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Lequotidiendumedecin.fr : Budget de la Sécu 2019 : les députés entament l’examen en séance, ce qu’il faut retenir

Octobre 2018, par infosecusanté

Budget de la Sécu 2019 : les députés entament l’examen en séance, ce qu’il faut retenir

Anne Bayle-Iniguez

| 23.10.2018

Les députés entament ce mardi en séance publique l’examen en première lecture du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2019.
Conformément aux annonces d’Emmanuel Macron, l’objectif national de dépenses d’assurance-maladie général (ONDAM, soit 200,3 milliards d’euros) a été relevé de 2,3 à 2,5 %, soit 400 millions d’euros supplémentaires l’an prochain pour investir dans le système de santé. Les soins de ville ont hérité d’un sous-objectif de +2,5 % (91,5 milliards), mieux que l’hôpital (+2,4 %).
Après un passage turbo en commission des Affaires sociales et l’adoption d’une première salve de 55 amendements, les élus vont plancher toute cette semaine sur les 58 articles du texte, lestés de 1 540 nouveaux amendements. Focus sur les points forts.
• Le forfait de réorientation des urgences, épouvantail de la ville
Cette initiative parlementaire du rapporteur général Olivier Véran (LREM) a provoqué une levée de boucliers. Les libéraux se sentent floués, les cliniques fulminent. Soutenu par Agnès Buzyn, le député neurologue de Grenoble a reconnu ce mardi, lors d’une rencontre organisée par l’AJIS*, que cette idée « du terrain, iconoclaste mais pas loufoque » sera un « point chaud » des débats. Il propose de rémunérer directement les services d’urgences qui décident de ne pas prendre en charge un patient léger, en lui organisant un rendez-vous en médecine de ville ou en consultation hospitalière, dans un service dédié. Le paiement : 20 à 60 euros par patient réorienté. Le Dr Véran juge que les services d’urgences pourraient être chaque année délestés de six millions de patients « légers » (sur 23 millions au total). « Nous sommes l’un des rares pays au monde à financer les urgences à l’activité alors que c’est contre-intuitif ! », argumente le rapporteur.
• Vers la prescription (encadrée) de médicaments par les pharmaciens
C’est l’autre mesure controversée de ce budget, adoptée en commission, à l’initiative de députés LREM. Dans deux régions à définir, les pharmacies d’officine pourraient expérimenter pendant trois ans à partir du 1er janvier 2019 la dispensation directe de certains médicaments à prescription médicale obligatoire, « dans le cadre d’un protocole médical et de coopération conclu avec le médecin traitant et les communautés de santé des structures d’exercice coordonnées ». En commission, le Dr Véran a soutenu une idée « intéressante » et a suggéré au gouvernement de « retravailler » le sujet « pour être sûr que la proposition d’expérimentation entre dans tous les cadres nécessaires ». Des amendements sont à prévoir.
Un nouvel amendement porté par la majorité propose d’ouvrir aux pharmaciens la possibilité « de renouveler des traitements chroniques ou d’ajuster leur posologie » « avec l’accord du médecin traitant », dans un cadre expérimental. Une mesure jugée « pas mauvaise » par le rapporteur Véran, mais qui nécessite selon lui l’ouverture de négociations interprofessionnelles conventionnelles.
Un autre amendement (de la droite cette fois) suggère que certains vaccins à prescription médicale obligatoire dont la liste est fixée par arrêté soient dispensés par le pharmacien.
• Génériques : adieu le « NS » obligatoire à la main, place au référentiel…
Pour renforcer le recours aux génériques, le gouvernement a décidé de supprimer l’obligation de mention manuscrite systématique « non substituable » (qui empêche la substitution), ligne par ligne. L’ANSM doit établir, en lien avec la profession, une liste de cas et de critères types (intolérances, allergies) justifiant médicalement la mention NS. Ces référentiels seront intégrés aux logiciels d’aide à la prescription. Cette mesure se doublera d’un malus pour le patient, qui sera moins bien remboursé s’il refuse la substitution générique sans justification médicale. La commission des Affaires sociales a rejeté tous les amendements de l’opposition, qui devrait remonter au créneau.
• Déremboursement de l’homéopathie, la voie royale
Cet été, Agnès Buzyn a réclamé une évaluation à la Haute Autorité de santé (HAS) sur l’efficacité de l’homéopathie et le bien-fondé de son remboursement. En attendant les conclusions de cette instance (début 2019), un article du projet de loi prévoit le cadre du déremboursement par décret. En outre, un amendement du Dr Véran a précisé en commission le périmètre de cette réévaluation de l’homéopathie par la HAS, afin de simplifier la procédure d’un éventuel déremboursement. L’opposition (LR, UDI) a réclamé en vain du temps pour éviter un déremboursement « total », « précipité et mal évalué » des médicaments homéopathiques. Ces amendements devraient refaire surface dans l’Hémicycle.
• Chirurgie du cancer : actes techniques non autorisés, hôpitaux pénalisés
Le rapporteur général a ouvert la discussion sur le remboursement des actes et séjours médicaux et chirurgicaux soumis à seuil d’activité, par un amendement adopté en commission. Désormais, ce remboursement « serait directement lié à l’autorisation d’activité, sauf cas d’urgence et découverte fortuite. En cas de facturation de ce type de séjours par des établissements non autorisés à pratiquer ces activités, ceux-ci se verront dans l’obligation de rembourser les sommes indûment perçues à l’assurance-maladie ». « Cet amendement ne vise en aucun cas à dérembourser le patient, qui n’y est pour rien et qui n’a de surcroît aucun moyen de savoir si l’équipe qui va l’opérer est autorisée à le faire – il arrive que celle-ci ne le sache pas non plus », précise le Dr Véran, évoquant le soutien de l’INCa, de la direction générale de l’offre de soins (DGOS, ministère), de l’assurance-maladie et de la Ligue contre le cancer à sa démarche. Les débats en séance devraient préciser la nature des actes et séjours concernés.
• Tiers payant généralisé, conventionnement sélectif et autres arlésiennes…
En commission, tous les amendements autoritaires des groupes d’opposition sur le retour du tiers payant généralisé obligatoire, le conventionnement sélectif, la suppression du secteur II ou la participation des fédérations hospitalières aux négociations conventionnelles des médecins libéraux sont passés à la trappe. Ils devraient retenter une percée en Hémicycle, et, sauf surprise, connaître le même sort.
* Association des journalistes de l’information sociale