Covid-19 (Coronavirus-2019nCoV) et crise sanitaire

Médiapart - Le passe sanitaire adopté par l’Assemblée nationale

Mai 2021, par Info santé sécu social

LIBERTÉS PUBLIQUES ANALYSE

25 MAI 2021 PAR JÉRÔME HOURDEAUX

Les députés ont voté, mardi soir, le projet de loi de « gestion de la sortie de crise sanitaire » négocié avec les sénateurs. Le passe ne pourra être exigé, théoriquement, que jusqu’au 30 septembre, et ne pourra être vérifié que par des personnes habilitées. La gauche annonce un recours devant le Conseil constitutionnel.

L’Assemblée nationale a adopté, mardi soir, le projet de loi de « gestion de la sortie de crise sanitaire », qui contient notamment le passe sanitaire, par 119 voix contre 51, et 24 abstentions (voir ici le scrutin). Alors qu’un ultime vote est prévu jeudi au Sénat, qui vaudra adoption définitive, le député Éric Coquerel (LFI) a dénoncé un texte qui « pèche tant par son efficacité sur le plan sanitaire que par son autoritarisme ». Avec les communistes et les socialistes, les Insoumis ont déjà annoncé un recours devant le Conseil constitutionnel.

Le texte adopté par l’Assemblée nationale est une version qui a été sensiblement modifiée lors du passage en commission mixte paritaire (CMP), où députés et sénateurs ont négocié. Initialement déposé par le gouvernement, le projet de loi avait déjà été amendé en première lecture par les députés, puis par les sénateurs qui avaient ajouté plusieurs garde-fous à ce nouveau régime d’exception, le 18 mai dernier.

Les deux assemblées ayant voté le texte en des termes différents, celui-ci a ensuite été transmis à une CMP composée de sept députés et sept sénateurs, qui se sont mis d’accord, jeudi 20 mai, sur une version définitive prenant en compte plusieurs des demandes du Sénat.

La CMP n’a cependant pas touché au fond du régime de « gestion de la sortie de crise sanitaire » qui reste un régime comparable à celui qui avait été mis en place entre les 11 juillet et 17 octobre 2020. À compter du 2 juin, l’exécutif disposera, en cas de reprise de l’épidémie, de pouvoirs semblables à ceux de l’état d’urgence sanitaire, sans avoir à proclamer celui-ci, en dehors de celui d’ordonner un confinement général de la population. Le premier ministre pourra ainsi réglementer la circulation des véhicules, des personnes dans l’espace public et dans les transports en commun, et interdire ou limiter les manifestations ou rassemblements.

Les parlementaires ont cependant réduit la durée de ce régime transitoire qui prendra fin le 30 septembre, et non le 31 octobre comme prévu initialement.

Députés et sénateurs se sont également opposés au gouvernement qui souhaitait que les préfets puissent décréter des reconfinements locaux pour une durée de deux mois. Tout reconfinement ne pourra excéder un mois et ne pourra être renouvelé sans l’accord du Parlement.

À la demande des sénateurs, les dispositions permettant au gouvernement de décréter un couvre-feu ont été exclues du régime de sortie de l’état d’urgence. Le gouvernement pourra le maintenir entre 21 heures et 6 heures jusqu’au 9 juin, puis de 23 heures jusque 6 heures jusqu’au 30 juin, date à laquelle il devra prendre fin.

La CMP a enfin accepté d’introduire plusieurs garde-fous au projet de passe sanitaire, proposés par les sénateurs afin de répondre à plusieurs critiques émises par la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) dans son avis sur le projet de loi. Ce passe ne pourra être exigé qu’à l’entrée « de grands rassemblements de personnes pour des activités de loisirs ou des foires ou salons professionnels ».

Alors que le gouvernement a évoqué la jauge de 1 000 personnes pour caractériser un « grand rassemblement », le projet de loi précise que « cette réglementation est appliquée en prenant en compte une densité adaptée aux caractéristiques des lieux, établissements ou événements concernés, y compris en extérieur ».

Les preuves de non-contamination – test négatif, attestation de vaccination ou d’immunité –, pourront être fournies en format papier ou numérique, via l’application TousAntiCovid.

Autre ajout des sénateurs, les vérifications ne pourront être effectuées que par une personne spécialement habilitée aux contrôles. Les données ne pourront pas être conservées par les organisateurs.

