Maternités et Hopitaux publics

Paris Normandie.fr : Les défenseurs de la maternité de Bernay vent debout contre les déclarations de la ministre de la Santé

Octobre 2018, par infosecusanté

Les défenseurs de la maternité de Bernay vent debout contre les déclarations de la ministre de la Santé

Polémique. Les défenseurs de la maternité de Bernay réagissent vigoureusement aux propos tenus par la ministre de la Santé qui a mis en cause ce week-end le bon fonctionnement de l’établissement. Ils sont scandalisés.

Publié le 15/10/2018 à 20:00

Les propos tenus par la ministre de la Santé lors de son passage en Seine-Maritime, samedi, sont durs à avaler pour les personnels et les défenseurs de la maternité de Bernay. Tandis qu’Agnès Buzyn s’est largement exprimée dans notre édition d’hier lundi, les réactions ne se sont pas fait attendre après la mise en cause du fonctionnement de la maternité de Bernay qui, selon elle, « pose des problèmes de sécurité bien réels ». En tout premier lieu, l’avocat Pierre Jalet, qui apporte son concours aux défenseurs de la maternité et de l’hôpital, tient à la contredire.

Selon la ministre, la maternité doit fermer parce que les gardes par les médecins spécialistes, et notamment les gardes de nuit, ne seraient pas correctement assurées. Qu’en est-il ?

Pierre Jalet : « C’est très grave. Cela voudrait dire que la sécurité n’est pas assurée et qu’une femme ayant un accouchement difficile de nuit ne pourrait pas être prise en charge. Alors, je pose une question : si tel est le cas, pourquoi avoir renouvelé en mars 2017 l’autorisation de fonctionnement de la maternité jusqu’en 2022 ? Ce serait irresponsable. Pour être clair, s’il existe effectivement des trous dans le tableau de garde de nuit, cela signifie qu’il y a danger et qu’il faut arrêter immédiatement l’activité de cette maternité. Or, pour avoir consulté les plannings de gardes depuis 2016, je peux assurer qu’ils sont bien complets. »

Agnès Buzyn dit par ailleurs, ne pouvoir supporter une prétendue « médecine à deux vitesses ».

« Si je comprends bien, il y aurait des maternités haut de gamme et des maternités comme celle de Bernay qui seraient des maternités d’entrée de gamme. Nous sommes là en présence d’un ‘’cliché’’. Jusqu’alors, la maternité de Bernay n’a jamais failli sur le plan médical. C’est le principal, non ?

Témoignages
sur la qualité des soins

Mais surtout, si l’on veut parler de discrimination, que dire des femmes qui pour accoucher feront entre trois quarts d’heure et une heure de route, avec les risques importants que cela comporte ? J’ai dans mon dossier nombre d’attestations de femmes qui, ayant accouché à Bernay, témoignent de la qualité des soins, du confort et de l’attention qui leur ont été prodigués. Et puis, il ne faudrait pas oublier toute la dimension sociale, c’est-à-dire la prévention dont les services de Bernay entourent les femmes exposées à des situations difficiles comme par exemple des violences conjugales, etc. Pour cela il faut du temps et de la confiance. Je ne suis pas certain que les impératifs d’urgence que l’on pourra rencontrer dans une maternité où l’on accouche en grand nombre permettront une telle approche. »

La ministre de la Santé invoque encore la non-certification de la maternité de Bernay pour justifier sa fermeture. Qu’en pensez-vous ?

