Les professionnels de santé

JIM - Plutôt qu’une augmentation des cadences, luttons contre les consultations inutiles : des généralistes lancent une pétition !

Février 2019, par Info santé sécu social

Paris, le mardi 19 février 2019 –

Le financement d’assistants médicaux et la mise en place des Communautés territoriales professionnelles de santé (CTPS) sont les principales mesures sur lesquelles compte le gouvernement pour améliorer l’organisation des soins de ville. Alors que des réserves pourraient être émises sur l’efficacité du traitement, leurs conditions de mise en œuvre pourraient en altérer encore un peu plus la pertinence.

L’Assurance maladie a en effet défini un périmètre très contraint qui pourrait exclure une partie des praticiens de ces nouveaux dispositifs. Réserver ces aides et forfaits aux soignants exerçant en groupe et de manière coordonnée suscite notamment de larges réticences comme l’ont mis en évidence les résultats de notre récent sondage : 74 % des professionnels de santé jugent illogique et regrettable l’absence d’aides aux cabinets unipersonnels dans le cadre de la mise en place des assistants médicaux et des CTPS.

Gains
Déjà échaudés par un cadre peu attractif, les médecins libéraux se sont sentis encore plus irrités quand l’Assurance maladie a paru vouloir chiffrer la progression de la patientèle permise par l’embauche d’un assistant médical. La CNAM a en effet évalué qu’un assistant pour deux praticiens devait permettre de dégager 12 heures de temps : « Gains observés par le médecin : passage de trois à six consultations par heure et par médecin » a-t-elle ainsi pu constater dans un document de travail. Si par cette formulation, l’Assurance maladie a promis qu’elle n’entendait pas fixer d’objectifs chiffrés contraignants, cette façon d’appréhender la situation a suscité l’indignation de l’ensemble des syndicats participant aux négociations, qui ont le sait, ont décidé de les suspendre.

Halte aux actes inutiles
Alors qu’ils devraient demain rencontrer à nouveau les représentants de l’Assurance maladie et insister sans nuance sur leur refus d’un dispositif reposant sur l’augmentation du nombre de consultations, le docteur Jean-Baptiste Blanc, généraliste à Paris a de son côté lancé ce dimanche une pétition intitulée : « Non à l’abattage en médecine générale ». Soutenue par une centaine de praticiens, dont certaines personnalités médiatisées (Dominique Dupagne, Martin Winckler), la pétition a déjà rassemblé 1 942 signatures ce mardi matin (11h). Le texte revendique d’une part la liberté des médecins de « pouvoir recevoir, écouter, informer et soigner les patients qui nous accordent leur confiance, avec le temps nécessaire pour chacune et chacun ».

Mais surtout, cette pétition évoque des pistes différentes pour dégager du temps médical, qui ne passent plus par l’embauche d’assistants mais par une réduction drastique des actes inutiles. Ils citent différentes obligations qui selon eux pourraient être supprimées, ce qui contribuerait à restreindre une activité chronophage et sans guère de valeur médicale. Ils évoquent ainsi le « certificat médical pour l’absence de parents qui gardent leur enfant un jour ou deux » et ce qui pourrait être considéré comme moins évident le « certificat médical d’arrêt de travail pour les arrêts inférieurs à 2 ou 3 jours ». De la même manière, ils estiment que devrait être interdite la demande de certificats par différents organismes sportifs et collectivités d’enfant (cantine, crèche, garderie). Il s’agirait alors de pouvoir justifier différemment l’absence d’un enfant (afin de ne pas s’acquitter du paiement du service non employé) qu’en présentant un justificatif médical, tandis que la vérification de l’aptitude à la pratique sportive pourrait être réalisée différemment (et peut-être de manière un peu plus circonstanciée, par exemple par un médecin associé au club de sport). « Pour un marathon de Paris, ce seraient par exemple 57 000 consultations gagnées » chiffrent les auteurs du texte.

Lutter contre le consumérisme non médical
Ces derniers invitent également à renforcer l’éducation des populations quant à l’inutilité de certaines consultations. Ils plaident pour « des compagnes de communication et d’information régulières pour informer sur les critères permettant d’éviter une consultation pour les pathologies bénignes courantes ». Sur ce point, certains ont également pu prôner un développement de la télémédecine pouvant avantageusement remplacer une consultation "physique" pour de nombreuses infections hivernales. Enfin, les auteurs du texte proposent d’organiser un accès direct à différentes professions paramédicales (kinésithérapeutes, infirmières diplômées d’État, orthophonistes) et concluent : « Nous perdons tous les jours notre temps et notre énergie dans un nombre considérables de consultations inutiles. Faites disparaître ces obligations absurdes. Et nous serons disponibles, dès demain, pour recevoir plus de patients… qui ont besoin de nous ». Chiche !

Aurélie Haroche