Dans un avis publié vendredi 21 mai, la Défenseure des droits, Claire Hédon, s’est félicitée de l’intégration par la CMP de certains demandes du Sénat, « dont certaines vont dans le sens des recommandations de la Défenseure des droits ». Elle a toutefois rappelé certaines inquiétudes restées sans réponse.

Ainsi, le texte ne dit pas si le passe sanitaire s’appliquera aux enfants que la Défenseure des droits aurait souhaité voir exclus. Elle estime également que le texte ne précise pas assez les obligations « des professionnels et des bénévoles œuvrant dans les lieux et les établissements accueillant du public, ce qui peut soulever des risques de discrimination ». Enfin, la Défenseure des droits s’inquiète de la question de « la durée de validité du « passe sanitaire » en cas d’immunité reconnue après une infection à la Covid-19 ».

Dans son avis, la Cnil alertait également « sur le risque de provoquer un phénomène d’accoutumance » et d’une pérennisation du dispositif de passe sanitaire pour d’autres maladies. Si le projet de loi actuel prévoit que celui-ci disparaitra le 30 septembre 2021, la question fut tout de même posée lors de la réunion de la CMP.

« Les rapporteurs peuvent-ils nous confirmer que le passe sanitaire n’existera plus au-delà du 30 septembre 2021 ?, a interrogé le sénateur centriste Philippe Bonnecarrère. Chacune de nos deux assemblées est-elle bien déterminée à s’opposer à toute prorogation ? Nous avons en effet été échaudés : les engagements pris sur les données – fichiers autonomes et indépendants, à durée de vie très limitée –, n’ont pas été tenus… », a-t-il rappelé.

« Oui le passe sanitaire est un dispositif temporaire qui s’éteindra au 30 septembre prochain, lui a répondu Philippe Bas, rapporteur du texte pour le Sénat. Avant d’ajouter : « Sauf bien entendu si le législateur a décidé de le proroger… »

Désormais voté par les députés, le projet de loi doit être définitivement avalisé par les sénateurs jeudi prochain.

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Le projet de loi de « gestion de la sortie crise sanitaire » a été sensiblement modifié mardi 18 mai par les sénateurs qui ont tenté d’introduire quelques garanties supplémentaires au dispositif devant prendre le relai de l’état d’urgence sanitaire à compter du 2 juin.

Déjà adopté par l’Assemblée nationale en première lecture, ce projet de loi vise, comme l’avait détaillé Mediapart, à instaurer un régime d’exception transitoire succédant à l’état d’urgence sanitaire en vigueur depuis le 17 octobre 2020 et qui doit prendre fin le 1er juin.

Sous ce régime, semblable à celui qui avait été mis en place entre les 11 juillet et 17 octobre 2020, l’exécutif disposera, en cas de reprise de l’épidémie, de pouvoirs semblables à ceux de l’état d’urgence sanitaire, sans avoir à proclamer celle-ci, en dehors de celui d’ordonner un confinement général de la population. Le premier ministre pourra ainsi réglementer la circulation des véhicules, des personnes dans l’espace public et dans les transports en commun et interdire ou limiter les manifestations ou rassemblements.

Il prolonge par ailleurs certains dispositions dérogatoires au code du travail et aides aux entreprises exceptionnelles mises en places durant l’état d’urgence.

Au Sénat, dominé par la droite et le centre, des élus de tous bords ont dénoncé cette vraie-fausse sortie de l’état d’urgence. « Sans le dire, le Parlement est donc invité à reconduire après le 1er juin et jusqu’au 1er octobre prochain l’autorisation données au gouvernement d’exercer la quasi-totalité des pouvoirs » de l’état d’urgence sanitaire, dénonce ainsi le rapport de la commission des lois du Sénat rédigé par le sénateur Les Républicains Philippe Bas. « La commission des lois ne peut que dénoncer cette manière de faire, poursuit-il. Le nouveau régime de pouvoirs exceptionnels, dit de « gestion de la sortie de l’état d’urgence sanitaire » que le gouvernement souhaite mettre en place paraît plus facile à faire accepter à nos concitoyens que le maintien de l’état d’urgence sanitaire. Hormis cet avantage, ce projet de loi ne répond à aucune nécessité juridique. Il est de pur affichage. »

« Soit nous gardons les mesures de l’état d’urgence, comme le propose le gouvernement, et ça s’appelle l’état d’urgence. Soit on sort de l’état d’urgence mais on écarte les mesures que l’on veut nous proposer », a également attaqué, mardi 18 mai lors des débats, le sénateur centriste Philippe Bonnecarrère. « Ce texte est, en fait, un trompe-l’œil », a de son côté déclaré la sénatrice socialiste Marie-Pierre de la Gontrie. « Ce n’est pas vraiment une sortie de l’état d’urgence. »

Pour « mettre un peu d’ordre » dans ce dispositif, selon le rapporteur Philippe Bas, le Sénat a adopté un amendement prolongeant l’état d’urgence sanitaire jusqu’au 30 juin, et réduisant la durée de la période transitoire au 15 septembre.

