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Le généraliste - Secret médical : un assureur lui réclame des infos après un décès, le généraliste lui rappelle la loi

Décembre 2018, par Info santé sécu social

Camille Roux | 11.12.2018

Jusqu’où iront les assurances pour obtenir des informations confidentielles sur leurs assurés ? Le Dr Adrian Combot, généraliste à Lannilis (Finistère), se bat depuis plusieurs semaines avec la banque-assurance Socram, qui demanderait au médecin de fournir des informations confidentielles (antécédents, diagnostic…) au sujet d’un patient décédé. Sans ces renseignements, la société refuserait de débloquer les fonds destinés aux ayants droit.

En colère, le généraliste vient de poster sur Twitter le courrier (voir ci-dessous) qu’il a adressé à l’assurance. Le praticien rappelle à la compagnie que le médecin traitant n’est pas habilité, au regard de la loi (article R.4127-4 du code de la santé publique) et des recommandations du Cnom, à renseigner aux assurances des informations couvertes par le secret médical. Il n’est visiblement pas le seul à être confronté aux dérives des assurances. Sa lettre a été partagée plus de 60 fois sur Twitter.

Informations confidentielles
Pendant ce temps, la famille du défunt continue de verser ses mensualités à l’assurance. « Je souhaite que la famille de monsieur P. ne soit pas plus longtemps pénalisée de façon illégale par vos décisions », met en garde le médecin dans son courrier. Il précise également avoir tenté plusieurs fois de contacter le centre d’appel Socram sans réponse et menace de saisir sa protection juridique. « Je vous suggère fortement de modifier vos procédures car je n’aurais pas toujours la patience de régler ces problèmes à l’amiable », prévient le Dr Combot.

Suite du différent avec la #socram dont j’avais parlé avec ⁦@panarmorix⁩ et ⁦@RichardTalbot9⁩ , j’ai écrit ce courrier ce soir, ce n’est pas du ⁦@LehmannDrC⁩ ,c’est écrit en un jet, il doit y avoir des fautes d’orthographe mais N’hésitez pas à RT pour la pub ! pic.twitter.com/tAvupoBdug
— MedecinDesAbers (@MedecinDesAbers)

7 décembre 2018
Le Conseil national de l’Ordre des médecins précise bien que « le médecin, lié par le secret médical, ne doit pas répondre à ce type de question. On admet, tout au plus, qu’il dise si la mort est naturelle, due à une maladie ou à un accident ou encore si cela correspond bien à la réalité ».

Avec ce courrier, le généraliste breton espère donner un coup de pouce aux ayants droit de son patient afin que les sommes dues leur soient restituées. « Fournir un certificat est normal mais les demandes des assurances cachent parfois une volonté à peine déguisée de ne pas payer », regrette le Dr Combot. Les assurances se mettent alors en quête d’informations sur la santé de leurs souscripteurs dans le but de démasquer de fausses déclarations.

De plus en plus de cas
Sur les réseaux sociaux, des médecins s’interrogent sur les nouvelles pratiques des assurances. Plusieurs généralistes ont en effet remercié le Dr Combot d’avoir partagé sa lettre et prévoient de s’en servir de modèle pour contrer les demandes insistantes. Ces dernières seraient de plus en plus fréquentes. Le Cnom, qui organisait un débat sur le secret médical au début du mois, a rappelé que le médecin n’est pas tenu de remplir les questionnaires de santé de l’assurance et peut opter pour la simple rédaction d’un certificat médical remis en main propre au patient.

« Le médecin ne peut pas être délié du secret médical, il n’a donc pas à transmettre lui-même des éléments à la compagnie d’assurances. Par contre, si le patient lui-même demande ces éléments, le secret médical n’est pas opposable au patient » a précisé le Dr Jacques Lucas, vice-président de l’Ordre et délégué général au numérique. Pour le Dr Combot, il est important de préserver le secret professionnel et de ne pas céder aux assurances. « Si les patients perdent confiance en nous, cela pourrait avoir des conséquences graves sur les prises en charge », prévient-il.