Covid-19 (Coronavirus-2019nCoV) et crise sanitaire

L’Humanité - Janssen de Johnson & Johnson : les caractéristiques de ce nouveau vaccin contre le Covid

Mars 2021, par Info santé sécu social

Lundi 15 Mars 2021
Lola Scandella

Il s’agit du quatrième vaccin contre le Covid-19 autorisé en France et le troisième validé par l’OMS. Le sérum développé par le laboratoire américain Johnson & Johnson est le premier à ne nécessiter qu’une seule injection pour contrer le virus. Une donnée qui pourrait changer la campagne vaccinale, à condition que les livraisons arrivent sans encombres.

Et de quatre. Après les vaccins des laboratoires Pfizer, Moderna et AstraZeneca, c’est au tour de celui développé par l’entreprise américaine Johnson & Johnson d’obtenir, jeudi 11 mars, le feu vert de l’Agence européenne des médicaments (EMA) et une autorisation de mise sur le marché conditionnelle. L’EMA effectue parallèlement un examen continu de trois autres sérums : l’américain Novavax, l’allemand CureVac et le russe Spoutnik V. Vendredi, ce fut au tour de la France et de l’Organisation mondiale de la santé de donner leur accord à l’utilisation du vaccin contre de Johnson & Johnson. Il s’agit du quatrième vaccin contre la maladie autorisé en France et le troisième validé par l’OMS.

La dose unique, un avantage pour la campagne vaccinale
C’est un atout de taille, que n’ont pas ses homologues : le vaccin Janssen de Johnson & Johnson ne nécessite qu’une seule injection, contre deux doses espacées de plusieurs semaines pour les autres sérums. Autre avantage, il se conserve jusqu’à 3 mois à 4°C dans des réfrigérateurs standards. « Le fait de n’avoir besoin que d’une injection pourrait changer les choses », estime Odile Launay, infectiologue et coordinatrice de la plateforme Covireivac à l’Inserm (en charge d’étudier les effets des vaccins anticovid), à propos de ce nouveau venu dans la campagne de vaccination. « Il sera beaucoup plus facile d’être vacciné avec ce sérum », ajoute-t-elle.

C’est également l’avis de la Haute autorité de santé (HAS), qui a rendu son avis sur ce vaccin vendredi 12 mars. Il peut « être utilisé à partir de l’âge de 18 ans (…) y compris chez les personnes âgées de 65 ans et plus et/ou présentant des comorbidités, du fait de son efficacité vaccinale et de son profil de tolérance satisfaisant », note l’Autorité.

Elle estime également, compte tenu des facilités de conservation et de l’usage d’une dose unique, qu’il « pourrait être utilisé de manière préférentielle dans des zones géographiques où l’épidémie est particulièrement active et où une accélération de la campagne de vaccination est estimée nécessaire ». C’est le cas par exemple de l’Île-de-France ou des Alpes Maritimes. Elle estime enfin que les caractéristiques du Janssen le « rendent particulièrement adapté pour les publics les plus éloignés du système de santé, les personnes en situation de précarité économique et sociale, et les personnes en situation de handicap ou éprouvant des difficultés pour se déplacer. »

Efficacité contre les formes graves
Ce vaccin use d’une technologie à base de vecteur viral. Il utilise un virus peu virulent pour porter dans les cellules des instructions génétiques d’une partie du SARS-CoV-2, afin de permettre ensuite au système immunitaire de le reconnaître.

Les résultats des essais cliniques, menés sur 40000 personnes de 18 ans et plus dans plusieurs pays dont les États-Unis, le Brésil ou l’Afrique du Sud, font état d’une efficacité de 85% pour empêcher les formes graves de la maladie, et de 66% pour prévenir les modérées à sévères.