Les sénateurs ont également supprimé une disposition qui permettait au gouvernement de prononcer un reconfinement d’une zone géographique déterminée en cas de reprise de l’épidémie. Dans la version actuelle du texte, il devrait décréter un nouvel état d’urgence.

Mais une bonne partie des débats ont tourné autour de la principale innovation de ce projet de loi : la mise en place du passe sanitaire qui pourra être réclamé à l’entrée d’événements accueillant plus de 1 000 personnes afin de vérifier qu’une personne n’est pas contaminée, c’est-à-dire soit vaccinée soit testée négative, soit immunisée.

Dans un avis publié mercredi 12 mai, la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) avait validé le principe d’un passe sanitaire, tout en alertant sur les dangers inhérents à ce type de solution et en formulant une série de recommandations au gouvernement.

Mais en premier lieu, la Cnil avait regretté avoir à se prononcer sur un sujet aussi complexe et impactant « en extrême urgence », « dans un délai aussi bref, et postérieurement aux débats intervenus en première lecture à l’Assemblée nationale », quelques jours auparavant.

Si la Commission n’a pas été saisie plus tôt, c’est grâce à un tour de passe-passe du gouvernement. Le passe sanitaire a en effet été introduit après le dépôt du projet de loi, via un amendement du gouvernement. « Un tel dispositif, inédit depuis l’intervention de la loi du 6 janvier 1978 », la loi « Informatique et liberté » ayant donné naissance à la Cnil, « aurait mérité un temps de réflexion plus long, à travers un projet de loi soumis à son examen et à celui du conseil d’État, ce qui aurait été possible, le principe ayant été évoqué de longue date. »

De même, alors que la Cnil réclamait plusieurs précisions, notamment sur les lieux qui pourront ou non réclamer un passe sanitaire, le gouvernement lui a répondu que celles-ci seront fixées « par voie réglementaire », et non par une loi. « Le seuil de fréquentation minimal au-delà duquel le passe sanitaire pourrait être mis en œuvre et les modalités d’évaluation de celui-ci, devraient être également encadrées par voie législative », estime la Cnil.

Afin de répondre à cette critique, le gouvernement a précisé, sur son site le 10 mai, certaines modalités et réaffirmant que le passe sanitaire ne pourra être exigé que dans les lieux accueillant plus « de 1 000 personnes, dans le respect par ailleurs des jauges limites (5 000 personnes du 9 au 30 juin) ». Il s’engage à définir « précisément (…) par voie réglementaire » les lieux et événements qui seront concernés. Y figureront les salles accueillant des spectacles culturels ou sportifs, les théâtres, les salles de conférences, les halles d’expositions accueillant des foires ou salons, les stades, les parcs à thèmes lorsqu’ils disposent par exemple d’un restaurant, les festivals, les croisières ou encore les bals.

Le gouvernement précise par ailleurs que le passe ne sera pas demandé lors de certains événements difficiles à encadrer. « Il semble difficile par exemple de l’exiger pour les personnes qui seraient stationnées au bord des routes pour regarder le feu d’artifice du 14 juillet », explique-t-il.

Le projet de loi précise que les preuves de non-contamination pourront être présentées sous forme numérique, intégrées à l’application TousAntiCovid, ou sous format papier. Lors de leur examen du texte en première lecture, les députés ont voulu fermer la porte à toute utilisation du passe sanitaire autre que dans le cadre de grands rassemblements en précisant que « nul ne peut exiger la présentation des documents mentionnés […] pour l’accès à d’autres lieux, établissements ou événements que ceux mentionnés ».

« Il ne s’agit pas de fliquer les gens, de montrer un pedigree, d’installer dans la durée la nécessité de montrer qu’on est protégé contre le virus, mais de permettre de rouvrir des événements qui, sinon, ne pourraient pas se tenir », a assuré devant les sénateurs le ministre de la santé Olivier Véran.

