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lequotidiendumedecin.fr : La liberté d’installation n’est pas supprimée » : l’auteure de l’amendement sur le conventionnement sélectif s’explique

Octobre 2016, par infosecusanté

La liberté d’installation n’est pas supprimée » : l’auteure de l’amendement sur le conventionnement sélectif s’explique

Henri de Saint Roman

20.10.2016

Députée PS des Côtes-d’Armor, Annie Le Houérou défend son amendement très controversé au PLFSS, adopté en commission, qui prévoit un conventionnement sélectif dans les zones surdenses (une nouvelle installation pour un départ). Pour elle, le texte préserve la liberté d’installation.

LE QUOTIDIEN : Pourquoi revenir à la charge aujourd’hui, en fin de quinquennat, sur la liberté d’installation des médecins ?

ANNIE LE HOUÉROU : Je ne reviens pas à la charge en fin de quinquennat. Il s’agit d’un amendement qui revient systématiquement à l’ordre du jour de chaque PLFSS depuis le début de mon mandat, et qui a aussi été présenté lors de la loi de santé. C’est un sujet qui me préoccupe parce que dans ma circonscription, il y a un vrai problème d’installation de généralistes. Même si beaucoup a déjà été fait depuis le début du quinquennat, la mesure que nous préconisons est un outil supplémentaire.

Il faudra définir les zones plutôt surdotées avec les ARS et y limiter l’installation. Il ne s’agit pas de la supprimer : les médecins continueront à pouvoir s’y installer, mais n’étant pas conventionnés, leurs consultations seront moins bien remboursées par la Sécurité sociale [sur une base dérisoire NDLR]. La liberté d’installation est préservée, mais nous installons un outil de régulation qui pourrait d’ailleurs ne durer qu’un temps, car si la répartition se fait de façon plus homogène, le dispositif n’aura plus lieu d’être.

La dernière convention prévoit plusieurs mesures incitatives. Vous n’y croyez pas ?

Si, mais la situation est suffisamment préoccupante pour les compléter. Les syndicats et l’Ordre reconnaissent qu’il y a un vrai problème, et je ne fais que proposer un outil supplémentaire. Il est contesté par certains, mais il est vu d’un très bon œil par bon nombre de mes collègues !

Mais que répondez-vous à ceux qui jugent que cette mesure aggravera la situation en dissuadant encore plus les jeunes de s’installer ?

Je ne crois pas du tout à cet argument. J’ai aussi entendu qu’on allait dégoûter les jeunes de faire des études médicales ! Je connais un nombre très important de jeunes passionnés, qui veulent faire des études de médecine mais qui en sont empêchés par une sélection très pointue. Il faudrait revoir ça parce que, parallèlement, on n’a pas assez de médecins pour assurer un service minimum dans nos communes.

Marisol Touraine a dit qu’elle était opposée à votre amendement. Comment expliquez-vous ce décalage entre les élus de terrain et le ministère ?

Je ne sais pas, moi j’essaie d’apporter ma pierre à l’édifice. Il ne s’agit pas de s’opposer aux médecins, bien au contraire. Il s’agit de voir comment on peut mieux travailler avec eux, avec leurs représentants, pour trouver la solution la plus adaptée. Dans mon territoire, les médecins sont parfois dépassés par le nombre de demandes. Ils offrent donc un service dégradé, non pas de leur fait, mais à cause des files qui s’allongent. Les nouveaux arrivants ne trouvent plus de médecin traitant. Du coup, ils vont aux urgences qui se retrouvent submergées, et ça coûte très cher. Certains critiquent ma proposition, mais tout le monde partage le diagnostic.

Votre amendement sera discuté la semaine prochaine en séance plénière. Avez-vous bon espoir de trouver une majorité de députés pour l’adopter ?

Nous avons beaucoup travaillé sur cet amendement. Il est présenté par des députés de différentes sensibilités politiques. Je ne préjuge pas du résultat, mais quoi qu’il arrive, je continuerai à défendre ce point de vue à l’assemblée et dans l’hémicycle