Politique santé sécu social de l’exécutif

Huffpost - Agnès Buzyn devant la commission d’enquête sur le coronavirus

Juin 2020, par Info santé sécu social

Qui est responsable de l’évaporation du stock stratégique d’État de masques de protection ? La commission de l’Assemblée cherche à faire la lumière.

Où sont passés les masques ? Pour tenter de répondre à cette question lancinante, quatre ex-ministres de la Santé vont être entendus cette semaine par la commission d’enquête de l’Assemblée nationale sur la gestion de la crise du coronavirus, à commencer par Agnès Buzyn ce mardi 29 juin.

Attendue au tournant après avoir quitté son poste mi-février, Buzyn sera suivie mercredi par Marisol Touraine (ministre de 2012 à 2017) et Roselyne Bachelot (2007-2010), avant que Xavier Bertrand (2005-2007 puis 2010-2012) ferme le bal jeudi.

Une question sera au coeur des débats : qui est responsable de l’évaporation du stock stratégique d’Etat de masques de protection ? En avril 2010, il se montait à 1 milliard de masques chirurgicaux et 700 millions de masques FFP2, plus protecteurs, a indiqué le 24 juin à la commission d’enquête Didier Houssin, directeur général de la Santé (DGS) de 2005 à 2011. Mais début 2020, ce stock s’était réduit à 117 millions de masques chirurgicaux pour adultes, 40 millions de masques pédiatriques, et plus aucune réserve de FFP2.

Les stocks de masques
Ces deux dernières semaines, la commission d’enquête a entendu tous les DGS, c’est-à-dire les numéros 2 du ministère, de la période 2003 à 2011. C’est maintenant au tour de l’étage supérieur. La première ex-ministre interrogée sera Agnès Buzyn, mardi à partir de 17H00.

Les députés s’étaient montrés peu satisfaits des réponses de l’actuel DGS, Jérôme Salomon, le 16 juin, lors de la première audition (vidéo ci-dessous).

Ils auront donc sûrement à coeur d’interroger Buzyn sur les suites données à un courrier de l’agence sanitaire Santé publique France, qui recommandait en 2018 de reconstituer le stock de masques à hauteur d’un milliard d’unités.

Ce courrier avait été adressé au DGS fin septembre 2018. En octobre, Jérôme Salomon avait donné l’ordre de commander seulement 100 millions de masques. La commande n’a ensuite été effectivement passée qu’en juillet 2019 : seuls 32 millions de masques sont arrivés au cours de l’année 2019, le reste n’étant reçu qu’en février dernier, alors que l’épidémie de Covid-19 venait d’atteindre la France.

“J’aurai l’occasion de m’expliquer”
“Il y a eu des choix délibérés qui ont été faits par le directeur général de la Santé et par un certain nombre de responsables en place sur la diminution de ces masques”, a accusé cette semaine le chef de file des députés LR, Damien Abad.

Agnès Buzyn sera d’autant plus attendue qu’on lui a souvent reproché d’avoir quitté le ministère précipitamment. Elle avait cédé la place à Olivier Véran le 16 février, en pleine montée du risque épidémique, pour être candidate LREM aux élections municipales à Paris.

Un mois plus tard, juste après ses résultats décevants au premier tour, ses propos dans Le Monde le 17 mars avaient provoqué un tollé. Elle avait qualifié le scrutin de “mascarade” et assuré qu’elle “savai(t) que la vague du tsunami était devant nous” au moment de son départ du ministère.

Elle s’était ensuite excusée fin mai d’avoir employé le mot “mascarade”. “J’aurai l’occasion de m’expliquer”, avait-elle promis, en disant compter pour cela sur “les commissions d’enquête”.

Bachelot et H1N1
Lors des auditions, le précédent de la pandémie de grippe H1N1 en 2009 sera dans toutes les têtes puisqu’il pourrait avoir influencé certains choix qui ont amené à la situation actuelle.

A l’époque, Roselyne Bachelot avait été très critiquée pour avoir commandé trop de vaccins (94 millions de doses, dont seulement 6 millions avaient été utilisées) face à une pandémie finalement moins grave que redoutée.

“Nous avons été critiqués pour avoir été trop dépensiers” et cela a “selon moi joué un rôle majeur dans l’affaiblissement de la préparation au risque pandémique”, a assuré Didier Houssin lors de son audition.

Ironie du sort, l’épidémie de Covid-19 a signé le retour en grâce de Mme Bachelot, en qui l’opinion veut aujourd’hui voir l’incarnation d’un principe de précaution oublié par ses successeurs.