Covid-19 (Coronavirus-2019nCoV) et crise sanitaire

JIM - Contamination chez des vaccinés : une mauvaise nouvelle peut en cacher une bonne

Avril 2021, par Info santé sécu social

Louisville, le vendredi 23 avril 2021

En étudiant un cluster survenu dans une maison de retraite du Kentucky chez des personnes vaccinées, les autorités américaines ont pu mesurer l’efficacité du vaccin Pfizer.

Le vaccin à ARN messager élaboré par la firme allemande BionTech et le laboratoire américain Pfizer est efficace à 94 % contre les formes graves selon les études de phase 3 et des résultats similaires ont été observés dans la population générale. Plus épineuse est la question de sa capacité à empêcher la transmission de la maladie et également son efficacité contre les variants du SARS-Cov-2. Deux questions auxquels une maison de retraite du fin fond du Kentucky aux Etats-Unis pourrait apporter un début de réponse.

Le Center of Disease Control (CDC) publie dans son célèbre bulletin hebdomadaire (MMWR) une étude portant sur un cluster de Covid-19 survenu en mars dernier dans une maison de retraite de cet État du centre des Etats-Unis. Parmi les 79 résidents, 71 étaient complétement vaccinés (90 %), c’est-à-dire qu’ils avaient reçu les deux doses du vaccin Pfizer depuis au moins 14 jours. La proportion était moindre parmi le personnel (comme en France dans les EHPAD), avec 56 personnes vaccinés sur 110 employés (51 %). L’épidémie s’est propagée à partir d’un des soignants de la maison de retraite qui avait refusé de se faire vacciner. Au total, 44 personnes (résidents et personnel) ont été contaminés, 28 ont eu une forme symptomatique, 6 ont dû être hospitalisés, 3 sont décédés (uniquement des résidents). Quatre des 44 personnes contaminées avaient déjà été infectées une première fois.

Moins de contamination et moins de forme grave chez les personnes vaccinées
La comparaison entre les groupes vaccinés et non-vaccinés a permis aux auteurs de l’étude de tirer plusieurs enseignements. D’abord, comme on le savait déjà, la vaccination n’offre pas une protection totale contre la contamination. Ainsi, sur les 122 personnes vaccinés, 22 ont été contaminés (soit 17 %). Mais, comme dans les études de phase 3, la vaccination diminue fortement le risque d’être contaminé (le taux de contamination chez les sujets non vaccinés dans cette étude était de 35,5 % [22 contaminés sur 62 personnes]). Le risque d’être contaminé est donc 3 à 4 fois plus élevé pour les personnes non-vaccinées.

Enfin et surtout, le vaccin protège efficacement contre les formes symptomatiques et graves. Ainsi, sur les 18 résidents vaccinés et contaminés, on ne compte que 6 formes symptomatiques, 2 hospitalisations et 1 décès. Les proportions sont bien plus grandes chez les résidents non vaccinés : sur 6 individus, on compte 5 formes symptomatiques, 4 hospitalisations et 2 décès (toutefois on ne peut exclure que les résidents ayant refusé la vaccination avaient un plus mauvais état de santé que les autres). Les auteurs de cette étude évaluent donc la protection du vaccin Pfizer contre les formes symptomatiques à 86,5 %.

Le vaccin Pfizer serait efficace contre ces variants
Une donnée d’autant plus encourageante qu’après analyse, les médecins ont découvert que les résidents de la maison de retraite avaient été contaminés par un variant portant la mutation E484K censée favoriser la résistante du virus aux vaccins. Le vaccin Pfizer serait donc efficace contre ce type de variant.

L’étude menée dans cette maison de retraite du Kentucky confirme d’autres données recueillis par le CDC. Dans une étude publiée le 21 avril à propos des maisons de retraite de Chicago, les chercheurs américains avaient évalué à seulement 4 % le taux de contamination des sujets ayant été complètement vaccinés. Le CDC en tire la conclusion que la vaccination est efficace et qu’il est plus que nécessaire d’encourager le personnel des maisons de retraite à se faire vacciner.

En France, des clusters similaires ont été détectés ces derniers jours dans des EPHAD de la Creuse chez des sujets vaccinés et contaminés par les variants brésiliens et sud-africain. Parmi eux, deux sont décédés. Mais selon l’ARS de Nouvelle-Aquitaine, il s’agissait de résidents à l’état de santé précaire et très âgés (plus de 90 ans) et il n’y a donc pas lieu pour le moment de remettre en cause l’efficacité du vaccin Pfizer contre ces variants.

Quentin Haroche

RÉFÉRENCE
Cavanaugh A-M et coll. : COVID-19 Outbreak Associated with a SARS-CoV-2 R.1 Lineage Variant in a Skilled Nursing Facility After Vaccination Program — Kentucky, March 2021. MMWR, publication avancée en ligne le 21 avril 2021.