Covid-19 (Coronavirus-2019nCoV) et crise sanitaire

Le Monde.fr : Coronavirus : l’Assemblée nationale donne son premier feu vert au texte prolongeant l’état d’urgence sanitaire

Mai 2020, par infosecusanté

Le Monde.fr : Coronavirus : l’Assemblée nationale donne son premier feu vert au texte prolongeant l’état d’urgence sanitaire

L’article 6 du projet de loi, qui prévoit le lancement d’un « système d’information » pour identifier les personnes infectées, a notamment été adopté vendredi soir.

Le Monde avec AFP

Publié le 09/05/2020

L’état d’urgence sanitaire ne prendra pas fin avec le déconfinement programmé à partir du 11 mai. L’Assemblée nationale a voté en première lecture, dans la nuit de vendredi à samedi, le projet de loi le prolongeant jusqu’au 10 juillet et qui « intègre les enjeux » du déconfinement progressif.

Les députés ont adopté le texte à main levée, avec l’appui des élus de La République en marche (LRM), du Mouvement démocrate (MoDem) et de la majorité des UDI, Agir et indépendants. Les députés Les Républicains (LR) ont voté contre, comme ceux du Parti socialiste (PS), au nom des « libertés individuelles » ; les élus de La France insoumise (LFI), du Parti communiste français (PCF) et du groupe Libertés et territoires se partageant essentiellement entre votes contre et abstentions.

Députés et sénateurs tenteront samedi en commission mixte paritaire de se mettre d’accord sur une version de compromis du projet de loi, en vue d’une adoption définitive d’ici à dimanche soir.

Quarantaine préventive et placement à l’isolement encadrés
La question de la responsabilité pénale des décideurs risque de faire débat entre les deux chambres. Le Sénat, à majorité de droite, a voulu préciser en début de semaine qu’ils devront avoir commis une faute intentionnelle ou délibérée pour que leur responsabilité pénale soit engagée.

Les députés ont ensuite totalement revu le dispositif : la justice devra selon eux tenir compte, « en cas de catastrophe sanitaire, de l’état des connaissances scientifiques au moment des faits ». La majorité et Les Républicains s’accusent désormais mutuellement d’organiser « l’impunité ». Raphaël Schellenberger (LR) a notamment justifié le vote de son groupe par l’organisation de « l’irresponsabilité de ce gouvernement ».

Le projet de loi encadre en outre les régimes de mise en quarantaine préventive et de placement à l’isolement pour les malades, obligatoires pour certaines personnes arrivant sur le territoire national. Les députés ont ajouté des garanties de droit à ces régimes. Les députés ont en outre voté vendredi une nouvelle prolongation de la trêve hivernale des expulsions locatives jusqu’au 10 juillet.

Ils ont, en revanche, supprimé un article introduit au Sénat qui entendait « figer » dans la loi l’organisation des cartes de la situation sanitaire, ainsi qu’une disposition visant à empêcher le paiement de frais bancaires par les personnes en fragilité financière, le ministre de la santé, Olivier Véran, y voyant « un pur cavalier législatif », sans lien avec le projet de loi.

Un « système d’information » controversé validé

Au terme d’un débat nourri de plusieurs heures, l’article 6 du projet de loi, soit la création d’un « système d’information » en lien avec l’Assurance-maladie, a notamment été validé. Il est « destiné à identifier des personnes infectées » et « à collecter des informations » sur les personnes en contact avec elles, afin qu’elles s’isolent si besoin. Des « brigades » ou « anges gardiens », notamment agents de la Sécurité sociale, seront chargés de faire remonter la liste des cas contacts.

Le ministre de la santé a plaidé devant les députés le « besoin » de ce dispositif dans le cadre de la stratégie visant « à casser les chaînes de contamination », alors que le déconfinement débute lundi. Assurant, au vu des inquiétudes formulées par certains élus, que ce n’est « pas Armageddon ni Matrix », il a ajouté qu’il s’agissait « de mettre une brique » à un fichier déjà existant de l’Assurance-maladie.

Mais des élus de tous bords, y compris dans la majorité, ont fait part de craintes, en particulier sur le respect du secret médical. Comme Emilie Cariou (LRM), Florence Provendier (LRM) a exprimé son inquiétude sur une « mise à mal des principes fondamentaux de l’éthique médicale ».

« Ce que nous ne voulons pas, c’est une société des fichiers », a affirmé pour sa part Jean-Luc Mélenchon (LFI), tandis que Sébastien Jumel (PCF) s’est inquiété du « juste équilibre entre préoccupation sanitaire légitime et respect des droits fondamentaux ».

Les députés ont conservé plusieurs apports du Sénat, dont une instance de contrôle et – dans une version retouchée – la limitation du périmètre des données collectées à celles concernant l’infection par le virus. Ils ont aussi apporté plusieurs précisions, dont le fait que le partage des données du système d’information durerait neuf mois, une éventuelle prolongation devant être validée par le Parlement.

Un amendement du gouvernement permettra aussi la rémunération des professionnels participant à la collecte des données, notamment les médecins, alors que les députés avaient proscrit toute rémunération en commission. Un autre prévoit que les pharmaciens pourront avoir accès au système d’information. Par le vote d’un amendement PS, l’Assemblée a encore précisé que les personnes ayant accès aux données seraient soumises au secret professionnel.