Covid-19 (Coronavirus-2019nCoV) et crise sanitaire

Le Monde.fr : Covid-19 : le gouvernement cherche le bon dosage pour accroître la vaccination

Juillet 2021, par infosecusanté

Le Monde.fr : Covid-19 : le gouvernement cherche le bon dosage pour accroître la vaccination

Face à la progression du variant Delta, l’exécutif s’oriente vers la vaccination obligatoire des soignants et réfléchit à de nouvelles incitations (tests payants, extension du passe sanitaire) pour l’ensemble de la population.

Par Alexandre Lemarié

Publié le 06/07/2021

Le refrain est connu. Après plusieurs semaines de nette amélioration sur le front sanitaire, l’exécutif renoue avec un ton alarmiste. « Il y a des motifs d’inquiétude », a reconnu le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal, lundi 5 juillet, sur France Inter, en prévenant qu’une quatrième vague de la pandémie de Covid-19 dès la fin juillet est « une possibilité ».

« Depuis un peu moins d’une semaine, l’épidémie regagne du terrain très rapidement », a-t-il expliqué, en raison de la progression du variant Delta, présenté comme « très contagieux » et « particulièrement inquiétant ». Car s’il représente désormais près d’un tiers des nouvelles contaminations dans le pays, le nombre de personnes atteintes de ce variant venu d’Inde « double presque chaque semaine », a souligné M. Attal.

Une mise en garde qui confirme celle du ministre de la santé, Olivier Véran, la veille. « Depuis cinq jours, le virus ne baisse plus, il réaugmente. (…) L’exemple anglais montre qu’une vague est possible dès la fin juillet », a-t-il écrit sur Twitter. Le 2 juillet, M. Véran avait déjà sonné l’alerte, en évoquant « une menace réelle, qui pourrait venir gâcher nos vacances et gâcher l’été ». De quoi doucher l’espoir d’un retour durable à une vie normale.

L’augmentation récente du nombre d’infections suscite des sueurs froides au sommet de l’Etat. Car si le variant Delta progresse, la France reste loin d’avoir atteint une forme d’immunité collective. Pour l’instant, un peu plus de la moitié de la population a reçu une injection, et seul un tiers est complètement vacciné.

Vacciner davantage de personnes
Pour éviter un regain de la pression hospitalière d’ici à quelques semaines, les autorités répètent la nécessité de vacciner davantage. « Nous devons aller encore plus vite. C’est une course contre la montre qui se joue », a insisté M. Véran, dimanche, en rappelant que les vaccins « font chuter le risque de forme grave, y compris avec le variant Delta ». « L’équation est simple : plus il y aura de gens vaccinés, moins la vague sera puissante », résume un proche d’Emmanuel Macron.

Reste à convaincre les personnes n’ayant encore reçu aucune dose de franchir le pas. Quitte à contraindre certaines catégories. Alors que le rythme des primo-injections ralentit, la progression rapide du variant Delta a poussé l’exécutif à remettre sur la table la question de l’obligation vaccinale des soignants.

Vaccination Covid-19 : suivez la progression de la campagne
Pour le moment, les chiffres restent très bas : seuls 57 % des soignants sont vaccinés dans les établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), et 64 % à l’hôpital, selon la Fédération hospitalière de France. Loin du taux de 98 % atteint en Italie, où la vaccination est obligatoire pour cette catégorie de personnes.

Ce sujet sera au cœur des consultations que mène le premier ministre, Jean Castex, à partir de lundi, avec les chefs de file du Parlement, avant de s’entretenir avec les représentants d’associations d’élus, jeudi. Si un consensus se dégage, un projet de loi pourrait être présenté dans les semaines à venir, afin d’être adopté au Parlement avant la fin juillet.