« Il est vrai que Madame Buzyn ne sait plus quoi invoquer : problème de gardes, non-certification... Nous avons vu que le problème des gardes n’est pas sérieux. Il en va exactement de même de la non-certification. Nous avons un rapport d’un professeur de médecine missionné par l’ARS (Agence régionale de santé) pour vérifier si l’hôpital, après l’inspection, a pu se mettre en conformité. Que dit cet expert ? Tout d’abord que la non-conformité est de caractère procédural et réglementaire, et non de caractère technique et médical. Mais surtout, il affirme que l’hôpital a su se mettre en conformité avec les recommandations de l’ARS. Il est évident que le propos de la ministre, à l’instar du propos de l’ARS, est un propos ‘’fabriqué’’, de circonstance, sans aucune nuance, pour abattre purement et simplement la maternité qui... coûte trop cher. »

« Ces propos mensongers sont un pur scandale »

« Les propos mensongers de la ministre de la Santé sont un pur scandale, ils ne visent qu’à faire fermer la maternité au plus vite », fait savoir Annabelle Vincent, présidente de l’association Liberté, Égalité, Proximité. Une association qui a organisé la mobilisation de mercredi dernier, sur le site de l’hôpital de Bernay - lire notre édition du 11 octobre.

Un service diffamé

« En effet, la ministre de la Santé et des Solidarités (...) s’est autorisée à exprimer des propos totalement ubuesques, mensongers, voire diffamatoires concernant la maternité de Bernay. Elle a incriminé ce service, en dénonçant la non-conformité de son tableau de garde des gynécologues-obstétriciens, affirmant que ‘’des nuits entières se déroulaient sans présence de médecins de garde’’. Madame Buzyn ne semble pas avoir vérifié ses sources, car c’est totalement erroné. »

Tentative de déstabilisation

« En qualité d’association de défense de la maternité, nous tenons à immédiatement démentir les fausses allégations de la ministre, qui font probablement suite à la toute récente assignation au tribunal de grande instance d’Évreux de la directrice générale de l’ARS de Normandie, qui avait, cet été, tenté de déstabiliser la maternité de Bernay, en alléguant à la presse que celle-ci était d’ores et déjà fermée, que les parturientes accouchaient ailleurs, et que les équipes ne pouvaient plus assurer un bon suivi des patientes, ce qui était déjà totalement faux. Cette entreprise de démolition est un pur scandale, visant à faire fermer la maternité avant la promesse de prolongation de son fonctionnement jusqu’en février 2019.

Une action
en justice

Les propos de la ministre sont consternants, inadmissibles et intolérables, pour l’ensemble du personnel médical et hospitalier, comme pour tout citoyen.

Nous sommes révoltés, indignés, d’une telle énormité avancée par une ministre de la République. Cette posture totalement irresponsable relève d’une malveillance intentionnelle. Aussi, nous avons décidé, de soutenir une nouvelle action en justice, en assignant Agnès Buzyn devant les tribunaux. »

Infos pratiques

Contact : liberte.egalite.proximite@gmail.com anna.vincent@hotmail.fr

Syndicat

Le syndicat FO ne mâche pas ses mots pour qualifier l’intervention de la ministre de la Santé. « Agnès Buzyn a tenu des propos outrageux, humiliants, blessants et scandaleux », communique le syndicat.

« Elle nourrit sciemment l’inquiétude de la population car il n’y a aucun fondement à ses allégations. Son seul but est de justifier coûte que coûte la fermeture de la maternité de Bernay par tous les moyens, y compris par le mensonge.

En effet, nous avons en notre possession les listes de garde des gynécos-obstétriques et des anesthésistes validée et signée d’une part du Dr Makké, [chef du service de gynéco-obstétrique, Ndlr] et, d’autre part, de la direction du centre hospitalier bernayen.

Compte tenu de cette réalité, c’est donc une véritable injure lancée à la face de celles et de ceux qui œuvrent au sein de cette maternité ainsi que sur le service public de santé.

Le syndicat FO a interrogé, à ce sujet, la direction de l’établissement bernayen, ce lundi [hier, Ndlr]. Nathalie Horn, directrice déléguée de l’établissement, en réponse à cette énormité émanant de la ministre de la Santé, nous a déclaré qu’elle n’était pas informée de la tenue de tels propos de la part de la ministre », rapporte Thomas Drouet, secrétaire départemental adjoint FO, branche santé