Covid-19 (Coronavirus-2019nCoV) et crise sanitaire

Libération - La contre-attaque du Covid gâche les vacances des Allemands des Allemands

Octobre 2020, par Info santé sécu social

Par Stéphane Roland, intérim à Berlin — 11 octobre 2020

Le rebond épidémique et les réglementations des régions qui varient sans cesse incitent les Allemands à rester chez eux.

Avec le rebond des infections, qui ont doublé en une semaine (plus de 4 000 pour la journée de vendredi), c’est la panique outre-Rhin. « Nous risquons de perdre le contrôle de la situation », a prévenu Lothar Wieler, le patron de l’Institut de veille sanitaire Robert-Koch (RKI). « Ne gâchons pas tous nos efforts en relâchant notre vigilance », a insisté Angela Merkel.

A la veille des vacances d’automne, l’Allemagne est comme une fourmilière dans laquelle on aurait mis un grand coup de pied. Plus personne ne sait où se déplacer sans risquer une amende ou, pire, être mis en quarantaine. « C’est la zizanie », ironise Bild, le grand quotidien populaire, en expliquant aux Allemands comment s’y retrouver dans les différentes réglementations des régions.

« La situation est si compliquée que les agences de tourisme conseillent maintenant de choisir la Grèce ! C’est beaucoup plus simple et moins risqué », explique Aage Dünhaupt, porte-parole du groupe allemand TUI, le plus grand voyagiste du monde. « Les responsables politiques sont prisonniers des règles sanitaires mises en place au printemps, poursuit-il. Il faut tout changer. Le tourisme n’est pas à l’origine d’un rebond des infections comme l’a montré le retour des vacanciers cet été. Ce sont les grandes fêtes familiales et les soirées arrosées entre amis qui sont les vrais spreader contaminateurs. »

« Aux régions de décider des mesures »
Fédérations oblige, l’Allemagne n’a jamais réussi à fixer des mesures de restriction au niveau national. Les règles sont différentes selon les régions et changent actuellement tous les jours. Rien ne dit qu’un Munichois qui se rend à Rostock aujourd’hui puisse le faire dans vingt-quatre heures. « Nous recevons des instructions des autorités tous les matins », explique Michaela Fabiny, qui loue des maisons suédoises dans la région, à Usedom, sur la côte baltique. L’hôtelière vient d’annuler 13 réservations sur ses 21 maisonnettes, la veille du week-end des départs.

Mais les diversités régionales sont revendiquées et assumées. « Le partage des pouvoirs est très important et les Allemands y tiennent. Cette crise ne changera rien au fédéralisme qui a aussi des bons côtés », insiste Sabine Kropp, politologue à l’Université libre de Berlin, spécialiste des questions de fédéralisme. A Cologne, les matchs de football se déroulent ainsi avec 300 spectateurs tandis qu’à Hanovre le stade a le droit d’en accueillir 5 000. Une différence qui se ressent directement dans les caisses du club. « On ne peut pas avoir les mêmes restrictions dans une grande ville très dense comme Berlin et à la côte baltique où la population est très faible », insiste Huberta Sasse, porte-parole de la Fédération allemande du tourisme.

Le gouvernement a d’ailleurs refusé de prendre ses responsabilités pour les départs en vacances : « C’est aux régions de décider des mesures à prendre », a résumé Steffen Seibert, le porte-parole de Merkel. Du coup, la situation est tellement confuse qu’on peut finir par se retrouver bloqué dans une région pendant plusieurs jours si l’on ne prend pas soin de s’informer avant son départ… Dans le Mecklembourg-Poméranie-Occidentale, les touristes peuvent venir avec une attestation de test négatif (de moins quarante-huit heures) mais s’ils viennent d’une zone à risque, ils sont obligés de respecter une quarantaine dans leur chambre. Il fallait le savoir ! « C’est complètement fou. Vous vous retrouvez prisonnier dans votre hôtel », déplore Michaela Fabiny.

« Tellement désorientés »
Depuis jeudi, l’hébergement est interdit dans toute l’Allemagne pour les habitants venant de zones rouges (définies par un taux d’incidence dépassant les 50 cas pour 100 000 habitants). « Ce n’est même plus la peine d’interdire aux Allemands de voyager. Ils sont déjà tellement désorientés par tous les règlements qu’ils préfèrent rester chez eux », se lamente Stefan Grosse, hôtelier à Munich.

Dans la confusion totale, la Berlinoise Lena Domröse, mère de deux enfants, a annulé la veille son départ un voyage à seulement 80 kilomètres de la capitale. « Nous pensions que c’était une destination sûre pour l’automne, dit-elle. Maintenant, on ne peut même plus quitter notre ville [en zone rouge, ndlr] ! On a fini par réserver une chambre à Berlin même, au bord d’un lac. On n’en peut plus. Il fallait vraiment qu’on bouge ! », dit-elle.

Stéphane Roland intérim à Berlin