Covid-19 (Coronavirus-2019nCoV) et crise sanitaire

France info : Covid-19 : "On a mal testé parce qu’on trace mal et on isole peu", estime Bernard Jomier, médecin et sénateur écologiste

Octobre 2020, par infosecusanté

France info : Covid-19 : "On a mal testé parce qu’on trace mal et on isole peu", estime Bernard Jomier, médecin et sénateur écologiste

Le sénateur pointe la trop longue attente entre le moment où l’on passe le test et le moment où l’on reçoit les résultats.

"On a mal testé, parce qu’on trace mal et on isole peu", a affirmé dimanche 11 octobre sur franceinfo Bernard Jomier, médecin généraliste, sénateur écologiste (apparenté PS) de Paris et rapporteur de la commission d’enquête parlementaire sur la gestion de l’épidémie du Covid-19, alors que le virus circule de plus en plus en France. Santé publique France a annoncé samedi que le taux de positivité des tests atteint les 11%, et que 26 000 nouveaux cas positifs ont été enregistrés en 24 heures en France. Pour Bernard Jomier, il n’y a pas "de problème de quantité" de tests, mais "un problème de qualité, c’est-à-dire de délai de rendu". Le médecin assure qu’on peut "absolument réussir la lutte contre le virus", mais il alerte : "on ne peut pas avoir, comme au printemps, 7 000 patients atteints de Covid en réanimation en France. On n’en a plus les moyens."

franceinfo : Comment faire pour que la situation sanitaire soit mieux appréhendée qu’au printemps et cela se passe bien ?

Bernard Jomier : Ce qu’il faut noter, c’est qu’on n’est pas du tout au même niveau de patients hospitalisés. Les données en pourcentage ne reflètent pas tout à fait la réalité. Il y a eu au pic de l’épidémie au printemps, plus de 7 000 personnes en réanimation, il y en a actuellement un peu moins de 2 500. Mais évidemment, c’est en amont que ça se passe. Pour éviter les formes graves, il faut jouer sur la circulation du virus. Ce sont toutes les mesures en amont : d’abord, les fameux gestes barrière et le port du masque, puis, la stratégie "tester, tracer, isoler". Et notre grand problème en France, c’est que ce deuxième volet, la stratégie "tester, tracer, isoler", est largement en échec parce que on a mal testé, parce qu’on trace mal et on isole peu au fond.

C’est-à-dire que la stratégie du gouvernement est dure à mettre en œuvre, notamment les délais des tests ? Est-ce que c’est là qu’il y a une marge d’amélioration ?

Sur les masques, il y a une stratégie qui est assez cohérente, même si elle peut être discutée sur des points de détail. Mais on constate que les gens portent un masque très massivement quand on leur demande de porter un masque. Mais sur la stratégie "tester, tracer isoler", le ministre s’est concentré sur le nombre de tests en disant voilà, on en fait plus d’un million. Effectivement, on n’a pas vraiment de problème de quantité, mais on a un problème de qualité, c’est-à-dire de délai de rendu. Vous avez bien vu les files d’attente qui se sont allongées. Et même si maintenant cela s’améliore un peu dans les grandes métropoles, quand il vous faut quatre à cinq jours entre le moment où vous allez avoir des symptômes pour faire le test et avoir le résultat, pendant toute cette période vous êtes contagieux. Et donc cette stratégie, elle est mise en échec par le délai de réalisation des tests, mais par les autres étapes aussi. Dans les hôpitaux, on peut compter sur les soignants, mais ils vont être en difficulté. Et on ne peut pas avoir, comme au printemps, 7 000 patients atteints de Covid en réanimation en France. On n’en a plus les moyens.

Comment améliorer cette stratégie ? Il faut continuer dans la logique de priorisation souhaitée par le gouvernement ?

Oui, certainement. Sinon, on est totalement débordé. Si vous voulez faire des tests à toute la population, tout le temps, vous n’y arrivez pas. On n’en a pas les moyens très concrets. Donc il vaut mieux faire un peu moins en les ciblant. Mais par contre, il faut que derrière, la chaîne qui vise à briser les transmissions soit efficace, c’est-à-dire qu’on trace bien les personnes avec qui le malade a été en contact. Et puis qu’on procède bien aux mesures d’isolement. Regardez le taux de contamination dans les habitats collectifs, dans les foyers. Il est dramatique et montre bien un échec. Vous avez des foyers où vous avez 60, 80 de personnes qui ont été contaminées.