Covid-19 (Coronavirus-2019nCoV) et crise sanitaire

Le Monde.fr Covid-19 : le variant Delta et le ralentissement de la vaccination inquiètent l’exécutif

Juin 2021, par infosecusanté

Le Monde.fr Covid-19 : le variant Delta et le ralentissement de la vaccination inquiètent l’exécutif

L’hypothèse d’une reprise épidémique à l’automne alerte le gouvernement, qui réfléchit à des moyens de relancer la campagne vaccinale.

Par Olivier Faye

Publié le 30/06/2021

L’inquiétude sourd dans les rangs de l’exécutif : le Covid-19 n’est pas mort. Seulement affaibli. Depuis le lancement du déconfinement, début mai, Emmanuel Macron veut oublier l’épidémie, soucieux de « tourner la page de ce moment de la vie de la nation » et de relancer le train des réformes avant l’élection présidentielle de 2022.

Mais la progression du variant Delta dans une grande partie du monde, France comprise, laisse planer une ombre sur l’optimisme du chef de l’Etat. Et si une quatrième vague frappait à la rentrée, comme en 2020, après avoir cru l’espace d’un été au retour à la vie normale ? « C’est une possibilité », prévient un poids lourd du gouvernement. Le ralentissement de la campagne vaccinale n’éclaircit pas les perspectives. « La crise sanitaire n’est pas terminée », a alerté le premier ministre, Jean Castex, mardi 29 juin, à la veille de la fin des jauges dans les commerces et les restaurants. La possible quatrième vague devrait être « beaucoup plus nuancée que les trois premières parce qu’on a un niveau de vaccination qui n’est pas du tout le même, a estimé Jean-François Delfraissy, le président du Conseil scientifique, sur France Inter le 30 juin. On doit se souvenir de l’été dernier. On était à des chiffres à peu près comparables fin juin 2020, et on a vu la deuxième vague arriver à partir du mois de septembre ».

Véran : « Humilité et vigilance »
Pour l’heure, les conséquences du variant Delta se lisent plutôt à l’étranger. La Russie bat des records de mortalité. Le Royaume-Uni a retardé la dernière étape de son déconfinement, tout comme certains pays d’Asie. L’Australie, pour sa part, cloître de nouveau chez elle une partie de sa population.

En France, ce variant, « très contagieux », dixit le ministre de la santé, Olivier Véran, gagne du terrain et représente désormais 20 % des nouveaux cas diagnostiqués. Pour autant, il ne gonfle pas encore le nombre de malades. Ce dernier est même en baisse depuis avril, avec en moyenne moins de 2 000 cas positifs répertoriés chaque jour. L’exemple britannique, néanmoins, qui a vu naître une reprise de l’épidémie malgré une couverture vaccinale plus étendue, invite « à l’humilité et à la vigilance », a reconnu M. Véran, mardi, sur Franceinfo.

L’inquiétude a contribué à faire dévisser les Bourses européennes, lundi, tout comme le cours de l’euro, ou celui du prix du baril de pétrole. « Il reste un risque sanitaire, a alerté le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, sur la chaîne CNews. Le seul obstacle qu’il y a encore sur le chemin du retour à une croissance très forte en 2021 et le retour à la normale totale au début 2022, c’est le risque du variant. » En conséquence, le patron de Bercy a lancé un appel à la population : « Vaccinez-vous ! C’est notre sécurité sanitaire collective qui en dépend. »

Un Français sur deux, pour l’heure, a reçu une première injection, soit 33,5 millions de personnes. Le gouvernement s’est fixé pour objectif d’atteindre le chiffre de 40 millions à la fin de l’été. Mais la campagne fléchit dangereusement, avec un nombre de premières injections orienté à la baisse depuis plusieurs semaines.

« Incertitudes »
« Nous voyons que la vaccination marque le pas. Nous devons nous mobiliser pour faire comprendre à nos concitoyens qu’elle est la voie de sortie de cette crise sanitaire », a reconnu le premier ministre, Jean Castex, lors des questions au gouvernement à l’Assemblée nationale.

Selon un communiqué de l’Académie de médecine du 23 juin, la campagne de vaccination, telle que menée aujourd’hui, rend « improbable l’accession au taux de couverture vaccinale de 80 % de la population au mois d’octobre, c’est-à-dire au niveau d’immunité collective nécessaire pour éviter une recrudescence de l’épidémie au quatrième trimestre ».

L’Institut Pasteur, pour sa part, alerte sur le « risque de nouvelles mesures de contrôle en milieu scolaire » en cas de reprise épidémique à l’automne, car les enfants et adolescents « devraient être peu vaccinés ». Face à ces « incertitudes », la maire socialiste de Lille, Martine Aubry, a annoncé l’annulation de la grande braderie prévue dans sa ville début septembre.

Afin d’éviter un scénario noir, l’exécutif est amené à mettre la pression sur la population et à lui faciliter l’accès au vaccin. L’espacement entre deux doses peut ainsi être allongé ou raccourci, de 21 à 49 jours, pour ne pas compliquer les vacances d’été. Des barnums seront installés près des lieux de rassemblement afin de pouvoir bénéficier d’un vaccin sans prise de rendez-vous. « Nous allons envoyer des courriers, des SMS, lancer des appels aux personnes les plus éloignées de la vaccination, ajoute-t-on au ministère de la santé. L’information passera aussi par les professionnels de santé. »

« La bataille se gagne maintenant »
Olivier Véran est ainsi favorable à ce que la liste des personnes vaccinées soit transmise aux médecins – une hypothèse actuellement étudiée par la Commission nationale de l’informatique et des libertés.

« La bataille se gagne maintenant, a estimé le ministre. Les Français ne comprendraient pas qu’on soit amenés à se poser la question de refermer restaurants et commerces parce que 20 % d’entre eux auraient fait le choix de ne pas se vacciner. » Ce dernier s’est dit « ouvert à la discussion » afin de rendre payants les « tests [PCR] de confort », parfois utilisés pour échapper au vaccin.

Si la vaccination des soignants pourrait être rendue obligatoire en septembre dans l’hypothèse d’une trop faible couverture, cela ne devrait pas concerner l’ensemble de la population. Trop risqué du point de vue politique, juge-t-on au sommet de l’Etat. « Vous créeriez des problèmes de société majeurs, estime un ministre. Vous auriez des résistances au plus profond de l’intimité des gens à côté desquelles la réforme des retraites ne serait rien. C’est digne de la conversion obligatoire des protestants au catholicisme. » A moins d’un an de l’élection présidentielle, Emmanuel Macron n’a pas besoin de créer une guerre de religions.