Covid-19 (Coronavirus-2019nCoV) et crise sanitaire

Le Monde.fr : Covid-19 : Emmanuel Macron contraint à un nouveau tour de vis face au variant Delta

Juillet 2021, par infosecusanté

Le Monde.fr : Covid-19 : Emmanuel Macron contraint à un nouveau tour de vis face au variant Delta

Vaccination obligatoire des soignants, extension du passe sanitaire, restrictions supplémentaires pour certains territoires… Le gouvernement prépare de nouvelles annonces pour tenter de contenir la reprise de l’épidémie.

Par Alexandre Lemarié

Publié le 9/07/2021

Le répit aura été de courte durée. Le 20 mai, alors que les voyants repassaient au vert sur le front du Covid-19, Emmanuel Macron partageait un café en terrasse avec son premier ministre, Jean Castex, en se réjouissant de la « liberté retrouvée » par les Français à la faveur du déconfinement. Le chef de l’Etat se projetait alors avec gourmandise vers la fin de son quinquennat, en envisageant de relancer le train des réformes suspendues à cause de la crise sanitaire.

Un mois et demi plus tard, M. Macron voit son agenda politique de nouveau perturbé par la reprise de l’épidémie. « C’est Souviens-toi l’été dernier, grimace un responsable de la majorité. On pensait en avoir fini avec le Covid mais finalement, il revient. » Alors qu’il pensait pouvoir tourner la page du virus, le locataire de l’Elysée est contraint de remettre un nouveau tour de vis pour tenter de contenir la progression rapide du variant Delta, très contagieux.

Après une réunion consacrée à ce sujet, mercredi 7 juillet, Emmanuel Macron présidera un conseil de défense sanitaire extraordinaire, lundi 12, à l’issue duquel de nouvelles mesures devraient être annoncées. « Plusieurs dispositifs très opérationnels sont envisagés », explique un proche du chef de l’Etat, afin d’éviter qu’« une quatrième vague » vienne de nouveau mettre sous tension les services hospitaliers dans les semaines à venir.

Plusieurs pistes à l’étude
Parmi ces outils figure notamment la vaccination obligatoire pour les soignants. Le gouvernement entend mettre en œuvre cette obligation à travers un projet de loi, qui doit être présenté mardi 13 juillet en conseil des ministres, afin d’être adopté au Parlement avant la fin du mois. Le gouvernement est parvenu à trouver un consensus avec l’ensemble des forces politiques, à l’exception de La France insoumise, qui émet des réserves, et du Rassemblement national, défavorable. Mercredi, au terme d’une rencontre, le ministre de la santé, Olivier Véran, et une quinzaine d’organisations professionnelles du secteur s’y sont également dits favorables.

Vendredi 16, la ministre du travail, Elisabeth Borne, recevra les partenaires sociaux pour aborder la question des sanctions disciplinaires en cas de refus. La possibilité d’étendre la vaccination obligatoire à d’autres catégories en contact avec du public, comme les professeurs, fait débat.

Autre piste à l’étude : l’extension du passe sanitaire. Dans un entretien au Monde, le « M. Vaccins » du gouvernement, Alain Fischer, évoque la possibilité de rendre la détention de ce sésame nécessaire pour accéder aux cinémas, aux théâtres ou aux restaurants. Des lieux auxquels les non-vaccinés ne pourraient donc pas accéder, afin de les pousser à se faire injecter une dose. Les tests « pour convenances personnelles » pourraient ne plus être gratuits pour ces mêmes personnes à partir de la rentrée de septembre.

Le conseil de défense de lundi pourrait également décider d’un renforcement des obligations d’isolement pour les personnes contaminées, et d’un durcissement des contrôles aux frontières. Jeudi, le secrétaire d’Etat aux affaires européennes, Clément Beaune, a conseillé d’ « éviter » de se rendre en Espagne et au Portugal, où le virus repart fortement. Un message « de prudence et de responsabilité », qui ne signifie pas que les vacanciers français ont interdiction d’y aller. « Pour l’instant, les déplacements sont autorisés partout en Europe, à condition de détenir un passe sanitaire européen », rappelle l’exécutif.

Des projections qui inquiètent
En privé, M. Macron a demandé à ses troupes de réfléchir à « toutes les mesures défensives et offensives possibles », afin « d’anticiper », dans l’espoir d’éviter une nouvelle flambée. « Il y a une situation en France qui est inquiétante », a de nouveau mis en garde le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal, jeudi, après avoir évoqué la veille un variant Delta « beaucoup plus agressif » et « extrêmement rapide », qui représente désormais « plus de 40 % des contaminations » dans l’Hexagone.

Si le nombre de patients hospitalisés reste bas, le total de cas quotidiens est repassé, mercredi, au-dessus des 4 000 au niveau national, pour la première fois depuis près d’un mois. Et les projections donnent des sueurs froides au gouvernement, qui craint de compter près de 15 000 cas par jour dès fin juillet. « La courbe repart à l’exponentielle car ce variant va quatre fois plus vite que le britannique, qui allait lui-même deux fois plus vite que la souche d’origine », s’alarme un conseiller de l’Elysée.

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L’exécutif fait état d’une situation qui se détériore rapidement dans 55 départements, en particulier dans la région Provence-Alpes-Côte d’Azur et en Ile-de-France. De nouvelles restrictions pour certains territoires, comme les Landes, ne sont d’ailleurs pas exclues. Des mesures « à la marge », comme une baisse des jauges dans certains lieux, sont évoquées. En revanche, le recours à l’arme du confinement ou du couvre-feu n’est pas envisagé, que ce soit au niveau national ou local. Pour l’heure, l’exécutif cherche surtout à accroître la vaccination, présentée comme la « carte maîtresse pour sortir du tunnel ». « Le vaccin protège à 100 % du confinement », a répété M. Véran, jeudi, lors d’un déplacement dans un vaccinodrome à Paris.

« Le variant Delta a tué les retraites »
D’après son entourage, « il n’est pas exclu » que le président présente lui-même les nouvelles mesures anti-Covid-19 lundi, dans la foulée du conseil de défense, avant une réunion à l’Elysée avec les députés de la majorité, programmée à 19 heures. De quoi donner à cette prise de parole devant les Français, prévue au plus tard d’ici au 14 juillet – lors de laquelle il devait initialement exposer son plan de réformes d’ici à l’élection présidentielle de 2022 –, une tonalité très sanitaire.

« Nous avons deux sujets de tension, le Covid-19 et la relance économique. Ce seront les deux piliers de la fin du mandat », explique un proche du chef de l’Etat. D’après plusieurs sources, le retour de la crise sanitaire aurait en tout cas convaincu M. Macron de renoncer à relancer une réforme des retraites avant la présidentielle. « Le variant Delta a tué les retraites », résume un cadre de la majorité, estimant qu’une réforme « aussi clivante » n’a pas sa place, au moment où la « lutte contre le virus redevient prioritaire ».

« Je ne peux pas gérer l’été en pente douce », avait averti Emmanuel Macron début juin, en prévenant qu’il devrait prendre « des décisions difficiles ». A l’époque, il s’agissait du retour de la réforme des retraites. Reste à voir si finalement cela ne sera pas des mesures liées au Covid-19, qui reste le maître du temps depuis plus d’un an et demi.