La Sécurité sociale

JIM - Travailler pendant un arrêt de travail : c’est le nouveau monde !

Novembre 2018, par Info santé sécu social

Paris, le vendredi 16 novembre 2018

Les pouvoirs publics sont depuis longtemps à la recherche de solutions pour restreindre le coût lié à la prise en charge des arrêts de travail. En la matière, le gouvernement n’est pas en manque d’idées. Au début de l’été, il proposait ainsi de faire payer les employeurs pour les arrêts maladie de courte durée, un projet retiré face à la bronca soulevée tant chez les syndicats de patrons que de travailleurs.

Une nouvelle mesure vient de fleurir dans l’esprit d’une mission lancée par Matignon : faire travailler les salariés en arrêt de travail !

Ainsi, selon un document dévoilé par l’Agence France Presse (l’AFP), les trois personnalités en charge du dossier proposent que les patients en arrêt de travail télé-travaillent durant leur congé maladie. Si le médecin prescripteur juge que le télétravail est adapté à l’état du patient, il pourrait à l’avenir cocher cette nouvelle case sur l’avis d’arrêt de travail.

Cette solution pourrait aussi être utilisée pour « certains arrêts longs », si les pathologies sont compatibles avec la poursuite de l’activité, précisent les experts.
Piste intéressante ou fausse bonne idée ?

Face à cette proposition, la prudence s’impose. Ainsi, sur RTL, le Premier Ministre, même s’il a estimé la piste intéressante a néanmoins jugé : « c’est une question délicate. Favoriser le télétravail, oui », mais « ne pas mélanger l’arrêt de travail et le travail ».

Cependant, cette idée n’a pas provoqué une ire unanime des syndicats.

Au magazine l’Express, Serge Legagnoa de Force Ouvrière (FO) paraît séduit et explique ainsi : « par peur d’une perte de revenus, d’une charge de travail trop importante ou de difficultés avec l’employeur, des salariés font du ’présentéisme’. Ils tirent sur la corde et finissent par connaître des arrêts plus longs. Sur contrôle du médecin, ils pourraient télé-travailler ou obtenir, sans arrêt de travail préalable, un temps partiel thérapeutique ».

Son de cloche proche à la CFDT, où Catherine Pinchaut, secrétaire nationale en charge de la santé au travail à la CFDT estime néanmoins que recourir au télétravail pendant les arrêts maladie ne peut se faire que « sur la base du volontariat des salariés ». Elle considère cependant la piste « intéressante pour permettre un retour à l’emploi progressif ». « Lors d’un arrêt long, il y a un risque de désinsertion professionnelle et cela peut aider le salarié à revenir en douceur », constate-t-elle ainsi.

La CGT, sans mettre son veto est plus réticente : « comment un médecin traitant, qui ne connaît pas l’entreprise et son organisation, pourrait juger si la personne est en état de télé-travailler ou non ? » s’interroge, cité par l’Express, Jérôme Vivenza. « Beaucoup de questions restent sans réponse, le dispositif paraît en dehors des réalités et n’est pas applicable dans la vraie vie », critique-t-il encore dans Le Figaro.

A la CFE-CGC, le fait même de mélanger arrêt de travail et télétravail révolte : « cela a tout de la fausse bonne idée. C’est la porte ouverte à des pressions sur ceux qui ne voudraient pas, quand leurs collègues acceptent » prévient ainsi François Hommeril.

Dans le Figaro, l’avocate spécialisée dans le droit du travail, Eva Touboul soulève un point d’achoppement supplémentaire : « si la maladie du salarié s’aggrave pendant qu’il retravaille à son domicile, qui sera responsable. Imaginons un salarié qui se recasse la jambe en tombant alors qu’il allait chercher son ordinateur pour travailler ».

D’autres pistes, toutes aussi contestées, sont avancées par la commission, comme par exemple une possible forfaitisation des indemnités journalières (IJ) pour les arrêts allant d’un à trente jours ou « la convergence du délai de carence »…

On n’a pas fini de parler de l’augmentation du coût des arrêts de travail !

F.H.