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Le Monde.fr : Qu’y a-t-il derrière les « 500 milliards d’euros » mobilisés par l’Etat pour faire face à la crise ?

Juin 2020, par infosecusanté

Le Monde.fr : Qu’y a-t-il derrière les « 500 milliards d’euros » mobilisés par l’Etat pour faire face à la crise ?

DERRIÈRE LE CHIFFRE – Le chiffre impressionnant avancé par Emmanuel Macron ne comprend en réalité « que » 58 milliards d’euros de dépenses effectives.

Par Maxime Mainguet

Publié le 16/06/2020

« Nous avons mobilisé près de 500 milliards d’euros pour notre économie. » Dimanche 14 juin, lors de son allocution télévisée, Emmanuel Macron a tenu à rappeler que l’Etat avait agi puissamment pour lutter contre la crise économique liée à l’épidémie de Covid-19. Mais le chiffre qu’il évoque mérite d’être nuancé, car si l’ordre de grandeur utilisé par le président de la République est le bon (bien que légèrement surévalué), il peut être trompeur quant à la nature des aides apportées.

Sur 463 milliards d’euros « mobilisés », 58 milliards sont amenés à être réellement dépensés
Selon les données communiquées au Monde par le ministère de l’action et des comptes publics, l’Etat a effectivement « mobilisé » 463 milliards d’euros pour lutter contre les conséquences du Covid-19, y compris celles liées au système de santé, soit un total proche du chiffre mentionné par le chef de l’Etat. Mais cette somme n’a pas vocation à être dépensée intégralement.

En effet, sur ces 463 milliards d’euros, seulement 58 milliards sont à ce stade considérés comme des dépenses budgétaires effectives. Il s’agit principalement des sommes utilisées pour financer le chômage partiel (31 milliards d’euros), du fonds de solidarité pour les petites entreprises (8 milliards d’euros) ou des dépenses de santé engagées de manière exceptionnelle pour lutter contre l’épidémie (8 milliards d’euros).

Qu’en est-il des 405 milliards restants ? Ils font référence à deux types d’outils :

les mesures de garanties d’Etat (327 milliards d’euros, dont 300 milliards de garanties de prêts) : l’Etat sert en quelque sorte de caution à une entreprise ayant besoin d’un prêt bancaire pour surmonter la crise. Autrement dit, tant que l’entreprise n’a pas de difficulté à rembourser son prêt, il n’engage pas un centime ;
les aides en trésorerie et en capital : elles consistent majoritairement à différer le paiement par les entreprises de 32,5 milliards d’euros de cotisations sociales et impôts (qui devront donc tout de même être payés), à avancer le remboursement déjà prévu de crédits d’impôts (pour un total de 23 milliards d’euros) ou à monter au capital de certaines grandes entreprises (20 milliards d’euros), au travers d’actions qu’il sera possible de revendre le moment venu. En théorie, ces mesures se limitent donc à des modifications de calendrier ou à des placements plus ou moins temporaires.

Budgéter n’est pas dépenser
Ces outils généreront, à terme, des dépenses pour l’Etat – si une entreprise fait faillite sans pouvoir payer ses charges ni rembourser son prêt, par exemple. Mais celles-ci seront bien moins importantes que les sommes « mobilisées ».

Et ces hypothétiques pertes seront d’autant moins grandes que les outils mis en place par le gouvernement pourraient être moins sollicités que prévu. A titre d’exemple, « seuls » 96 milliards d’euros de prêts garantis par l’Etat avaient été souscrits début juin.

Le chiffre de 500 milliards d’euros peut donc porter à confusion quant au niveau des dépenses réelles de l’Etat pour lutter contre les conséquences de l’épidémie. Mais il n’en reste pas moins que les 58 milliards d’euros de dépenses effectives constituent un effort important puisqu’ils représentent l’équivalent de 17 % du budget initialement prévu pour 2020.

Maxime Mainguet