Perte d’autonomie, “dépendance”

Les Echos.fr : Dépendance : des hausses de prélèvements proposées pour financer la cinquième branche

Septembre 2020, par infosecusanté

Les Echos.fr : Dépendance : des hausses de prélèvements proposées pour financer la cinquième branche

La nouvelle branche de la Sécurité sociale consacrée à l’autonomie a besoin de 1 milliard d’euros en 2021 et de 3 à 5 milliards d’ici à 2024. Hausses de prélèvements, économies, transferts de ressources : tout est sur la table, selon le rapport remis ce mardi au gouvernement.

Par Solveig Godeluck

Publié le 15 sept. 2020

Et maintenant, place aux calculettes. Après la création cet été d’une cinquième branche de la Sécurité sociale consacrée à la perte d’autonomie , il va falloir trouver 1 milliard d’euros dès 2021 pour la financer. Et puis aussi 3 à 5 milliards pour « tenir » jusqu’en 2024. A cette date, prévoit la loi sur la dette sociale promulguée en août , la Caisse d’amortissement de la dette sociale (Cades) cédera 0,15 point de CSG à la nouvelle branche, soit 2,3 milliards d’euros par an.

L’inspecteur général des Finances Laurent Vachey a remis ce mardi au gouvernement son rapport, avec une longue liste de pistes de financement, dont certaines pourraient se retrouver dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2021. La mission a travaillé sans tabous, envisageant même une hausse des prélèvements obligatoires. Notamment sur les retraités, dont le niveau de vie va s’élever à 110 % de celui des actifs cette année, du fait du maintien des pensions alors que la masse salariale chute.

Ponctionner les retraités
Ainsi, aligner le taux normal de CSG des retraités (8,3 %) sur celui des actifs (9,2 %) permettrait de dégager 780 millions d’euros. Ce calcul inclut une contrepartie pour ces retraités « aisés », déjà un peu malmenés depuis deux ans : la suppression de la cotisation de 1 % applicable sur la retraite complémentaire.

Egalement envisagés, la réduction du plafond de l’abattement de 10 % de l’impôt sur le revenu des retraités, pour récupérer 1,5 milliard d’euros, ou bien l’augmentation de la part de CSG non-déductible dans les pensions, 800 millions d’euros prélevés uniquement sur les plus aisés.

D’autres prélèvements pèseraient sur les actifs et les entreprises. Créer une deuxième journée de solidarité, en doublant la contribution de solidarité pour l’autonomie (CSA), rapporterait 1,9 milliard d’euros nets aux finances publiques (une fois soustrait l’effort supplémentaire de l’employeur public). La suppression des allègements généraux pour les salaires supérieurs à 2,5 SMIC dégagerait 1,1 milliard, mais ne pourrait intervenir en pleine crise économique.

Grands classiques du genre, la taxation des successions et la chasse aux niches sociales, notamment en élargissant l’assiette de la CSA sur celle de la CSG, sont également sur la table.

La Famille et Action Logement dans le viseur
Plutôt que d’accroître les prélèvements obligatoires, il serait en théorie plus indolore de rebrancher la tuyauterie de la sphère sociale, pour déverser dans la dépendance des recettes actuellement affectées à d’autres branches. Par exemple, la branche Famille est « structurellement excédentaire » malgré des difficultés passagères, car les naissances diminuent, et les dépenses indexées sur l’inflation progressent moins vite que les recettes liées à l’activité. Elle pourrait céder 150 millions d’ici à 2024 via le Fonds national d’action sociale.

En revanche, Laurent Vachey écarte l’idée de commencer à prélever la CSG de la Cades par paliers, dès 2021. Evoquée en juin lors des débats parlementaires sur la loi dette sociale, cette piste reviendrait à rallonger d’un trimestre la durée de vie de la Cades, avec à la clef une nouvelle loi organique… En outre, elle « mettrait en cause la crédibilité de la caisse sur les marchés », souligne la mission.

Plutôt que de laisser Action Logement (ex-1 % patronal) investir 1 milliard par an en direct dans l’amélioration du logement des personnes âgées, la mission propose de lui reprendre une fraction de ses recettes. Dans un premier temps, en 2021, on récupérerait les 300 millions de taxe sur les conventions d’assurance qui ont été accordés à l’organisme en janvier. Puis en 2023, on créerait « une contribution autonomie additionnelle de 0,10 % pour les employeurs de plus de 50 salariés », compensée pour les employeurs par une baisse de 400 millions de leur participation au financement d’Action Logement.

L’appel au Fonds de réserve des retraites
Il est aussi envisageable de ponctionner 420 millions par an jusqu’en 2025 sur le fonds de réserve des retraites. Ce n’est pas une ressource pérenne, mais elle permettrait de financer une partie du plan d’investissement « Ségur » de 4,3 milliards d’euros dans le médico-social.

La mission s’est également penchée sur les économies qui pourraient enrichir la branche autonomie. Elles vont faire grincer des dents, puisqu’il s’agit de mieux contrôler l’attribution des allocations handicap (AAH) ou de durcir les critères de l’aide à la dépendance (APA), pour respectivement 400 millions et 300 millions d’économies. La suppression de l’exonération de cotisations patronales pour les employeurs à domicile de plus de 70 ans, écartée l’an dernier, revient également sur la table (180 millions). L’abattement fiscal pour les particuliers employeurs pourrait voir son plafond réduit de moitié à 6.000 euros de salaires versés par an (400 millions).

La balle est dans le camp du gouvernement, qui, jusque-là, a écarté toute hausse des prélèvements obligatoires d’ici à 2022.

Solveig Godeluck