13 MARS 2020 PAR LA RÉDACTION DE MEDIAPART

Le premier ministre Édouard Philippe et le ministre de la Santé Olivier Véran ont rappelé, ce dimanche, les hypothèses de travail du gouvernement pour un début de déconfinement le 11 mai.

Le gouvernement encore et toujours dans le flou
Quel était l’objectif de cette « conférence de presse » ? La question est toujours en suspens, ce dimanche soir, au terme du long discours d’Édouard Philippe et Olivier Véran à la télévision.

Pendant près de 2 h 15, le chef du gouvernement et son ministre de la santé ont balayé les hypothèses de travail sur le déconfinement, ses grands principes et les pistes de réflexion. Tout en prenant soin de ne rien graver dans le marbre.

Six jours après l’allocution d’Emmanuel Macron, ils ont répété que la situation était encore très incertaine à ce jour. À tel point qu’on se demande si le seul objectif de ce point presse n’était pas de calmer les ardeurs présidentielles.
Les deux hommes ont aussi ressassé les consignes sur les gestes barrières, sur le port du masque (qui ne semble plus si inutile que ce que le même gouvernement disait il y a quelques jours seulement) ou, avec beaucoup d’autocongratulation, sur l’importance du confinement, qui produit ses effets.

Florence Ader, infectiologue à l’hôpital de la Croix-Rousse à Lyon qui pilote l’essai Discovery, est aussi intervenue pour expliquer l’état de la recherche. « Ce que nous ne savons pas ? Pourquoi il y a une majorité d’hommes hospitalisés [...] et le peu d’enfants touchés », a-t-elle expliqué. Les chercheurs ignorent aussi si l’on peut être malade deux fois du Covid-19, a rappelé la professeure.

Il ressort de cette conférence de presse – dont les questions, limitées, étaient concentrées par une seule journaliste (Mediapart n’a pas pu poser les siennes, voir ci-dessous) – une impression de grand flou. Alors qu’Emmanuel Macron avait décrété la réouverture des écoles à partir du 11 mai, le gouvernement travaille toujours à un scénario de déconfinement qui n’est pas encore calé. On le savait déjà, mais le premier ministre avait visiblement besoin de le répéter.

Le plan sera prêt « dans 15 jours », a expliqué Édouard Philippe lors du point presse. Le premier ministre semble déjà avoir gagné une semaine sur le calendrier initial fixé par le président de la République : lundi dernier, Emmanuel Macron avait sommé son gouvernement de présenter un plan « d’ici 15 jours », déjà.

Les hypothèses de travail du gouvernement reposent sur deux principes, selon le premier ministre : l’« impératif de sécurité des Français », mais aussi la « continuité de la vie de la nation », à savoir la production « pour pouvoir nous nourrir, nous déplacer », mais aussi « l’école, la solidarité, l’investissement ».

Le déconfinement doit aussi se faire en respectant « deux conditions » : « rétablir les capacités d’accueil des hôpitaux » et « maîtriser la circulation du virus ».

Les pistes de travail du gouvernement sont notamment les suivantes :

– Une réouverture progressive des écoles à partir du 11 mai qui pourra se faire « par territoire » ou « par moitié de classe », selon des scénarios encore à l’étude ;

– Un port du masque « probablement » obligatoire dans les transports publics à partir du 11 mai.

La situation est compliquée par une pénurie de matériel, que les autorités ne nient plus. Le ministre de la santé Olivier Véran, qui expliquait en février que la France était « prête » face au risque d’une pandémie, convient désormais que le pays, à commencer par le personnel soignant, manque de masques, de médicaments, mais aussi de blouses, de tabliers ou même de gants.

Le ministre a expliqué qu’il espérait que la France soit en capacité de réaliser 500.000 tests PCR par semaine à partir du 11 mai, contre 25.000 aujourd’hui. La capacité du pays à réaliser des grandes campagnes de tests sera déterminante pour un déconfinement, mais le gouvernement n’a pas précisé comment il comptait s’y prendre pour avoir suffisamment de matériel pour monter en charge (lire ici au sujet du grand dénuement de la France en matière de tests).

Édouard Philippe et Olivier Véran ont aussi présenté des graphiques imprécis laissant entendre que le rythme des importations en masques s’était accéléré ces dernières semaines.

Nous avons demandé des précisions mais la seule journaliste autorisée à participer à la conférence de presse, submergée de messages dans cet exercice périlleux, n’a pas pu relayer nos questions. Interrogé, Matignon n’a pas retourné nos demandes d’explications sur les chiffres fournis en direct par le premier ministre, nous renvoyant vers le ministère de la santé.