu vert aux expérimentations sans passer par le législateur et en ouvrant un maximum de portes. Il fournirait une plate-forme d’appui aux innovateurs. Les expériences seraient évaluées, avec des publications scientifiques à la clef. Parmi les projets éligibles, la CNAM cite le maintien à domicile grâce aux objets connectés, la mise en réseau des acteurs sanitaires et sociaux, de nouveaux modes d’organisation des soins de ville. Surtout, elle souhaite instaurer dès 2018, dans 3 ou 4 régions et pour deux ou trois ans, un paiement forfaitaire en chirurgie, incluant le coût des éventuelles réhospitalisations. Ce mode de financement dit « à l’épisode de soins », déjà pratiqué aux Etats-Unis ou en Suède, est inconnu sous nos cieux. Il s’agit en quelque sorte d’une garantie médicale, assortie d’un service après-vente. Ce serait la première fois en France que la non-qualité - liée par exemple à des infections contractées sur le site opératoire - serait pénalisée via la tarification de l’activité. Ce projet, de même que le fonds, devraient figurer dans le projet de budget 2018 de la Sécurité sociale.

La CNAM compte tester le nouveau forfait pour la chirurgie de la hanche. Les complications et les reprises ne sont pas très fréquentes, mais elles coûtent cher (8.365 euros en moyenne pour une reprise). Les pratiques sont variables, avec un taux de reprise très élevé dans le Sud et dans les Hauts-de-France. Le forfait incluant reprises et complications serait tarifé entre 218 et 623 euros supplémentaires par rapport au forfait actuel, en fonction de l’âge et de la sévérité. Une simulation d’après les chiffres de 2013 montre que les 465 établissements les plus performants gagneraient 19.000 euros par an, et les 338 en fin de classement perdraient 26.000 euros. L’objectif dans un premier temps ne serait pas de faire des économies, juste d’inciter à la qualité. Mais les gains de productivité seraient ultérieurement redistribués. En se basant sur la diminution de 26 % du taux de reprise observé en Suède suite à la création d’un forfait comparable, la CNAM estime ce gain à 9 millions pour la seule chirurgie de la hanche, dont 3 millions pourraient être reversés aux établissements.

S. G., Les Echos