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Les Echos - « Ségur de la santé » : Edouard Philippe veut changer de rythme, pas de cap

Mai 2020, par Info santé sécu social

Le Premier ministre a promis qu’il n’y aurait pas de « demi-mesures » dans la réforme du système de santé, en promettant des revalorisations « significatives » et « rapides ». Mais il a mis en garde contre l’autodénigrement, et estimé que la gouvernance n’était pas forcément le problème.

Par
Solveig Godeluck
Publié le 25 mai 2020 à 18h10

Allegro, ma non troppo. Après les déclarations enflammées d’Emmanuel Macron et d’ Olivier Véran sur l’aggiornamento de l’hôpital et du système de soins , le Premier ministre a tenu un discours plus mesuré, ce lundi, en inaugurant la concertation du « Ségur de la santé » . Devant un parterre virtuel de 300 professionnels du secteur en visioconférence, Edouard Philippe a rappelé les quatre piliers de la réforme qui doit voir le jour « début juillet ».

Le Premier ministre a certes évoqué des « changements radicaux », et promis « des choix forts, rapides et assumés » plutôt que des « demi-mesures ». Mais il ne s’est pas livré à un mea culpa, préférant pointer la lenteur à mettre en oeuvre la transformation d’un « système bloqué » et « appauvri ».

Selon lui, la réforme systémique « Ma Santé 2022 » de 2018 et le plan d’urgence pour l’hôpital de 2019 ont « privilégié la qualité des soins plutôt que les logiques comptables » et commencé à « casser les silos », s’est-il félicité, comme en écho au ministre de la Santé qui a promis la semaine dernière d’être disruptif et de « briser les silos ». Edouard Philippe ne veut assurément « pas changer le cap, mais changer le rythme ».

Une revalorisation « significative »
Ce « Ségur de la santé » est néanmoins censé répondre à une demande qui n’a pas obtenu de réponse pendant ce quinquennat : celle d’une revalorisation des salaires de la fonction publique hospitalière. Il n’y a eu que des primes ciblées jusqu’à présent. Olivier Véran a promis un alignement salarial au minimum au niveau de la moyenne européenne, ce que le directeur de l’AP-HP, Martin Hirsch, interprète comme une hausse de 15 à 20 % des salaires paramédicaux, et le cabinet Roland Berger comme 250 euros brut supplémentaires par mois pour chaque infirmier.

« La revalorisation sera significative », a confirmé Edouard Philippe, promettant également des crédits d’assurance-maladie en forte progression « dans les années à venir ». Salaires, déroulés de carrières, métiers, coopérations, délégations de compétence , tout cela sera mis sur la table… mais aussi la question du temps de travail , qui n’est « pas tabou ». Le chef du gouvernement a également estimé que le statut de praticien hospitalier n’était « pas le seul adapté aux besoins et aux aspirations des jeunes médecins », car il ne permet pas de valoriser financièrement l’engagement dans la recherche, l’enseignement ou le management.

Un problème de management
En revanche, le Premier ministre n’est pas convaincu qu’il faille revoir la gouvernance de l’hôpital, même s’il a missionné un médecin, Olivier Claris, pour y réfléchir. A ses yeux, il y a « plutôt un problème de management que de règles de gouvernance ». Alors que les soignants réclament plus de pouvoir, et que Martin Hirsch propose une gouvernance plus coopérative à la tête des établissements, Edouard Philippe parle de « généraliser les délégations d’enveloppe dans les services ». Une solution qui

Quant au volet investissement, qui inclut la reprise d’un tiers de la dette hospitalière plus 250 millions d’euros par an de crédits, il s’agit à présent de le « compléter », a affirmé Edouard Philippe, sans se lancer dans « la course à la construction de nouveaux bâtiments ». Les comités interministériels qui pilotent les investissements hospitaliers, ces « Copermo » honnis des hospitaliers car ce sont souvent eux qui disent « non », ne vont pas disparaître. Ils vont plutôt se recentrer sur les projets territoriaux conçus avec la ville et les Ehpad, et accompagner le désendettement des établissements.

Des réformes accélérées
Plusieurs réformes déjà annoncées ont été aussi resservies : celles du financement de la psychiatrie et des services d’urgence en 2021 ; la montée en charge du financement à la qualité (2 milliards d’euros en 2022) ; la multiplication des communautés professionnelles territoriales de santé qui devront mailler « tout le territoire d’ici un an », alors que l’objectif présidentiel était que tous les médecins de ville soient regroupés en 2022.

Il y aura bien en revanche une accélération pour la télémédecine, qui devrait être libéralisée, après une généralisation très encadrée en 2018 qui avait restreint son potentiel. La création d’un espace numérique de santé, sorte de coffre-fort électronique personnel des données de santé, initialement prévue pour janvier 2022, devient un sujet « prioritaire », car son existence « aurait facilité l’interaction avec les patients à domicile » pendant la crise.