Des précautions jugées insuffisantes par les sénateurs qui ont ajouté plusieurs garde-fous. Ils ont ainsi adopté un amendement socialiste précisant que les contrôles des passeports sanitaires et des passes sanitaires devaient être réalisés exclusivement par des « personnes habilitées et nommément désignées » dans des conditions fixées « par le représentant de l’État dans le département ».

Un autre amendement prévoit de punir d’un an de prison et de 45 000 euros d’amende l’utilisation frauduleuse de données collectées dans le cadre du passe sanitaire ainsi que le fait d’exiger un passe sanitaire en dehors des conditions fixées par la loi.

La question des QR codes
Cet encadrement satisfait, tout du moins sur la forme, le professeur de droit public, spécialiste des droits fondamentaux, Serge Slama. « Ça me semble acceptable pour sortir de la crise », explique-t-il à Mediapart. « Il s’agit de retrouver certaines activités collectives qui sont interdites et de retourner dans des lieux fermés, poursuit-il. De plus, pour l’instant, il n’y a pas assez de personnes vaccinées et il y a encore des questions sur les effets des vaccins sur la circulation du virus. Le but est donc aussi d’éviter une quatrième vague. Et les tests sont gratuits et les vaccins commencent à être accessibles à tous. »

Mais pour Serge Slama, le problème n’est pas tant l’organisation du dispositif actuel que le risque de sa pérennisation. « Il manque une garantie sur la durée, pointe-t-il. Si, au mois de septembre, le virus circule à nouveau, rien ne nous dit que l’état d’urgence ne sera pas réactivé. » « Ce n’est cadré par le texte et c’est une crainte que nous avons tous, reprend le juriste. C’est une première qui risque d’en inspirer d’autres dans le futur. Il y a un vrai danger. »

Une crainte partagée par la Cnil qui, dans son avis, alertait « sur le risque de provoquer un phénomène d’accoutumance préjudiciable qui pourrait conduire à justifier, par exemple, que l’accès d’un cinéma soit conditionné à la preuve que la personne n’est pas porteuse de certaines pathologies, autres que la Covid ».

Ces craintes ont été relayées par plusieurs sénateurs, dont le centriste Loïc Hervé. « Pour une des premières fois dans notre histoire, nous allons, pour l’exercice de libertés publiques du quotidien, devoir justifier de notre état de santé », a-t-il déclaré. « Ceux qui pensent que le passe sanitaire va nous permettre de reconquérir des libertés, de mon point de vue, se trompent, puisque le passe sanitaire est une nouvelle contrainte. »

« Dans cet hémicycle, personne ne sait où nous en serons le 15 septembre en terme de situation sanitaire », a poursuivit le sénateur évoquant le risque d’une quatrième vague qui justifierait la prorogation du passe sanitaire. « À partir de ce moment-là, on aura alors basculé dans une société de surveillance généralisée », a-t-il averti.

Interrogée sur la chaîne Public Sénat, la constitutionnaliste Lauréline Fontaine a de son côté pointé un problème fondamental induit par l’existence même d’un passe sanitaire. « On nous dit que c’est pour renforcer la liberté de mouvements. (…) On n’en est plus à une justification des restrictions des libertés, on a complètement changé de bord, a-t-elle pointé. C’est-à-dire qu’on en est à concevoir les libertés d’une toute autre manière. (…) On acquiert sa liberté à partir du moment où on est vacciné. Or, les droits étant considérés à la base comme naturels et imprescriptibles, cela signifierait en quelque sorte que on est vacciné, ou alors on n’a pas de droit ».

Au-delà des questions de libertés publiques, le passe sanitaire implique également de nombreux enjeux en terme de sécurité informatique et de protection des données. L’expert judiciaire et blogueur signant sous le pseudonyme de Zythom alerte ainsi sur les dangers liés à l’utilisation des QR codes, une technologie au cœur dispositif de passe sanitaire, utilisée sur les résultats de tests, dans l’application TousAntiCovid ou encore à l’entrée des établissements.

Car, comme il l’explique à Mediapart, ce QR codes comporte potentiellement de nombreuses informations. « Le QR code est un type de code-barres bidimensionnel qui représente l’information à l’aide d’une grille de pixels, là où le code-barres classique utilise des barres et des espaces d’épaisseur variable. Un QR code peut stocker plus de 4 000 caractères alphanumériques, bien plus que la capacité du code-barres classique (de 10 à 13 caractères) », explique Zythom.