Si la décision n’est pas encore actée, le gouvernement semble bel et bien s’orienter vers la voie de la contrainte. « Bien sûr, il faut le faire », a estimé Alain Fischer, le président du conseil d’orientation de la stratégie vaccinale, lundi 5 juillet sur Franceinfo, en soulignant que « le temps est arrivé » d’obliger les soignants à se faire vacciner. « Les soignants doivent se protéger eux-mêmes, mais ils doivent aussi protéger leurs patients », a-t-il argumenté.

Pas question de perdre de temps
Le ministre de la santé y est lui aussi désormais favorable. Etant donné la dégradation de la situation sanitaire, pas question de perdre de temps. M. Véran a fait part de son souhait de voir un texte être adopté « le plus tôt possible ». « Les soignants, qui sont en contact avec des publics fragiles, peuvent se faire vacciner depuis janvier, rappelle son entourage. On est dans l’incitation depuis plus de six mois, il est temps de passer à l’étape suivante. »

La pression monte dans ce sens. Une centaine de médecins ont demandé au gouvernement de rendre cette obligation effective « avant le début du mois de septembre », dans une tribune publiée sur le site du Journal du dimanche. Le sujet doit également être abordé mardi à l’Elysée, lors du sommet social autour d’Emmanuel Macron.

La veille, le secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez, a déclaré qu’il n’était « pas favorable » à la vaccination obligatoire des soignants, expliquant qu’il préférait « convaincre plutôt que contraindre ». Une position à rebours de celle des patrons du Medef et de la CFDT, Geoffroy Roux de Bézieux et Laurent Berger, qui ont même plaidé en faveur d’une vaccination des salariés au contact du public.

Le patron du MoDem, François Bayrou, a été encore plus loin, en se disant en faveur d’une vaccination obligatoire pour toute la population. Sur le modèle des « onze vaccinations qu’on donne au bébé à la naissance », a argumenté ce proche du chef de l’Etat, dimanche, sur RTL.

Une orientation à laquelle se refuse, pour l’heure, le gouvernement. « La question de la vaccination obligatoire pour l’ensemble de la population, à ce stade, ne se pose pas », a indiqué M. Attal, même s’il a appris « à ne jamais rien exclure pour l’avenir par principe ». « Nous ne contraindrons pas les Français à se faire vacciner », a confirmé M. Véran. Cette option étant jugée impossible à mettre en œuvre. « A la fin, on ne pourra de toute façon pas envoyer les gendarmes pour aller chercher les gens chez eux », balaie un proche de M. Macron.

Un système d’incitation fort
A la place, l’exécutif réfléchit à la mise en œuvre d’un système d’incitation suffisamment fort, afin de pousser les récalcitrants à se faire vacciner.

A terme, les tests « pour convenances personnelles », afin de se rendre en discothèque ou pour voyager par exemple, pourraient ainsi ne plus être gratuits pour les personnes qui refusent de se faire vacciner. « C’est une piste qui est à l’étude, mais pas tout de suite », a confirmé M. Véran, le 29 juin, en évoquant une possible entrée en vigueur en septembre, « lorsque la vaccination aura été proposée à tous les Français ».

Autre idée évoquée : une extension du champ des activités qui nécessiteraient la détention du passe sanitaire. Requis aujourd’hui pour participer à des rassemblements, accéder aux discothèques ou voyager à l’étranger, ce sésame pourrait concerner, à l’avenir, « davantage d’activités », annonce le gouvernement. Toujours avec le même objectif : inciter les Français à se faire vacciner davantage.

Au-delà, le sommet de l’Etat craint qu’une résurgence de l’épidémie coupe le pays en deux. Dimanche, Gabriel Attal a mis en garde contre une possible « fracture vaccinale » en France, susceptible de provoquer « du ressentiment » chez les vaccinés. Lesquels ne digéreraient pas de se voir imposer de nouvelles restrictions de liberté, à cause d’un rebond du virus chez les personnes non vaccinées. A une nouvelle crise sanitaire viendrait alors s’ajouter un enjeu de cohésion sociale.