L’hôpital

JIM - Désengorger les urgences d’ici fin 2024 : la nouvelle promesse d’Emmanuel Macron

Avril 2023, par Info santé sécu social

Paris, le mardi 18 avril 2023

Le Président de la République Emmanuel Macron a promis de désengorger les services d’urgences d’ici la fin de l’année prochaine. Les urgentistes sont peu convaincus par cette énième promesse.

Certains (naïfs) espéraient qu’il allait parler de la réforme des retraites, il a préféré évoquer l’avenir. Ce lundi soir, alors que le pays semble englué dans une crise sociale, politique et démocratique, le Président de la République Emmanuel Macron a, dans une intervention télévisée, tenté de fixer un cap pour la suite de son mandat. Finalement, rien de très nouveau, le chef de l’Etat s’étant contenté de rappeler les engagements pris lors de la campagne présidentielle de l’an dernier. Une annonce a tout de même retenu l’attention des professionnels de santé : celle de « désengorger tous les services d’urgence d’ici à la fin de l’année prochaine ».

L’engorgement des urgences est, on le sait, l’un des symptômes de la crise systémique de l’hôpital public. Il a été à l’origine d’un premier mouvement de grève inédit en 2019, qui n’a été interrompu que par la pandémie de Covid-19. Résoudre la crise des urgences a également été la première priorité de François Braun lors de sa nomination au ministère de la Santé en juillet 2022. Il a pour cela mis en place plusieurs mesures pour limiter les effets de cet engorgement, telle notamment la régulation à l’entrée des urgences, qui ont certes permis de réduire les signes de la crise, mais pas ses causes profondes.

« 20 mois pour revenir sur 30 ans d’incohérence, c’est impossible »
Depuis 2019, les urgentistes ont commencé à avoir l’habitude qu’on leur promette de résoudre leurs problèmes. Trois ministres de la Santé se sont succédé et Emmanuel Macron avait également annoncé vouloir refonder l’hôpital lors de ses vœux aux soignants en janvier dernier. Alors cette énième promesse de désengorger rapidement les urgences les laisse pour la plupart perplexe. « 20 mois pour revenir sur 20 à 30 ans d’incohérence pour le service public et les urgences, c’est impossible » résume le Dr Patrick Pelloux, président de l’Association des médecins urgentistes de France.

L’engorgement des urgences est en réalité la conséquence de plusieurs problèmes structurels : manque de médecins hospitaliers et surtout d’infirmiers, manque de lits d’aval qui oblige à garder des patients sur des brancards mais également pénurie de médecins généraliste libéraux, qui contraint beaucoup de patients à se rendre aux urgences, faute de pouvoir obtenir un rendez-vous en ville. « On est dans un contexte de désertification galopante pour ce qui est de la médecine de ville » résume le Dr Jean-Paul Hamon. L’ancien président de la Fédération des médecins de France regrette notamment l’échec des dernières négociations conventionnelles qui aurait permis l’adoption de mesures incitatives en faveur de la médecine de ville.

A peine plus optimiste, le Dr Marc Noizet, président du syndicat SAMU-Urgences de France, salue le fait que le Président de la République ait fait de la crise de l’hôpital public « une priorité », bien qu’il se dise « circonspect » et « attend de voir comment cela sera décliné ». En attendant, le portrait qu’il dresse des urgences françaises n’est pas reluisant. « Nous avons l’impression d’une descente aux enfers, les patients s’empilent dans nos services dans tous les hôpitaux désormais, les fermetures continuent, la situation se dégrade à vitesse grand V, les urgentistes partent, les infirmières aussi ».

Hôpital public, morne plaine
L’entrée en vigueur de l’encadrement de la rémunération des intérimaires il y a quinze jours n’a fait qu’aggraver encore plus la situation. De nombreux services d’urgences, notamment dans les villes moyennes, comptaient sur ces intérimaires pour assurer la continuité des soins. Opposé à cette réforme, le Syndicat national des médecins remplaçants hospitaliers (SNMRH) dresse une liste des centres mis en difficulté par cette réforme : selon lui, ce sont déjà 50 services hospitaliers à travers le pays qui ont dû fermer ou réduire leur activité, dont par exemple les urgences pédiatriques de Douai dans le Nord ou les urgences de Vittel dans les Vosges.

En résumé, les médecins doutent fortement que des problèmes structurels du système de santé français, dont certains existent depuis plus de 20 ans, puissent être résolus en un coup de baguette magique.

Dans son allocution, le Président de la République s’est donné cent jours pour que ses réformes commencent à porter leurs fruits. Espérons que cela ne se termine pas en Waterloo.

Quentin Haroche