« Dans le cas du passe sanitaire français, le souhait du gouvernement est d’encourager les utilisateurs à centraliser les différentes informations au sein d’une application unique (controversée) TousAntiCovid, détaille-t-il. Trois transferts sont possibles vers le smartphone : le certificat de test virologique négatif (test RT-PCR et test antigénique), le certificat de rétablissement de la Covid-19 et l’attestation certifiée de vaccination. L’application TousAntiCovid devrait générer un QR code contenant ces informations, QR code à présenter pour entrer dans les lieux publics recevant un grand nombre de personnes. »

Afficher une photo de son résultat de test, avec le QR Code visible, comme certaines personnes ont pu le faire sur les réseaux sociaux, entraîne ainsi un risque de dévoiler des données personnelles. « Le principal défaut d’un QR code est que les humains ne les lisent pas facilement : il faut un appareil ou une application pour les déchiffrer, reprend Zythom. Le risque quand on publie un QR code est donc de ne pas savoir ce que l’on publie (sauf si l’on a vérifié avant). L’utilisateur imprudent a l’impression de publier une image, alors qu’il publie de l’information potentiellement confidentielle. Certains QR codes contiennent des informations telles que des codes d’annulation de billets d’avion, des codes individuels d’accès à un concert ou à une zone réservée. Dans le cas du passe sanitaire, il s’agit d’informations relatives à sa santé. »

Le QR code est également une technologie facile à imiter et donc à détourner. « Il est très facile de générer un QR code, de nombreuses applications le permettent, pointe l’expert judiciaire. Si les personnes publient des QR codes sur les réseaux, il devient facile de les récupérer pour fabriquer un faux et falsifier un document officiel. »

De même, il est relativement facile d’installer des QR codes dans l’espace public afin de duper les utilisateurs, comme l’a par exemple fait un militant anti-vaccin en Australie. « De la même manière qu’il ne faut pas mettre une clef USB inconnue dans son ordinateur, il ne faut pas flasher les QR codes à tout-va, avertit Zythom. Il s’agit de faire une estimation de la confiance que vous avez et du risque que vous prenez. Malheureusement, beaucoup de gens font trop confiance et n’ont pas conscience des risques. Cela fait le lit des pirates. Imaginez l’impact d’un QR code malicieux placé près d’une zone souvent prise en photo. »

D’une manière générale, Zythom juge que « l’application TousAntiCovid est mal conçue : elle n’est pas compatible au niveau européen, donc les touristes en sont exclus, elle est basée sur une technologie dont les informaticiens ont immédiatement indiqué qu’elle serait inefficace, elle coûte très cher au contribuable pour un résultat minime, elle collecte des données personnelles sensibles (les personnes que l’on rencontre), elle ne prend pas en compte les personnes n’ayant pas de smartphone... Bref, je ne recommande pas l’utilisation de cette application – mais chacun fait ce qu’il veut. »
« On peut scanner ses papiers et certificats en les prenant en photo, c’est plus pratique, conseille-t-il. Idem pour les anciennes attestations de déplacement : un simple lien suffisait pour les remplir et les conserver au format pdf sur son téléphone. Les seuls conseils de sécurité informatique que je me sens capable de donner sont les suivants : soyez curieux du fonctionnement des technologies, essayez de les comprendre vous-mêmes, démontez les appareils, méfiez-vous des raisonnements simplistes ou alarmistes, ne donnez pas votre confiance éternellement (à un dispositif, à une personne politique...), soyez critique et autocritique, méfiez-vous des systèmes trop automatiques, et surtout ne soyez pas trop naïfs. Concernant les QR codes, utilisez de préférence une application qui se contente de les déchiffrer et de vous afficher leur contenu. Vous pourrez faire un copier-coller ensuite dans l’application appropriée, en toute connaissance de cause. »

Le gouvernement ayant déclaré l’urgence sur le projet de loi de gestion de sortie de la crise sanitaire, le texte doit maintenant être examiné en deuxième lecture par l’Assemblée. Si les députés ne valident pas les modifications apportées par les sénateurs, le projet de loi sera examiné par une commission mixte paritaire chargée de trouver un compromis, l’Assemblée nationale ayant le dernier mot.