Partis politique

Mouvement de défense de l’hôpital public - Veillée électorale

Novembre 2016, par Info santé sécu social

Publié le 14 septembre 2016 par André Grimaldi

En cette rentrée de veillée électorale ,il y a de fortes chances que la Santé ne fasse pas partie du pugilat qui s’annonce.

Le débat classique gauche /droite risque de se résumer à la généralisation du tiers payant que la droite veut abolir au nom de la « responsabilisation » du patient amoindrie par cette « pseudo-gratuité » et de la défense de la médecine libérale « menacée de fonctionnarisation », tandis que la gauche de gouvernement soutenue sur ce point par ses « frondeurs » la défendra au nom de la lutte contre les » inégalités sociales de santé grandissantes ». Plutôt que cette généralisation consacrant la place des assurances santé complémentaires, au nombre de 570, dans l’organisation du système de santé, un gouvernement de gauche aurait été bien inspiré de mettre en place avant 2017 le tiers payant uniquement pour la part des remboursements relevant de la Sécurité sociale.

Les deux grands défis de notre système de santé, l’épidémie des maladies chroniques (20 millions de personnes dont 10 en ALD) et les coûts exorbitants à plus de 50 000 euros par an et par personne des médicaments et dispositifs innovants, seront évidemment escamotés, réduits à des voeux pieux sur la coordination des soins et sur la concertation internationale indispensable pour faire face aux exigences des multinationales de l’industrie pharmaceutique dont les profits voisinent ceux de l’industrie du luxe.

Restent 2 questions essentielles :

1) la part des assureurs complémentaires dans le financement et l’organisation du système de santé que d’aucuns à droite et à gauche veulent accroître ( François Hollande s’était engagé à rendre l’assurance privé complémentaire « obligatoire »après le premier pas de l’ANI). Ces assureurs privés veulent bien augmenter leur part de financement du système de santé à condition de pouvoir le réguler. Pour cela, ils proposent la « responsabilisation financière » des patients par un système bonus/malus et la « responsabilisation prescriptive » des médecins grâce à la constitution de réseaux de soins concurrentiels par conventionnement sélectif des praticiens (voir ma tribune ici).

2) le statut de l’hôpital public que François Fillon et Nicolas Sarkozy veulent remettre en cause contrairement à Alain Juppé qui s’engage à le maintenir tout en permettant aux cliniques privées de participer au Service public hospitalier si elles en respectent les conditions.

La gauche a restauré le mot mais pas le contenu . Cela supposait la remise en cause de la T2A comme principe de financement en la réduisant à sa place de technique de financement : la T2A est adaptée aux activités programmées, standardisées, connaissant peu de variabilité.

Ce qui fait fondamentalement la différence entre le Service public et les établissements privés ,à but lucratif ou non, c’est que l’un doit appliquer le juste soin pour le patient au moindre coût pour la société c’est à dire pour la Sécurité sociale alors que l’autre doit appliquer le juste soin à un coût rentable pour l’établissement , d’où la sélection des activités par les établissements privés. C’est pourquoi les relations entre le public et le privé devraient relever de la complémentarité et non de la concurrence.

Face à l’épidémie de maladies chroniques dont les traitements évoluent plus rapidement que les tarifs, face à la volonté d’accroître les activités ambulatoires alors que la recherche de la rentabilité pousse les établissements à l’activité, et face aux contraintes de l’ONDAM qui entraînent une baisse des tarifs, la T2A prend l’eau. Même le très libéral Institut Montaigne ( ici) est obligé de reconnaître,après avoir chanté les vertus du » tout T2A »,que « les modalités tarifaires actuelles (tarification à l’activité, paiement à l’acte)…sont notamment un frein à la mise en place de parcours de soins intégrès ». On ne peut pas être à la fois contre « l’hospitalo-centrisme » et pour la T2A !

Dans son dernier livre excellent « Quelle politique de santé pour demain ? », Laurent Degos est plus catégorique « Le verrou central vient de la tarification à l’activité qui accroît l’activité des hôpitaux et encourage à promouvoir une activité de substitution sans en enlever une autre . Elle est le frein à toute mutation.On ne ferme rien et on ajoute l’innovation. Pour reprendre l’exemple déjà cité des centres de lutte contre le cancer, face à la mutation de l’activité par la chirurgie ambulatoire et les traitements donnés par voie orale, les centres ont trouvé des contournements pour garder des lits…. »

Les « addicts » de la T2A veulent donc la modifier en la complexifiant un peu plus pour y introduire des critères de qualité (revoilà le système des bonus/malus). Laurent Degos apporte la réponse » La dispendieuse expérience britannique, qui avait sélectionné plus de cent critères pour distribuer une prime à la performance aux médecins généralistes, n’a eu d’incidence ni sur la mortalité ni sur la morbidité de la population…. Aux Etats Unis,des assurances maladie ont proposé de payer les hôpitaux à la « performance » : elles n’ont obtenu aucun effet sur le résultat clinique ».

Le risque en effet est de voir les médecins et les établissements soignés les indicateurs plus que les patients comme l’a montré l’indexe ICALIN pour les infections nosocomiales « Ceratins se sont émus de voir un établissement côté D (= grand risque) se retrouver 3 mois plyus tard côté A. L’indicateur n’exprime pas le nombre réel d’infections survenues mais les moyens mis à disposition( comité, déclarations, emploi d’un cadre de santé dédié,volume d’ utilisation de solution hydroalcoolique …) »

L’idée qu’internet et les objets connectés vont révolutionner le système de santé est à la mode . Le patient disposant d’un GPS santé deviendra un » consommateur éclairé » choisissant son prestataire, le médecin technicien utilisant l’intelligence articielle le soignera à distance et son financeur le poussera à la bonne observance grâce à des ristournes…

Mais voilà, le patient est une personne angoissée, vivant dans le réel et dans la représentation du réel . Sa relation avec le médecin repose sur la confiance dont celui-ci a prêté serment de ne pas abuser. Bien venu au GPS et aux plateformes santé, à la condition qu’ils soient intégrés à l’éducation thérapeutique et qu’ils servent au pilotage du patient par son médecin traitant !

André Grimaldi