Covid-19 (Coronavirus-2019nCoV) et crise sanitaire

JIM - Covid-19 : pour la première fois une majorité de nouveaux cas hors de Chine

Février 2020, par Info santé sécu social

Rome, le lundi 24 février 2020

Selon les dernières données colligées par l’université John Hopkins de Baltimore 617 cas de Covid-19 ont été recensés ces dernières vingt-quatre heures. Si ce chiffre relativement bas pourrait apparaître comme une nouvelle encourageante, ce week-end a été marqué par un tournant certain dans l’épidémie. Ainsi, pour la première fois, le nombre de nouveaux cas est plus important hors de Chine qu’en Chine (403 cas hors de Chine, 214 cas en Chine). On compte également un nombre record de décès (284) principalement en Chine (2621 décès depuis le début de l’épidémie dont 22 hors de Chine).
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C’est la situation italienne qui sera sans doute l’objet de toutes les attentions en Europe, où cinq décès liés au coronavirus ont été déplorés. Les deux dernières victimes étaient des octogénaires dont l’un au moins présentait d’importantes comorbidités.

L’Italie recense désormais 157 cas de Covid-19 contre six il y a moins d’une semaine.
Pas de nouveau lazaret

Après avoir fait un point sur les nombreuses mesures de restriction décidées depuis vendredi, notamment la suspension des sacro-saints matches de foot du dimanche, le président du Conseil italien, Giuseppe Conte a néanmoins tenu à rassurer : « nous ne transformerons pas l’Italie en lazaret ».

Reste que du Piémont à Trieste et des Alpes à l’Emilie-Romagne, dans tout le nord du pays, les écoles et les universités resteront fermées, au moins jusqu’au 1er mars, les offices religieux ont été annulés, de même que la plupart des rencontres sportives, tandis que nombre de monuments, comme la cathédrale et la Scala de Milan ont fermé leurs portes. Dans l’après-midi de dimanche, le maire de Venise, Luigi Brugnaro, annonçait encore que le carnaval s’arrêterait le soir même, deux jours plus tôt que prévu, deux cas venant d’être détectés dans la ville.
Quarantaine à l’italienne
En outre onze cités ont été mises en quarantaine, une quarantaine que l’on pourrait cependant qualifier de « latine », en tout état de cause moins stricte que les mesures d’isolement chinoises. En effet, de nombreux reportages ont mis en évidence la facilité avec laquelle il était encore possible de sortir des villes concernées, notamment en voiture.

Pour Giuseppe Conte, cette soudaine explosion de cas s’explique en premier lieu par l’efficacité des services de santé italiens ! Il relève en effet que s’il y a plus de cas positifs en Italie, c’est tout simplement parce qu’on y fait plus de tests. « Nous avons fait plus de 4 000 contrôles par prélèvement » a ainsi mis en avant le chef du gouvernement, avant d’ajouter : « nous sommes le premier pays d’Europe à avoir décidé de faire des examens plus rigoureux ». Cette appréhension optimiste de la situation est loin d’être partagée par tous les experts.

Ainsi, dans la Stampa, Walter Ricciardi, membre du conseil exécutif de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), signale pour sa part deux erreurs initiales des autorités locales : la première aura été « de ne pas avoir mis en quarantaine immédiatement les rapatriés de Chine » (en l’absence de symptômes, le placement en isolement était basé sur le principe du volontariat et n’était donc pas automatique), et la seconde d’avoir arrêté les liaisons directes avec la Chine, une décision « sans bases scientifiques », et qui « nous a empêchés d’avoir une véritable traçabilité des arrivées » (les voyageurs ayant toujours la possibilité d’utiliser des vols avec escales).

A la recherche du patient zéro
Au-delà de ces remarques et critiques, parmi les 157 patients recensés, un malade, en particulier, est au centre des investigations épidémiologiques. Il s’agit d’un homme de 38 ans, actuellement hospitalisé dans un état grave à l’hôpital de Codogno, épicentre de la flambée italienne.

De sa compagne, enceinte de huit mois, au personnel qui l’a soigné, en passant par les clients du café qu’il fréquentait et ses camarades de sport, il a contaminé sans le savoir de nombreuses personnes. Il a également participé à de multiples événements publics, et sa passion pour la course l’a fait participer au semi-marathon de Portofino.

S’il a été identifié comme un important propagateur, cet homme ne peut pas être le "patient zéro" italien, il n’a en effet eu aucun contact avec la Chine. Le patient zéro reste donc introuvable. Un temps soupçonné, l’un de ses collègues revenant d’un voyage à Pékin a été mis hors de cause pour le moment, son test par PCR étant négatif, ce qui ne présage pas, rappelons-le, qu’il ne soit pas porteur du SARS-CoV-2, compte tenu des défauts de spécificité de cet examen.

Dans ce contexte, malgré les appels à l’unité nationale, l’ancien ministre de l’intérieur et chef politique de la Ligue, Matteo Salvini, n’a pas manqué de demander la fermeture des frontières (et en particulier des ports), ainsi que la suspension des accords de Schengen, accusant Giuseppe Conte d’« avoir sous-évalué la menace ». « En janvier, parler de quarantaine semblait un gros mot, maintenant de l’avis de tous les médecins et virologues c’est le seul moyen de régler le problème », a-t-il remarqué, en marge d’un déplacement à Gênes.

Chez les voisins de l’Italie, plusieurs personnalités politiques ont lancé des appels identiques à la fermeture des frontières. C’est le cas en France de nombreux maires du sud de la France et de la présidente du Rassemblement national, Marine Le Pen.

La France renforce son dispositif
En France, Olivier Véran a annoncé que 70 hôpitaux supplémentaires seront habilités à recevoir les cas suspects, afin de renforcer notre préparation en vue d’une éventuelle propagation en France du coronavirus. Il s’agit de compter un établissement de référence par département : « pour accueillir les éventuels malades nous disposions jusqu’à présent de 38 établissements de santé essentiellement les CHU. J’ai décidé en accord avec le Premier ministre que 70 établissements siège d’un Samu seront activés dès demain (lundi 24 février) pour augmenter nos capacités de réponse si c’était nécessaire. Ainsi, tous les départements de métropole disposeront d’au moins un centre hospitalier capable d’accueillir les malades et de les prendre en charge du début à la fin » (sic).

Il a aussi indiqué avoir « convenu d’un prochain entretien réunissant plusieurs ministres de la Santé de l’Union européenne » sans en donner la date. Enfin, il a promis une augmentation des éléments permettant la réalisation des tests (kits de prélèvement, oligonucléotides) « pour atteindre une capacité de plusieurs milliers d’analyses par jour et sur tout le territoire, contre 400 aujourd’hui ».

F.H.