Covid-19 (Coronavirus-2019nCoV) et crise sanitaire

Libération - Port du masque : quinze mois de va-et-vient réglementaires

Juin 2021, par Info santé sécu social

Des dénégations gouvernementales à la généralisation, les directives concernant le port du masque ont bien changé depuis mars 2020.

par Julie Richard
publié le 15 juin 2021 à 3h36

Les recommandations du directeur général de la santé, Jérôme Salomon, sur la fin probable du port du masque vont-elles acter la fin d’une année plus que sinueuse de politiques émanant des autorités sanitaires ? Au départ considéré comme un accessoire « inutile » pour lutter contre la pandémie, il est devenu la « pierre angulaire » de la protection des individus face au Covid-19. Ces quinze derniers mois, les autorités sanitaires ont ballotté les Français de mesure en mesure, quitte à se contredire.

13 mars 2020 : « Totalement inutile dans la rue »
Au début de la pandémie, le masque est loin d’être la priorité pour lutter contre la propagation du virus. Considéré comme « inutile » à moins d’être cas contact, soignant ou contaminé, son usage pour la population est fortement désapprouvé par l’exécutif en pleine pénurie de masques, notamment les FFP2. « Le port du masque en population générale dans la rue, ça ne sert à rien », martelait le 13 mars 2020 le Premier ministre, Edouard Philippe, au JT de TFI. « C’est une ressource précieuse pour les soignants et totalement inutile pour toute personne dans la rue », ajoutait de son côté Jérôme Salomon, directeur général de la Santé lors d’un point presse sur l’avancée de l’épidémie le 18 mars. Deux jours plus tard, dans une interview, Sibeth Ndiaye, alors porte-parole du gouvernement, pousse un peu plus loin la stratégie de découragement : « Moi, je ne sais pas utiliser un masque », avait-elle affirmé au micro de BFM TV avant de mettre en garde sur les conséquences d’une mauvaise utilisation de celui-ci. Une réplique qui lui avait valu, à l’époque, quelques moqueries.

28 avril 2020 : « Pierre angulaire de la protection dans les transports »

A peine un mois plus tard, le gouvernement change de stratégie. Désormais, le masque est utile voire nécessaire pour lutter efficacement contre l’épidémie. Lors d’une allocution le 28 avril, le Premier ministre présente ses six grands axes de sortie du confinement. A partir du 11 mai, il devient obligatoire dans les transports en commun pour les personnes de 11 ans et plus sous peine de 135 euros d’amende. Il sera « également obligatoire dans les taxis et les VTC qui ne disposent pas de protection en plexiglas ». Interrogé le 22 juin au micro de RTL, le secrétaire d’Etat chargé des Transports, Jean-Baptiste Djebbari, appelle à une grande fermeté face au non-respect de cette obligation, même en cas de forte chaleur. « C’est la pierre angulaire de la protection dans les transports », se justifie-t-il alors.

20 juillet 2020 : obligatoire dans tous les lieux publics clos
Face à la progression du virus, l’Etat serre la vis fin juillet et étend le port du masque aux lieux publics clos. Alors que celui-ci était déjà nécessaire pour entrer dans les musées, cinémas, restaurants et autres établissements relevant des catégories listées par l’arrêté du 25 juin 1980, il est désormais obligatoire dans les supermarchés, centre commerciaux, banques et marchés couverts. Initialement prévue le 1er août, l’entrée en vigueur de la mesure est avancée au 20 juillet après que de nombreux médecins ont alerté sur des « signaux faibles » de reprise de l’épidémie. Dans une tribune publiée par Libé le 12 juillet, ceux-ci faisaient part de leur inquiétude quant au risque de transmission du virus par aérosol, qui rendait alors « évidente l’obligation du port du masque pour la fréquentation de tous les lieux fermés publics, voire privés ».

3 août 2020 : multiplication des arrêtés préfectoraux

Début août, le gouvernement franchit un cap supplémentaire en imposant le masque dans la rue. Mais loin de généraliser cette obligation dans les villes, le gouvernement laisse aux préfets de chaque métropole le soin de décider quelles rues seront concernées. A partir du 3 août, les arrêtés préfectoraux se multiplient à Nice, Tours, Saint-Brieuc ou encore Annecy, imposant de « sortir couvert » dans certaines artères. A Lille par exemple, le préfet du Nord annonce que le port du masque est désormais obligatoire dans « un certain nombre de zones » de la métropole comme les rues très fréquentées, les espaces piétons, les abords des gares et les parcs. A Paris, la préfecture impose dès le 10 août le port du masque dans les brocantes, marchés en plein air et parcs avant de l’élargir une semaine plus tard à certaines zones de Paris (Champs-Elysées, Batignolles…). Le 28 août, le casse-tête prend fin : le nouveau Premier ministre, Jean Castex, généralise le port du masque dans toute la ville.

28 janvier 2021 : les masques artisanaux déconseillés
Encouragé en début de pandémie, l’usage des masques artisanaux a subi un bref coup d’arrêt mi-janvier. Face à la menace des nouveaux variants, le Haut Conseil de santé publique (HCSP) recommande dans un avis publié le 18 janvier de favoriser désormais les masques en tissu réutilisables de catégorie 1, filtrant à plus de 90%, ainsi que les masques chirurgicaux, jugés encore plus efficaces. « Le HCSP recommande aux Français, et c’est la recommandation que je leur fais également, de ne plus utiliser le masque artisanal qu’on a fabriqué chez soi », a confirmé une semaine plus tard le ministre de la Santé, Olivier Véran, invité sur le plateau de TF1. Depuis le 28 janvier 2021, les masques faits maison en tissu ou les masques grand public de catégorie 2 ne sont pas interdits, mais ils ne peuvent plus être portés en entreprise ou à l’école.