Les professionnels de santé

JIM - Ils sont nés les infirmiers de pratique avancée !

Juillet 2018, par Info santé sécu social

Paris, le vendredi 20 juillet 2017 –

Le Journal officiel a publié, hier, deux décrets et trois arrêtés qui entérinent la création des infirmiers de pratique avancée. Rappelons, qu’initialement, c’est l’article 119 de la loi de modernisation du système de santé de janvier 2016 qui a créé le métier d’auxiliaire médical en pratique avancée en France au sein du Code de la santé publique.

Au commencement était la formation
L’ouverture de formations en pratique avancée infirmière interviendra dès la rentrée prochaine. Pour y accéder, il faudra être titulaire d’un diplôme d’État infirmier ou d’une équivalence européenne et pouvoir justifier d’une expérience professionnelle, dans ce domaine, de 3 ans.

Les candidats qui répondent à ces critères pourront alors déposer un dossier auprès d’une des universités qui sera prêt en septembre.*

La formation conduisant au diplôme d’Etat d’infirmier en pratique avancée (DEIPA) est structurée en quatre semestres validés par l’obtention de 120 crédits européens. Le DEIPA confère à son titulaire le grade de master. Les deux premiers semestres de la formation conduisant au DEIPA correspondent à un tronc commun d’enseignement. A l’issue du deuxième semestre, les étudiants choisissent une mention qui fait l’objet d’enseignements spécifiques aux semestres 3 et 4. Des stages seront prévus d’une durée minimale de 2 mois en S2 et 4 mois en S4.

Si ce master sera, bien entendu, très axés sur la clinique il n’en reste pas moins que les futurs infirmiers de pratique avancée bénéficieront également d’enseignements en anglais, éthique et sciences infirmières.

Un mémoire de fin d’études sera demandé avec une soutenance orale devant un jury composé d’enseignants infirmiers et hospitaliers et d’une personne étrangère à la structure. En fonction de leur projet professionnel, ce mémoire sera soit un mémoire bibliographique fondé sur une analyse de la littérature, soit une analyse de pratiques professionnelles, soit un mémoire consistant en une analyse critique, s’appuyant sur l’expérience clinique et s’inscrivant dans un champ théorique déterminé, soit un mémoire de recherche. Dans ce dernier cas, le directeur du mémoire est un enseignant-chercheur ou un chercheur.

Ce diplôme pourra aussi, dans certaines conditions qui restent à préciser, être obtenu par VAE (Validation des acquis de l’expérience).
Des compétences très larges…a
Aux termes de la loi, l’infirmier en pratique avancée « participe à la prise en charge globale des patients dont le suivi lui est confié par un médecin », il « apporte son expertise et participe, en collaboration avec l’ensemble des professionnels concourant à la prise en charge du patient, à l’organisation des parcours entre les soins de premier recours, les médecins spécialistes de premier ou deuxième recours et les établissements et services de santé ou médico-sociaux. »

L’infirmier exerçant en pratique avancée pourra « conduire toute activité d’orientation, d’éducation, de prévention ou de dépistage qu’il juge nécessaire. Effectuer tout acte d’évaluation et de conclusion clinique ou tout acte de surveillance clinique et para-clinique, consistant à adapter le suivi du patient en fonction des résultats des actes techniques ou des examens complémentaires ou de l’environnement global du patient ou reposant sur l’évaluation de l’adhésion et des capacités d’adaptation du patient à son traitement ou sur l’évaluation des risques liés aux traitements médicamenteux et non médicamenteux. Effectuer les actes techniques et demander les actes de suivi et de prévention inscrits sur les listes établies par arrêté du ministre chargé de la santé (…). Prescrire des médicaments (…) des dispositifs médicaux non soumis à prescription médicale obligatoire (…) des examens de biologie médicale dont la liste est établie par arrêté du ministre chargé de la santé(…). Renouveler, en les adaptant si besoin, des prescriptions médicales dont la liste est établie par arrêté du ministre chargé de la santé, après avis de l’Académie nationale de médecine ».
…et en même temps très restreintes !
Si ce champ de compétences peut apparaitre très large il souffrira de deux importantes restrictions.

Premièrement, pour agir, le professionnel exercera sur la base d’un protocole avec le médecin, qui déterminera les patients dont ils souhaitent le suivi par une IPA. En outre ces infirmiers seront tenus de ré-adresser ces patients aux médecins lorsque « les limites de leur champ de compétences seront atteintes ». Plus en détail, ce « protocole d’organisation » définira les contours d’intervention de l’IPA, les périodes où le patient sera revu en consultation médicale et le mode de communication entre les professionnels de santé.

Par ailleurs, tous les patients ne relèveront pas des pratiques avancées infirmières.

Ainsi, les infirmiers de pratique avancée ne pourront suivre que les patients atteints de huit pathologies chroniques stabilisées définies par les textes : accident vasculaire cérébral, artériopathies chroniques, cardiopathie, maladie coronaire, diabète de type 1 et diabète de type 2, insuffisance respiratoire chronique, maladie d’Alzheimer et autres démences, maladie de Parkinson et épilepsie, mais aussi les patients suivis en oncologie et pour une maladie rénale chronique.
Encore quelques points d’achoppement
Certaines questions demeurent en suspens…et en premier lieu celle de la rémunération ! Dans un communiqué commun avec le ministre de l’enseignement supérieur, le ministre de la santé a pour le moment juste promis que « cette nouvelle pratique et ces nouvelles compétences bénéficieront d’une reconnaissance en termes de statut et de rémunération, aussi bien dans le cadre de la fonction publique hospitalière qu’au sein des équipes de soins primaires ».

Pour la CSMF, « il reste à déterminer le modèle économique de ce nouveau métier, en particulier en médecine de ville. En l’absence d’évolution réglementaire et de moyens pour les rémunérer, les infirmiers en pratique avancée exerceront seulement dans les hôpitaux. Il est donc urgent de définir les modalités de financement des IPA en médecine de ville ; sinon, le décret paru aujourd’hui restera sans suite. »

Quant aux organisations infirmières si elles se félicitent de cette avancée, elles regrettent, encore une fois, le manque d’autonomie accordée aux futurs IPA.

Notons que cette avancée majeure pourrait être étendue à d’autres professions paramédicales.

* Aix-Marseille Université, Université Versailles Saint-Quentin, Toulouse, Rennes 1, Université Paris Est Créteil, Nantes, Sorbonne Université, Paris Descartes, Paris Diderot, Rouen, Caen, Dijon, Limoges et Bordeaux.

Frédéric Haroche