L’hôpital

Le Journal du dimanche - TRIBUNE - La réponse d’André Grimaldi aux « fossoyeurs de l’hôpital public »

Février 2022, par Info santé sécu social

Le 26 février 2022
Par André Grimaldi

André Grimaldi, professeur émérite CHU Pitié Salpêtrière, répond à une tribune parue dans Le Monde d’Antoine Brézin, Guy Collet et Gérard Vincent sur la gestion de l’hôpital public

Voici la tribune d’André Grimaldi, professeur émérite CHU Pitié Salpêtrière et auteur du Manifeste pour la Santé 2022 (Editions Odile Jacob) :

« Dans une tribune au journal Le Monde ( 25/02/2022), Guy Collet et Gérard Vincent, deux anciens directeurs des hôpitaux et responsables de la Fédération hospitalière de France (FHF) prétendent sauver l’hôpital public grâce à trois mesures :

1 : “confier aux régions la tutelle et la régulation du système de santé, les conseils régionaux devenant responsables des équilibres financiers” ;

2 : “inclure dans un service public de santé régional, l’ensemble des acteurs de santé, y compris les cliniques commerciales” ;

3 : “changer radicalement le statut de l’hôpital public en lui donnant celui de fondation”, c’est-à-dire, pour parler clair, d’une personne morale de droit privé à but non lucratif.

Autrement dit pour défendre l’hôpital public auquel, ils déclarent “être viscéralement attachés”, ils proposent de le privatiser. Les mêmes furent de grands partisans de la tarification à l’activité (T2A) sensée, à leurs dires, permettre à l’hôpital de gagner des “parts de marché” et de la gouvernance d’entreprise mise en place par la loi HPST (dite loi Bachelot). Aujourd’hui, au lieu de reconnaître la faillite de la politique de “l’hôpital-entreprise” dont ils firent la promotion, ils proposent de faire un pas de plus vers la privatisation complète du système de santé. Que la Sécurité sociale finance les dividendes des fonds de pension des chaînes de cliniques commerciales internationales et que le statut privé de fondation autorise la mise en liquidation judiciaire débouchant sur un éventuel rachat par des consortiums de cliniques à but lucratif ne semblent pas leur poser de problèmes.

Ces deux défenseurs du service public en sont en réalité les fossoyeurs. Ils se gardent bien d’ailleurs de définir les attributs d’un service public de santé : la non sélection des patients, l’application du juste soin pour le patient au moindre coût pour la collectivité, l’accès à des soins de qualité sur l’ensemble du territoire, l’absence de dépassement d’honoraires, la participation à la permanence des soins et à une politique territoriale de santé. Ils osent même affirmer que dénoncer “l’insuffisance des moyens budgétaires est une tromperie voire une lâcheté”.

Ils proposent d’appliquer à la santé le principe néolibéral

Au fond ils proposent d’appliquer à la santé au nom de la lutte contre la bureaucratie, le principe néolibéral : moins d’Etat, plus de marché. Il s’agit au contraire de rompre avec cette politique de privatisation rampante suivie depuis plus de quinze ans et de réformer le système de santé selon trois principes : 1 subsidiarité, les décisions se prennent au niveau où elles s’appliquent 2 démocratie, impliquant les professionnels et les usagers dans une cogestion décentralisée et 3 complémentarité des établissements et des acteurs respectant les principes d’un service public.

Quoi qu’il en soit les responsables actuels de la FHF et notamment son président, Frédéric Valletoux, maire de Fontainebleau, membre du groupe Agir appartenant à la majorité présidentielle et vice-président de la région Ile de France dirigée par Valérie Pécresse, ne peuvent pas éviter de se prononcer sur les propositions de ces deux anciens hauts responsables de la FHF. »