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Lequotidiendumedecin.fr : Pertinence des actes, gardes obligatoires : la FHF place le gouvernement devant ses responsabilités

Septembre 2018, par infosecusanté

Pertinence des actes, gardes obligatoires : la FHF place le gouvernement devant ses responsabilités

Anne Bayle-Iniguez

| 04.09.2018

« Nous n’avons pas besoin d’une énième réforme de l’hôpital, d’un énième colmatage technique ni d’une approche technocratique du soin. Nous voulons une réforme volontariste et ambitieuse pour mettre sur les rails un système de santé à bout de souffle. » Mardi matin, le président de la Fédération hospitalière de France (FHF), Frédéric Valletoux, a décrit par le menu ce que l’hôpital public attend de la stratégie de transformation du système de santé, que le gouvernement doit présenter – sauf énième report – d’ici à la fin du mois.

Le patron de la FHF doit rencontrer Agnès Buzyn le 12 septembre. Même si la réforme devrait être quasiment bouclée à cette date, Frédéric Valletoux livrera une nouvelle fois ses desiderata à la ministre de la Santé. Sa priorité : « s’attaquer réellement à la pertinence des soins, quitte à bousculer certaines pratiques » médicales, à l’hôpital mais aussi en ville. « C’est un sujet d’économies majeur, qu’on peut ensuite réinjecter sur l’attractivité des carrières médicales […] et l’investissement hospitalier », a développé le maire de Fontainebleau (Seine-et-Marne).

40 à 60 milliards d’euros d’économies

Pour étayer son propos, la FHF a analysé la disparité des pratiques sur trois actes médicaux et chirurgicaux réalisés en 2017 dans les hôpitaux et cliniques françaises. D’après les analyses de la fédération, le taux de recours de la chirurgie du canal carpien varie d’un département à l’autre de 1,1 à 3,6 pour 1000 habitants ; de 3,6 à 9,9 pour la coronarographie suivie ou non d’angioplastie ; et de 1,6 à 4,3 pour l’arthroscopie du genou.

« Ces résultats interrogent sur la variation des pratiques médicales, a commenté ce mardi Zaynab Riet, déléguée générale de la FHF. Prenons la coronarographie : nous n’avons pas d’explication épidémiologique logique qui démontre pourquoi le taux de recours passe de trois à presque dix de l’Auvergne au sud de la France. »

Le gisement est considérable : la FHF estime que « 40 à 60 milliards d’euros d’économies » pourraient être générées grâce à un travail méthodique sur la pertinence des actes – dont 20 à 30 % seraient inutiles.

Des généralistes qui bossent comme des fous mais...

Autre cheval de bataille de la FHF pour désengorger les urgences : la « nécessité de participer aux tours de garde » pour les médecins généralistes libéraux. Frédéric Valletoux ne s’en cache pas : le volontariat dans la permanence des soins a aujourd’hui ses limites, même s’il mesure que ses propos offensifs vont lui « attirer les foudres » d’une partie des syndicats de médecins de ville.

Le patron de la FHF sait aussi que le retour éventuel des gardes obligatoires ne « résout que la moitié des problèmes » de dysfonctionnement du système de santé. « J’ai bien conscience que les médecins généralistes bossent comme des fous et ne sont pas assez nombreux là où on a besoin d’eux », tempère Frédéric Valletoux. Pour mieux répartir les praticiens, la FHF recommande l’interdiction d’installation en secteur II dans les territoires surdenses (tout en maintenant la liberté d’installation en secteur I).

La FHF a croisé deux données pour apporter de l’eau à son moulin : 64,6 % des départements voient simultanément leur nombre de passages aux urgences augmenter et leur nombre de médecins généralistes baisser. Le statu quo n’est donc plus tenable.

La responsabilité populationnelle en solution

Annoncée lors de la Paris healthcare week, l’expérimentation sur cinq territoires (les Deux-Sèvres, la Cornouaille, le Douaisis, la Haute-Saône et l’Aube) de la « responsabilité populationnelle » est l’une des réponses de la FHF pour mieux prendre en charge les besoins. Lancée dans le cadre de l’article 51 du précédent budget de la Sécurité sociale, cette initiative promeut une approche horizontale des soins, où libéraux, hospitaliers, services publics et associations travaillent ensemble sur un territoire et une population donnés.

La FHF définira le 15 septembre deux patientèles cibles (parmi les patients diabétiques, insuffisants cardiaques ou souffrant de BPCO) afin de lancer sa démonstration grandeur nature en janvier 2019.