Maternités et Hopitaux publics

Mouvement de défense de l’hôpital public (MDHP) - Absentéisme à l’hôpital : quelles en sont les causes ?

Avril 2016, par Info santé sécu social

Tribune d’André Grimaldi et Valérie Chigot

L’IFRAP a publié en février 2016 un palmarès de l’absentéisme dans les hôpitaux publics, le Figaro n’a pas tardé à en publier un autre, le 20 avril 2016.

Le lendemain, le vice président de la FHF, David Gruson semblait avoir trouvé la cause de cet absentéisme et demandait le rétablissement du jour de carence 1) ( supprimé en janvier 2014 dans la fonction publique ).

Il faut rappeler que l’IFRAP dans son rapport constate pourtant que l’absentéisme n’est pas significativement différent dans les hôpitaux privés dont le personnel conserve des jours de carence 2).

Faute d’en analyser les causes profondes , la seule proposition » efficace » serait doncde réinstaurer un jour de carence qu’on pourra augmenter si nécessaire à deux
ou trois jours, en attendant que le président de la FHF devenu ministre » fluidifie »
le statut des personnels en permettant aux hôpitaux publics de se transformer en ESPIC3)).

Les causes de l’absentéisme sont pourtant connues :

1°) Les conditions d’application des 35H et des RTT ont entrainé une fragmentation
de la prise en charge des patients. Quand dans une unité d’hospitalisation de semaine, les infirmières changent tous les 2 ou 3 jours, elles ont bien du mal à connaître les patients, et la motivation au travail n’est pas la même.

2°) Le tout T2A qui conduit à toujours plus d’hospitalisations de durée toujours plus courte.

La « productivité hospitalière » a augmenté depuis 2003 de plus de 2% par an. Jusqu’à il y a 3 ans l’augmentation du nombre de médecins avait suivi, mais pas celle des soignants non médicaux.

Avec une augmentation de l’ ONDAM de 1.75% pour une augmentation programmée des charges de 3%, le tout T2A va finir enfin par casser la machine hospitalière ! Fin de l’ »hospitalo centrisme » se réjouiront certains, mais hélas sans réelle alternative pour les malades.

3°) Dislocation voulue des équipes de soins au profit du taylorisme managérial. Les infirmières « polyvalentes » passent d’un jour à l’autre du 5ème (service X) au 3ème (service Y).

Les plus modernes ont même supprimé le terme de service pour que chacun et chacune comprenne bien qu’il n’est qu’un élément d’un pool. Le statut de « bouche-trou » ne suscite pas la motivation malgré les discours sur l’enrichissement personnel entraîné par la « polyvalence »

4°) Au delà d’un certain seuil, l’absentéisme des uns induit l’absentéisme des autres qui en ont assez de combler l’absentéisme des premiers. Et les cadres doivent se « recentrer sur leur coeur de métier : faire le planning » (sic)

5°) L’accroissement abracadabrantesque des inégalités salariales dans le pays, révélées tous les jours par les médias. En bas de l’échelle, l’idée « j’en fais assez pour ce que je suis payé » se répand.

Et la seule conclusion que tirent les manageurs et les commentateurs, c’est que l’absentéisme coûte cher à l’hôpital !

Aucun n’ose dire la vérité brutale :

LA DEGRADATION DES CONDITIONS DE TRAVAIL AUGMENTE L’ABSENTEISME ET ALTERE LA QUALITE DES SOINS.

Pour appliquer le slogan publicitaire « mettre le patient au cœur de l’hôpital ! », il faudrait d’abord peut-être se préoccuper des conditions de travail des soignants et arrêter de gérer l’hôpital comme une entreprise industrielle, voire plus mal qu’une entreprise industrielle.

Références

1. ↑ un jour de carence est un jour d’absence pour maladie non indemnisé par l’Assurance Maladie et l’employeur. Il varie de 0 -dans la Fonction publique- à 3 -dans le secteur privé, selon les accords de branche et les accords locaux-
2. ↑ « On constate donc qu’il n’y pas a priori de différence sur l’absentéisme toutes causes qui se situe pour l’ensemble du personnel à 24,4 jours pour l’hospitalisation privée contre 26,27 jours dans les hôpitaux publics de notre échantillon et à 19,4 jours hors parentalité pour l’hospitalisation privée contre 20,47 pour les hôpitaux publics. »
3. ↑ Le président de la FHF est Frédéric Valletoux, conseiller santé de Valérie Pécresse qui préconisait en 2013 que les hôpitaux publics puissent se transformer en Etablissements Privés à but non lucratif (ESPIC