« Le vaccin agit sur deux composantes de l’immunité : les anticorps, qui bloquent l’entrée du virus dans les cellules, et la réponse cellulaire, qui va empêcher la dissémination du virus, éliminer les cellules infectées et agir sur les formes graves. C’est tout à fait habituel qu’on ait un impact qui soit plus prononcé vis-à-vis des formes graves », détaille Odile Launay.

Des effets secondaires bénins (maux de tête, douleurs musculaires, fatigues) ont pu être observés lors des essais cliniques. Le vaccin Johnson & Johnson en générerait toutefois « moins » que le sérum d’AstraZeneca selon la chercheuse, qui estime « qu’il sera beaucoup plus facile à accepter par les personnes qui ne se sentent pas forcément directement concernées par le risque de formes graves. »

Un espoir face au variant sud-africain
Les souches mutantes font planer le risque de voir les vaccins perdre en efficacité, ou pire, devenir inopérants face à elles. « Une partie des essais de Johnson & Johnson a été conduite en Afrique du Sud » indique Odile Launay, au moment où la souche mutante était déjà majoritaire dans le pays. Une donnée qui a permis de mesurer la performance du sérum contre le variant. « Le vaccin serait un peu moins efficace mais apporterait une réponse tout à fait acceptable, autour de 60 % », précise l’infectiologue.

« Compte tenu des données disponibles montrant son efficacité persistante sur les variants sud-africains et brésiliens, ce vaccin présente un intérêt particulier dans les zones géographiques où ces souches circulent activement » préconise de son côté la HAS.

Des questions continuent toutefois de se poser autour de la durée de l’immunité. « Une dose de vaccin permet d’induire une très bonne réponse immunitaire, par contre - et comme c’est le cas pour les autres sérums - nous n’avons pas de données sur la persistance de cette immunité et la présence d’anticorps à un niveau élevé », détaille Odile Launay, qui précise que Johnson & Johnson a lancé des essais pour étudier la réponse immunitaire provoquée par l’administration de deux doses au lieu d’une seule.

Problèmes d’approvisionnement en vue
Malgré tous ces avantages, l’apport de ce nouveau vaccin dépendra surtout de la capacité du laboratoire à respecter ses engagements en termes de livraison de doses. Le 28 février sur France 3, la ministre française déléguée à l’Industrie, Agnès Pannier-Runacher, déclarait s’attendre à une première livraison pour « fin mars, début avril ».

Mais dès le 9 mars, Johnson & Johnson faisait part à l’Union européenne de problèmes d’approvisionnement matériels qui risquent de retarder la livraison de 55 millions de doses, promise pour le deuxième trimestre. De quoi compliquer encore la campagne vaccinale française, qui ne s’est pas illustrée pour l’instant par sa rapidité et son organisation, comme en témoignent les déboires des médecins généralistes privés de commandes de nouvelles doses cette semaine.

Agitation autour d’AstraZeneca
Ce vaccin arrive également au moment où une inquiétude monte en Europe à propos du sérum AstraZeneca. Jeudi 11 mars, le Danemark, l’Islande et la Norvège ont décidé de suspendre les injections face à des « cas graves de formation de caillots sanguins chez des personnes vaccinées », a déclaré l’Agence nationale danoise de la Santé, précisant toutefois qu’ « à l’heure actuelle, on ne peut pas conclure à l’existence d’un lien entre le vaccin et les caillots sanguins ». Un principe de « précaution » également invoqué par ses homologues norvégiens et islandais.

De son côté, l’Agence européenne des médicaments a affirmé que le risque de caillot sanguin n’était pas plus élevé chez les personnes vaccinées, estimant que ce vaccin pouvait continuer à être utilisé dans l’attente de résultats d’enquêtes en cours. En France, l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) lui a emboîté le pas vendredi 12 mars, recommandant de poursuivre la vaccination avec ce sérum. « Un cas de thromboses (caillots sanguins) multiples » a été relevé dans l’Hexagone, a-t-elle indiqué, ajoutant que « rien ne permet de conclure que cet effet soit en lien avec le vaccin. »

Lola Scandella